Bonjour à toutes et à tous, bienvenue sur ce chat. Nous recevons aujourd’hui Ivan Béraud, secrétaire général du syndicat Betor Pub.
Bonsoir.mathieu : Pourquoi les mouvements sociaux dans le secteur informatique se multiplient comme ça ?
Avec la fin de la baisse de l’emploi, les salariés ont peut-être plus de revendications ? Par ailleurs, nous sortons d’une période longue de blocage des salaires.Max : Que pensez-vous de la délocalisation du service Hosting de Lycos ?
Je ne connais pas particulièrement les données sur le dossier Lycos. On peux penser que les activités de type Lycos (produit) sont particulièrement menacées par des délocalisations possibles.Jean : Quel est le front sur lequel vous êtes en ce moment ?
Salaires, maintenir la réduction temps de travail et un grand chantier ouvert par l’accord de branche de décembre 2004 sur la formation professionnelle.mathieu : A quoi a servi la journée d’action du Betor Pub ?
La journée d’action du 16 mai était centrée sur l’emploi, les 35 heures et les salaires. Globalement, le mouvement a été suffisamment suivi pour que les employeurs restent sur un statu quo en matière de
35 heures. En ce qui concerne l’emploi, nous essayons de mettre en place des procédures de gestion prévisionnelle sur les salaires, cela dépend véritablement du rapport de force entreprise par entreprise.Yvan : Quelles sont les grandes lignes du plan de restructuration ?
La question est imprécise. Renvoie-t-elle à une entreprise de particulier ?delphine : Pensez-vous qu’il y ait un déséquilibre offre/emploi sur le marché du travail des informaticiens ?
En 2005, le marché du travail a l’air équilibré, mais il y a une mutation de la demande : par exemple, il y a probablement moins de développeurs et une montée en charge des analystes, des tests, des techniciens (par exemple, réseau).
Par ailleurs, avec l’Observatoire des métiers, nous devons lancer des études pour passer de l’impression à une véritable mesure des changements.pat : Que peut faire le Betor face à l’ingénierie financière des sociétés visant à détourner les bénéfices d’une société au profit d’une autre ou au détriment des salariés ?
Le Betor en soi ne peut pas faire grand-chose. En revanche, les comités d’entreprise ont les outils de surveillance économique (par exemple, analyse des comptes, droits d’alerte). Nos équipes présentes dans les CE essayent de veiller à
cela.Yvan : Connaissez-vous le taux de chômage pour les informaticiens ?
La réponse est malheureusement non. Nous savons que beaucoup d’informaticiens au chômage et ayant plus de 35 ans quittent la profession pour se reconvertir.Ethop : Au fait, où en est le ‘ contrat de mission ‘ dont parlait le Syntec ? Est-ce la même chose que le ‘ contrat nouvelle embauche ‘ de Dominique de
Villepin ?
Le contrat de mission est parti dans les poubelles de l’histoire (les employeurs ne le réclament plus). En revanche, le contrat ‘ nouvelle embauche ‘ nous inquiète énormément.Jacadi : Aujourd’hui, de quel type d’informaticiens les entreprises ont-elles besoin ?
Analyste, testeur, spécialiste réseau. en revanche, le volume de développeurs risque de décroître (développement des produits, offshore…).Gilles : De quoi sera fait l’avenir des informaticiens français ? Un départ à l’étranger ?
Plus vers le service, vers la proximité du client. Moins vers le développement.extrapola : Peut-on imaginer dans quelques années un important surplus d’informaticiens ?
Non, nous savons qu’il y a un taux de sortie ‘ naturel ‘ de la profession (environ 10 % par an de gens nous quittent pour aller vers d’autres métiers), mais il faut que les informaticiens investissent dans
leur formation. Il y a plein d’argent pour les périodes de professionnalisation : que les publics prioritaires fassent le siège de leur DRH.Antoine : Pourquoi parler de menaces sociales quand les dégâts empirent chaque mois ? Les SSII n’ont plus d’augmentations générales et seul reste le copinage où les notions d’appartenance aux
‘ baronnies ‘ permettent d’avoir de l’espoir. Pour une majorité, c’est une perte de salaire chaque année. N’est-ce pas cela qui contribue à la poussée des ras-le-bol et des manifs ?
Oui, je n’ai pas ton pessimisme. Par contre, le blocage des salaires, les discriminations (hommes/femmes/origine étrangère…) poussent le mécontentement des salariés.Gianni : Comment êtes-vous arrivé à ce poste ?
J’ai été élu de mon comité d’entreprise puis délégué syndical. Ensuite, j’ai travaillé pour mon syndicat au développement des équipes d’entreprise. Et quand mon prédécesseur a eu d’autres fonctions, j’ai été élu par les adhérents.MLorie : Mon service informatique va être incessamment sous peu externalisé. On me demande de rédiger de la documentation qui va sans doute servir à la société externe. Que pouvons-nous faire ?
