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Jean-Nöel Reinhardt (VirginStore) : ‘ Le téléchargement illégal n’explique qu’en partie la crise de la musique ‘

Après la cacophonie gouvernementale sur la baisse de la TVA, le président du directoire des magasins Virgin et du site de téléchargement VirginMega.fr dresse un panorama du marché de la musique.

Les ventes de disques baissent. Le piratage et la multiplication des offres de téléchargement légal ont-ils signé la mort du CD ? Je ne pense pas que le CD soit mort. Le téléchargement illégal n’explique qu’en partie la crise de la musique. L’industrie du disque doit redéfinir son modèle. Il faut peut-être produire moins, tout en laissant de plus en plus de
place à la création. Les Bénabar, Carla Bruni ou Calogero vendent. Il faut reconsidérer la politique marketing menée depuis des années, qui consiste à investir des sommes colossales dans des promotions outrancières, des spots télévisés en
prime… Le marketing ne doit pas créer le marché. Les artistes superficiels et formatés disparaîtront, ce n’est peut-être pas un mal… L’industrie a détruit la valeur musicale d’un CD en menant notamment une politique des prix
incompréhensible. Un CD neuf vaut 15 euros. Six mois plus tard, le même CD en vaut 20 alors que le produit est amorti. Quand le public ne peut plus lire une offre, il s’en détourne.La baisse de la TVA à 5,5% peut-elle relancer les ventes de disques ?C’est l’un des éléments de réponse. Il faut que le prix de la musique baisse et tout le monde doit y participer, l’État comme les maisons de production. Sur le Net, deux morceaux coûtent environ deux euros alors qu’un CD deux titres
en magasin vaut 5,18 euros. La dématérialisation a permis une baisse du prix final de l’ordre de 50 %.La baisse de la TVA profitera-t-elle vraiment aux consommateurs ?Nous avons signé l’année dernière, lors de la fête de la musique, un accord avec le ministre de la Culture, Jean-Jacques Aillagon. Nous nous sommes engagés à répercuter intégralement la baisse de la TVA sur le prix final du disque.La baisse de la TVA ne concerne que les CD, pas le téléchargement. Ne craignez-vous pas une distorsion de concurrence ?C’est un problème majeur. La musique dématérialisée doit bénéficier de la baisse de la TVA au même titre que le disque. La profession ne le demande pas aujourd’hui, car on ne peut pas mélanger des dossiers qui ne dépendent pas de la
même législation.Le lancement du VirginMega pourrait à terme détourner la clientèle des magasins. Pourquoi avoir lancé un site de téléchargement ?Nous avons fait ce choix il y a deux ans, face à des ventes de disques en baisse. Soit nous laissions s’évader une partie de la clientèle. Soit nous tentions de la conserver avec une offre de téléchargement légal. Aujourd’hui, sur
Virginmega, notre catalogue est composé de 300 000 titres. A terme, la majorité des internautes sera prête à payer pour de la musique dématérialisée, mais pas à n’importe quel prix. Un euro le titre est un prix raisonnable. Certains
rechignent à payer cette somme pour télécharger un morceau, alors qu’il n’hésitent pas à payer deux euros pour ne télécharger qu’un extrait, comme pour les sonneries sur leur portable.Le Snep a annoncé que les premières poursuites judiciaires pourraient avoir lieu dans les prochaines semaines. Etes-vous favorable à la répression ?Il faut lutter sur tous les fronts. Mais la réponse au téléchargement pirate reste la mise à disposition d’une vraie offre de téléchargement légal.Justement, comment envisagez-vous l’arrivée de nouveaux acteurs dans le monde du téléchargement légal ?Pour certains, la musique n’est qu’un produit d’appel pour proposer des produits informatiques. Ce modèle est pervers. Ces acteurs peuvent accepter de rogner leur marge sur la vente de musique, dans la mesure où ils la récupèrent sur
la vente de produits technologiques. Nous devons cependant veiller à ce que tous gagnent de largent sur la vente de musique.

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Propos recueillis par Hélène Puel