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J-F Abramatic (W3C) : ” Le consensus sur les techniques Web et leur déploiement sont les défis à relever “

Président du consortium en charge de l’évolution des standards du Web, Jean-François Abramatic vient de quitter ses fonctions. Pour la première fois depuis son départ, il dresse le bilan de son action à la tête du World Wide Web Consortium (W3C) et nous donne sa vision du Web futur.

Dans un entretien exclusif, Jean-François Abramatic dresse le bilan de sa présidence du W3C.
01net. : Pouvez-vous dresser un bilan de vos cinq années à la tête du consortium en faisant le point sur les grandes évolutions (XML, IPv6, etc.) et les ratés du W3C comme le Smil par exemple ?
Jean-François Abramatic : XML constitue désormais la fondation essentielle du Web. Son développement, son utilisation dans d’autres spécifications du W3C ( XHTML, SVG, Smil, P3P, etc.), son déploiement dans de nombreuses applications verticales montrent l’efficacité de l’organisation que nous avons créée. IPv6 (Internet Protocol version 6) ” appartient ” à l’ IETF. Son rôle sera également important, mais W3C n’est pas en position de revendiquer une contribution sur ce sujet.Le Web est devenu un réseau de ” masse “, quelles en sont les conséquences structurelles ?Le succès du Web, en particulier son usage par le grand public, a posé de nouveaux défis aux concepteurs. C’est ainsi que, très tôt, nous avons développé des activités dans les domaines que nous avons appelés “Technology and Society”et“Web Accessibility Initiative”. Apporter simultanément des réponses aux questions techniques d’architecture (XML) et d’interface homme-machine (HTML) d’une part, et aux questions de sécurité, de protection des données personnelles, de guides pour le développement de contenus accessibles, d’autre part, a constitué un des aspects les plus passionnants de nos travaux.Comme définiriez-vous le rôle du W3C aujourd’hui ? Est-ce simplement une chambre d’enregistrement des standards de fait des industriels ?Non. Je pense que nous avons su maintenir un équilibre entre les différents acteurs : les membres, le public, l’équipe. Prétendre que son fonctionnement est réellement optimal serait, bien entendu, très arrogant. Les participants au consortium le font évoluer en permanence pour qu’il puisse trouver les meilleurs moyens de contribuer au développement du Web. Il y a peu de doute sur le fait que W3C a joué, joue et jouera un rôle décisif pour que le Web réponde aux besoins de la communauté. Si on le compare aux autres organisations impliquées dans des initiatives comparables, j’ai la prétention d’affirmer que le W3C a inventé une approche originale de la conception et de la standardisation de nouvelles technologies.Maintenant que la Net-économie s’est calmée, le temps d’une remise à plat technique n’est-il pas venu ?Récemment, j’ai participé à une réunion où Francis Lorentz a utilisé une image sportive pour décrire la situation de la Net-économie. Il comparait le rythme d’évolution des années 1996-1999 à celui d’un 100 mètres et celui des années 2000-2002 à un marathon. Je pense que les concepteurs ont toujours eu l’impression de faire du demi-fond, un 1500 mètres. Le développement de technologies telles que XML, XML Schemas demandent du temps (comme, en son temps, le développement des technologies des bases de données).Voyez-vous des obstacles techniques, fonctionnels ou politiques au développement du Net pour les cinq ou dix ans à venir ? Et si oui, lesquels et comment les résoudre ?Je vois plutôt des obstacles dans le déploiement du Net plutôt que dans son développement. Les questions de sécurité, robustesse, qualité de service ont des solutions techniques. Le développement du consensus sur les techniques à utiliser et, surtout, leur déploiement à travers des produits et services intéropérables restent les défis à relever. Pour surmonter ces obstacles, il faudra par des efforts sans relâche faire émerger des solutions acceptables par l’ensemble des acteurs.Quelles sont les grandes évolutions à attendre : Internet citoyen, Web multimédia, multimédia mobile ?La vision du Web de demain est construite à partir de trois objectifs. Tout d’abord, l’accès universel : le premier objectif du W3C est de bâtir un Web accessible à chacun quels que soient le matériel, les logiciels ou l’infrastructure de réseau utilisés, la langue, la culture, la localisation géographique ou les capacités physiques et mentales de l’utilisateur.Quelles sont les raisons de votre départ du W3C ?Le passage du cap de la cinquantaine a engendré chez moi le besoin de porter un regard sage sur ce que je souhaitais faire de mes prochaines années professionnelles. Le W3C est l’expérience la plus riche que j’ai connue à ce jour. La décision la plus facile était, bien entendu, de poursuivre l’aventure. J’ai tout de même choisi de m’ouvrir à d’autres opportunités. Je souhaitais rejoindre l’industrie du logiciel dans un poste de responsabilité opérationnelle, choisir une entreprise pour laquelle l’activité de recherche et développement est décisive, et enfin travailler avec une équipe que j’apprécierais. Lorsque Pierre Haren m’a proposé de rejoindre Ilog en tant que responsable de la recherche et développement, la concordance des trois critères m’a mené à franchir le pas.Avez-vous une conclusion ?Pour que le Web devienne un moyen de communication au sens plein du terme, il faut que l’on puisse ” écrire ” aussi aisément que l’on peut ” lire “. Le Web a connu ses premiers succès grâce au déploiement de navigateurs très faciles d’usage. Il contribuera à changer la manière dont nous communiquons lorsque chacun pourra publier aussi facilement que nous pouvons aujourd’hui accéder aux contenus.

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Laurent Campagnolle