01net. : Vous êtes considéré comme le père des systèmes d’information géographique (SIG). Où en est ce secteur selon vous ?Jack Dangermond : Même si ce secteur existe maintenant depuis pas mal d’années, nous ne sommes qu’au début des SIG. Leur rôle augmente dans la société de l’information qui est la nôtre. Pour plusieurs raisons, à cause de l’état de la planète, qui nécessite que l’on fasse quelque chose rapidement dans bien des domaines, mais aussi à cause de l’avancement des technologies mises en ?”uvre. Les SIG sont un outil précieux de prévision, d’analyse, d’anticipation et donc d’aide à la décision. Ils évoluent du statut de solutions applicatives vers le statut de services. En fait, ils répondent désormais à des questions comme ” Où suis-je ? “, ” Venez m’aider “, ” Où est-ce ? “, ” Comment y aller ? “, etc.Ce ne sont pas seulement des applications particulières des technologies de l’information ? Non ! Les SIG sont un vecteur d’intégration des données, des applications, des méthodes, des approches. Ils permettent par exemple d’intégrer en un système parlant des données socio-économiques sur un territoire, mais aussi des données environnementales, démographiques, etc. La plupart des grands éditeurs de logiciels comme Microsoft, Oracle, SAP ou IBM développent désormais autour de SIG. Mais, pour mener à bien ce travail d’intégration, nous manquons de généralistes. Le marché est plein de spécialistes, mais pour connecter des points qui n’ont a priori rien à voir ensemble, pour synthétiser des informations de registres différents, il nous faut de bons généralistes et nous en manquons terriblement !Est-ce le rôle de l’information géographique que de tout coordonner ? Oui, si l’on veut comprendre les informations dont on dispose. L’information géographique est un langage puissant et quasi universel. Les cartes sont intuitives, tout le monde les comprend. Et elles permettent de faire passer beaucoup d’informations. Esri a, par exemple, envoyé une trentaine de personnes à New York à la suite des attentats du 11 septembre. Elles ont travaillé 24 heures sur 24 à produire des milliers de cartes intégrant les informations disponibles dans les différents services de la ville. Ce travail de synthèse, qui n’avait jamais été fait auparavant, a permis d’avoir une vision très intégrée de la ville, de ses ressources, de ses réseaux. Il a permis de savoir comment acheminer les secours, évacuer les décombres, quels itinéraires faire prendre aux convois, etc. Et ce sera un outil précieux pour la suite, pour reconstruire ou réaménager .Internet prend-il part au développement des SIG ?Oui, bien sûr. Avant, les cartes étaient le privilège des rois. Puis l’imprimerie a changé cela. Aujourd’hui, tout est mesuré, de combien de personnes regardent un film à l’intensité d’un tremblement de terre, et toutes ces données, toutes ces mesures, sont disponibles sur Internet. Les SIG, en intégrant toutes ces informations, leur donnent une nouvelle portée.Donc, il ne s’agit pas que d’un gadget ?Bien sûr que non ! Au contraire, l’information géographique est un vecteur de démocratie. Chacun peut accéder aux informations disponibles sur Internet et prendre de meilleures décisions. Cela se traduit aussi par des économies importantes pour les entreprises, pour les gouvernements ou les administrations, pour les agriculteurs, pour les individus. Si vous pouvez consulter sur Internet les données relatives au site sur lequel vous voulez construire votre maison, vous saurez si c’est une zone inondable, si le terrain a été pollué, où sont les écoles les plus proches et quels sont leurs résultats, quels sont les projets d’urbanisation déposés ou acceptés, etc. Vous accéderez à ces données simplement, depuis chez vous, mais, surtout, vous pourrez les lire et les comprendre facilement. Vous prendrez une décision en toute connaissance de cause. On évite ainsi beaucoup de problèmes ultérieurs.
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