Passer au contenu

Jacques Tournet (mairie de Toulouse) : ‘ A l’État de nous fournir les normes et la réglementation adéquates ‘

Les collectivités locales s’installent dans l’e-Administration. Comme à Toulouse, où Jacques Tournet ?”uvre dans ce sens depuis plus de trente ans. La volonté existe, mais un grand nombre de difficultés pratiques
persistent.

Quelle principale difficulté une collectivité locale rencontre-t-elle face à l’e-Administration ?Nous ne pourrons véritablement démarrer que le jour où l’Etat nous donnera des normes pour communiquer facilement entre administrations. Aujourd’hui, nous avons parfaitement identifié les besoins du citoyen, mais nous ne disposons
pas d’assez de formats d’échange entre collectivités ou avec les ministères. Nous avons donc du mal à nous positionner.Pourtant, des progrès ont déjà été accomplis, notamment dans la dématérialisation des procédures.Cela a été fait pour traiter sans papier les marchés publics ou pour échanger certains documents avec la Préfecture. Mais c’est trop peu, et beaucoup d’autres chantiers restent à ouvrir. Nous agissons pour le compte de l’Etat sur de
grosses opérations. Il lui revient donc de nous fournir les normes et la réglementation adéquates.Etes-vous donc aussi confrontés à un problème d’organisation ?En fait, l’aspect réglementaire est le deuxième point qui nous pose un problème. En effet, les administrés veulent surtout pouvoir accéder directement à l’état civil, aux données sociales ou aux procédures dématérialisées, dont la
plupart sont définies par l’Etat. Celui-ci a donc pour rôle de normaliser les échanges et de fixer les règles afin d’éviter la remise en cause de nos investissements technologiques. Mais, apparemment, il sera difficile d’imposer cette exigence aux
grands ministères. Or, tant qu’ils ne le feront pas, les collectivités locales resteront paralysées en termes d’investissement.Les blocages ne sont-ils pas également humains ?Je ne sais pas répondre à cette question, puisque j’ignore le nombre de fonctionnaires concernés par l’e-Administration en administration centrale. En revanche, je sais parfaitement que les e-procédures instaurées en mairie ont peu
d’impact sur les effectifs. Par exemple, la carte de vie quotidienne ne les diminuera pas, car il faudra toujours informer les gens et suivre les opérations. Non, vraiment, je ne vois pas où l’on pourrait procéder à des réductions
d’effectifs.Les saisies et les traitements devraient toutefois s’effectuer plus rapidement…Certes. Mais cela aboutit moins à des économies en temps de travail qu’à une diminution des moyens matériels. Ainsi la dématérialisation des marchés publics réduit-elle clairement le coût des échanges. Cependant, elle demande une
gestion plus lourde : il faudra gérer un circuit papier et un autre électronique, réorganiser en profondeur le service d’appel d’offres, alors que, la voie dématérialisée se calquant sur la procédure papier, les procédures ne sont pas
réellement allégées. Par contre, avec l’e-Administration, on devrait ­ à effectif constant ­ accroître les activités et opérer des services complémentaires.Les élus et les cadres territoriaux sont-ils suffisamment sensibilisés aux technologies ?Ils le sont, mais je déplore que le CNFPT [Centre national de la fonction publique territoriale, NDLR] supprime actuellement les stages de formation destinés aux utilisateurs pour leur faire comprendre les
systèmes d’information. C’est regrettable à la fois pour l’avenir et pour la diffusion de la culture informatique dans les collectivités locales.Et dans votre mairie ?A Toulouse, nous sommes passés depuis dix ans d’une organisation informatique classique de la DSI à un modèle d’assistance à la maîtrise d’ouvrage. Nous avons formé nos cadres à la maîtrise du système d’information. Utilisateurs et
informaticiens, à l’instar de la direction générale des services, ont de réels échanges. Mais, pour ce faire, tous les administratifs doivent être correctement formés aux technologies de l’information.Rencontrez-vous des problèmes pour recruter des informaticiens ?Il est plus facile aujourd’hui de recruter, car les candidats sont plus nombreux. Nous n’avons pas de problèmes pour trouver des ingénieurs de qualité. En revanche, les techniciens plus spécialisés font défaut. En fait, nous
renouvelons les cadres informatiques qui partent exercer leurs talents dans d’autres services municipaux. Ils occupent alors des tâches métier, où leurs compétences informatiques permettent de faciliter l’usage des technologies dans les
services.Quels profils recherchez-vous ?Nous manquons de webmestres, car il n’existe toujours pas de filières de recrutement ou de formation spécifiques. Nous avons aussi du mal à trouver des candidats dans les métiers de la recherche documentaire, travaillant au niveau
du système d’information et sachant organiser et manipuler l’in-formation. Une autre demande concerne les techniciens de haut niveau ­ sur les réseaux, notamment. Notre handicap ne provient ni du manque de candidats potentiels ni du niveau de
rémunération à la hauteur de la spécialité, mais de l’impossibilité de leur proposer une évolution de carrière satisfaisante.Après plus de trente ans d’expérience, quel regard portez-vous sur les technologies de l’information ?Aujourd’hui, je suis optimiste sur les capacités de l’informatique traditionnelle à répondre de mieux en mieux aux besoins d’une collectivité comme la nôtre. Elle est, en effet, plus fiable, plus performante, et plus
communicante.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Hubert d'Erceville