Prendre contact avec les représentants du personnel de votre entreprise actuelle et de la SSII qui va vous récupérer. Ne vous mettez pas en faute en refusant individuellement de faire votre travail. Sachez que les SSII détestent reprendre
les services informatiques remuants.Kia : Pourquoi ce contrat d’embauche vous inquiète-t-il ? N’est-ce pas une bonne chose pour le consultant/développeur indépendant qui veut s’agrandir ?
Il m’inquiète car il risque d’aboutir au fait que les informaticiens émargeront au chômage en période d’intercontrat. Or, le contrat social du secteur, c’est : ‘ je bosse beaucoup quand je suis en mission ET je
garde mon salaire en intercontrat ‘. La société acceptera-t-elle de payer le chômage des informaticiens au chômage (cf. intermittents du spectacle) ?Yvan : Alors, que préconisez-vous pour lutter contre la délocalisation et les autres menaces sociales ?
Les SSII doivent réfléchir sur les services non délocalisables. Elles doivent mieux travailler leur offre clients (actuellement, on est sur une réponse au coup par coup). Il y a aussi le problème de la qualité (les bugs nous causent
une mauvaise réputation). Il faut aussi travailler sur l’évolution professionnelle de chaque salarié.K7 : Bonjour, Monsieur le secrétaire général. Ma question porte sur la formation. Que pensez-vous des fonds alloués à la formation professionnelle pour les entreprises adhérentes au Syntec ? En tant qu’entreprise de
moins de 10 salariés, nous n’avons droit qu’à 700 euros par an pour l’ensemble des salariés : trouvez-vous cela suffisant ?
Attention, les règles ont changé. Je n’ai pas l’accord sous les yeux mais des dispositifs peuvent être mis en ?”uvre dans les TPE, y compris la prise en charge du salaire du remplaçant du salarié formé (voir l’accord sur
legifrance.gouv.fr).extrapola : Merci pour toutes ces explications mais, concrètement, comment un technicien informatique (dépanneur) et autodidacte ?” comme beaucoup ?” peut-il évoluer ? Quels organismes
contacter ? Vers quoi se diriger quand on a quitté l’école depuis longtemps ?
A mon sens, il faut faire un bilan de compétences, puis probablement aller vers une période de professionnalisation. Cela ne coûtera pas cher à votre employeur puisqu’il touchera 50 ? par heure de formation pour vous
informer : se renseigner auprès du
Fafiec.Kia : C’est peut-être de flexibilité dont a besoin l’informatique française pour rebondir ?
Sauf que le système de SSII en France fait qu’il y a beaucoup de flexibilité puisque les informaticiens vont de projet en projet et ne sont pas ‘ attachés ‘ à une entreprise utilisatrice.jim : Y a-t-il d’autres mouvements prévus dans les prochains mois ?
Je ne lis pas dans le marc de café… Il y aura du mouvement à Capgemini en septembre (reprise des négociations de salaires). Ailleurs, je ne sais pas, cela dépendra de l’actualité locale.K7 : Le Betor Pub fait-il une action spécifique pour que la part des femmes augmentent dans le secteur, à part appeler à manifester samedi prochain pour la Gay Pride 😉 ?
Oui, nous sommes engagés dans le combat contre TOUTES les discriminations. Nous essayons de négocier des accords pour limiter les discriminations : par exemple, sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Nous espérons ouvrir de
telles négociations à Accenture. Chez Thales IS, il y a des dispositions pour que les femmes de retour de congé maternité touchent une augmentation de salaire. Sur la formation, nous avons obtenu que les salariés travaillant à 80 %
acquièrent un droit équivalent à celui des temps plein.Jean : Quel est le salaire moyen d’un informaticien avec cinq ans d’expérience aujourd’hui ?
Bonne question. Cela dépend de ce qu’il fait : à ma louche à goudron personnelle, 2 000 à 3 000 euros selon sa responsabilité hiérarchique.Samir : L’Inde représente-t-elle un danger réel à cinq ans ?
NON, sauf pour ceux qui travaillent sur des produits non spécifiquement français (exemple BO, Lycos).Hoplahop : Y a-t-il une chance aujourd’hui pour un informaticien qui n’est pas issu des grandes écoles d’être embauché ? Les ‘ embaucheurs ‘ ne pensent qu’à ces profils-là !
Oui, mais il est vrai que le recrutement se fait désormais sur les profils d’informaticien. Mais il y a de place pour les universitaires (Miage) et les IUT. en revanche, les formations généralistes même proches (maîtrise de maths, par
exemple) sont en grande difficulté en ce moment.Alex : Pourquoi certaines entreprises dans le secteur de l’informatique licencient-elles alors que d’autres embauchent ? Comment équilibrer ceci ?
C’est bien mon problème de président de l’Observatoire des métiers ! Certaines entreprise licencient car elle sont mal positionnées ; d’autres parce qu’elles n’arrivent pas à faire évoluer leur personnel ; certaines
recrutent parce qu’elles ont plus de clients ; enfin, certaines comme Capgemini licencient sur certains profils (fonctions support) et recrutent sur d’autres (analyste, réseau.).kouyatus : D’où vient ce nom de ‘ Betor Pub ‘ ?
C’est l’histoire. En 1963, ‘ Betor ‘ voulait dire Bureaux d’études techniques et organismes de réalisation. Maintenant, c’est comme ‘ Radar ‘ : on sait ce que c’est, pas ce que cela
veut dire (on peut aussi prendre comme exemple IBM ou Sema). harakiri : Selon vous, y a-t-il des ‘ types ‘ d’informatique (industrielle, scientifique, gestion, système, réseaux, etc.) plus menacés que d’autres ?
Je ne dirais pas des types, mais des fonctions. Par exemple, il y a de moins en moins de traitement ‘ à façon ‘ (sur mesure) et de plus en plus de produits, donc les secteurs les plus
‘ industrialisés ‘ sont les plus menacés. A l’inverse, faire parler des réseaux hétérogènes, c’est compliqué et cela demande de la main d’?”uvre.MarcoLeBo : Bonjour. Selon vous, quelles sont les conditions idéales d’un transfert de personnel dans le cadre d’une externalisation ? Merci.
Il y a un dossier dans DSI qui va sortir sur le sujet. Pour résumer, il faut beaucoup de dialogue social et d’implication des salariés concernés. Il faut espérer que la cause de l’externalisation n’est pas un manque
d’adaptation des salariés aux changements technologiques. En vrai, cela se passe quand même souvent mal (beaucoup de départs dans les trois ans qui suivent).Alex : Vous ne bénéficiez pas du tout de formations (payées pas l’entreprise) pour vous adapter aux nouvelles technologies et ainsi freiner la délocalisation ?
C’est globalement vrai, et c’est pourquoi nous venons de dégager des budgets importants. La mauvaise surprise, c’est qu’à mi-année ils sont sous-utilisés. Il faut que les salariés fassent le siège des employeurs.Antoine : Ne se trompe-t-on pas de question en voulant définir ?” comme le souhaite le patronat ?” une grille des métiers où les gens se sentent déjà prisonniers, alors que le rôle des syndicats, attendus
par les salariés, est la précision d’une grille des salaires à partir d’une convention existante et permettant une évolution positive et une reconnaissance de la femme et de l’homme qui travaillent ?
Sauf que le problème, c’est que nous avons une grille de salaires… Sauf que les métiers n’y sont pas précisés. Nous cherchons donc d’une part à définir quels sont les métiers ?” voir d’ailleurs le référentiel métier disponible
sur http://ivan.beraud.free.fr/formation/animation.htm ?” et d’autre part à faire le lien entre ce référentiel métier et la grille des salaires. Inutile de dire que c’est sur ce dernier point que la difficulté est.abdel455 : Dans le domaine du développement, quel est le secteur d’activité qui recrute le plus ? Et quelle est la technologie la plus recherchée ?
Je n’ai pas la réponse en termes statistiques. On ne sait même pas combien il y a de développeurs Java ou C en France.Alex : Quand pensez-vous pouvoir obtenir des améliorations des conditions de travail des informaticiens ? Après combien de négociations ? Est-ce une priorité ?
Sur les conditions de travail, notre priorité est de travailler sur la question de la mobilité géographique, des déplacements. C’est aussi de maintenir la possibilité pour les salariés de choisir leurs jours de RTT. Sur la branche, il est
très difficile d’avancer sur ces sujets. On a quelques entreprises où cela se gère mieux. Mais au final, il faut que les salariés poussent.Antoine : Ce qui s’entend dans les manifs et dans les couloirs d’entreprise, c’est ‘ assez de compromis ‘. Seuls les salariés participent, alors que les patrons et les directions se servent.
Oui, dans notre secteur, le rapport est malheureusement favorable aux employeurs. Ceci étant dit, pour avancer, il faut être deux et les accords se signent nécessairement avec l’employeur.patbe : Un informaticien indépendant ne pourrait-il pas être considéré comme sans patrie ? C’est-à-dire payer les charges et autres taxes (TVA…) en fonction du pays qui l’emploie ?
Non, ce n’est pas le pays qui l’emploie, sinon c’est un fonctionnaire. Les salaires et taxes payées le sont dans le pays où est réalisée la prestation.Nicoweb23 : Quel futur pour les informaticiens ?
Celui qu’ils s’inventeront collectivement.patbe : Si je bosse en télétravail pour les USA, qui m’emploie ? Où dois-je payer les charges : en France ou aux USA (le contrat de travail est américain) ?
S’il y a un contrat de travail aux USA, c’est le droit américain qui s’applique, plus le droit français s’il est réalisé en France… D’où quelques soucis de double imposition.Merci beaucoup, Monsieur Béraud. Le mot de la fin ?
Au revoir et merci pour vos questions ! En espérant vous retrouver dans les entreprises pour dialoguer ensemble et construire le rapport de force face aux employeurs.
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