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Itanium 2, la puce 64 bits dernier cri d’Intel

Première évolution des microprocesseurs 64 bits d’Intel, Itanium 2 vise les serveurs de haut de gamme, où les architectures 64 bits propres à IBM et Sun l’ont précédé. S’il se distingue par la mise en parallèle des instructions – et non celle des processus -, il lui reste à convaincre les développeurs de l’adopter pour leurs applications.

Depuis un an, le paysage des microprocesseurs 64 bits a changé. Un nouvel acteur, et non des moindres puisqu’il s’agit d’Intel, est entré sur ce marché avec sa puce baptisée Itanium. Ayant collaboré au développement de l’Itanium, HP a finalement décidé d’abandonner sa technologie 64 bits PA-Risc au profit des puces Intel. Compaq a, lui aussi, délaissé ses processeurs Alpha, cédés à Intel en juin 2001, pour se concentrer sur l’architecture Itanium, avant d’être acheté par HP.Comme IBM et Sun Microsystems continuent de faire évoluer leurs processeurs Risc, seules trois architectures processeurs 64 bits s’opposeront sur les serveurs de haut de gamme dans les années à venir. IBM et Sun cantonnant leurs processeurs à leurs propres serveurs, Intel peut donc capter à loisir un large marché. Son premier client sera bien évidemment HP, qui sortira, dès l’année prochaine, des serveurs de très haut de gamme de marque Superdome basés sur Itanium 2. Plus généralement, tous les constructeurs de serveurs Intel devraient proposer des machines Itanium 2.Commencé en 1994, le développement du processeur Itanium a pris beaucoup plus de temps que prévu. C’est seulement en 2001, soit trois ans après la date prévue, que les premières puces ont pu être commercialisées. Mais les ventes n’ont pas décollé, et, bien qu’Intel s’acharne à expliquer qu’il s’agissait d’une puce destinée avant tout au portage d’applications, le géant des semi-conducteurs a subi son premier véritable revers. Au mois de juillet, Intel a donc lancé la première évolution de son microprocesseur, l’Itanium 2 (nom de code MacKinley), destiné cette fois-ci aux environnements informatiques de production.Afin de répondre aux fortes exigences de performances et de montée en charge de ce marché, Intel a doté son processeur Itanium de mécanismes de parallélisation des instructions, là où d’autres, comme IBM, optent pour la parallélisation des processus.

Epic, nouveau jeu d’instructions

Pour cela, le fondeur, en collaboration avec HP, a développé un tout nouveau jeu d’instructions, Epic (Explicitly parallel instruction computing), qui se charge d’exécuter en parallèle six instructions par cycle d’horloge. Avec Epic, le parallélisme est explicite : c’est au compilateur de chercher le parallélisme dans le code afin d’indiquer au processeur quelles sont les tâches à exécuter en parallèle. Cette approche diffère des architectures traditionnelles où, normalement, le compilateur se charge d’envoyer un code séquentiel au processeur, qui se charge lui-même de paralléliser l’exécution des instructions.

Des calculs effectués par anticipation

Avec l’Itanium, l’intelligence réside avant tout dans le compilateur, c’est ce qui lui vaut souvent d’être qualifié de processeur Risc, pour Repose intégralement sur le compilateur au lieu de Reduced instruction set computer. Un choix qui, selon Jamel Tayeb, responsable technique chez Intel France, impliquerait que les “développeurs de compilateurs aient à reconcevoir leurs techniques d’optimisation”, mais qui ne changerait rien pour les développeurs d’applications, à condition toutefois “qu’ils n’aient pas eu de mauvaises pratiques dans les environnements 32 bits”. Pour certains concurrents d’Intel, cependant, demander au compilateur de prédire la meilleure organisation des instructions revient à savoir quel type d’application sera exécuté ; c’est très difficile aussi bien en gestion qu’avec des environnements Java.Un compilateur Epic transforme le code séquentiel en paquets de 128 bits parallélisés, soit un groupe de trois instructions judicieusement assemblées afin d’obtenir le meilleur parallélisme possible (3 instructions de 41 bits et un indicateur de parallélisme de 5 bits). C’est en cela que l’on parle de processeur VLIW (Very long instruction word) dont le principe est d’utiliser des mots d’instruction longs qui sont, en réalité, constitués de plusieurs instructions de taille identique. Le processeur Itanium peut exécuter simultanément deux groupes d’instructions par cycle d’horloge. Ces groupes sont envoyés à une unité de dispersion qui se charge d’aiguiller les instructions vers les unités d’exécution appropriées en fonction de leur disponibilité. Une autre force d’Itanium est sa capacité de mise à profit des unités d’exécution non utilisées pour faire des calculs par anticipation sur les données, ou, plus exactement, de la spéculation et de la prédication.

Séduire les entreprises

Si ces caractéristiques générales s’appliquent aussi bien à l’Itanium qu’à l’Itanium 2, Intel a toutefois effectué de nombreuses modifications sur l’architecture de son nouveau processeur. L’Itanium 2 compte davantage d’unités d’exécution que son prédécesseur : 50 % en plus pour les unités de calcul sur les entiers, une unité d’exécution dédiée à la multiplication et l’addition en parallèle supplémentaire, et deux fois plus de registres de lecture et d’écriture, qui peuvent désormais fonctionner simultanément afin d’améliorer l’accès à la mémoire. Si l’Itanium 2 compte autant de groupes de trois instructions que l’Itanium, à savoir onze, les combinaisons d’exécution en parallèle de ces groupes sont bien plus nombreuses. Avec la première mouture, seules 26 combinaisons de groupes d’instructions exécutables en parallèle étaient autorisées, l’Itanium 2 en compte désormais 76 sur un total de 100 (les 24 restantes n’ont pas été jugées pertinentes).Cela constitue une avancée majeure en termes de parallélisme et de performances, mais impose, pour en profiter pleinement, de recompiler un code déjà optimisé pour l’Itanium.Autre nouveauté de l’Itanium 2 : l’adressage de mémoire physique passe de 44 à 50 bits ; l’adressage de mémoire virtuelle, de 50 à 64 bits ; et la mémoire paginée, de 256 Mo à 4 Go, ce qui conviendra aux bases de données très volumineuses. Les temps de latence des caches ont également été réduits, et le cache de niveau 3 de 1,5 ou 3 Mo est intégré dans la puce, et non plus déporté sur la carte processeur comme précédemment. Ainsi, la bande passante entre les niveaux de cache passe de 11,7 à 32 Gbit/s.Désormais performants, les processeurs 64 bits d’Intel doivent encore séduire les entreprises, qui, pour beaucoup, ont déjà opté pour une architecture 64 bits éprouvée. Le succès d’Intel est intimement lié aux systèmes d’exploitation et aux applications sachant tirer parti des processeurs Itanium, et, il faut l’avouer, ils se font rares. Si Linux et HP-UX sont les plus avancés en la matière, Windows.NET Server 64 bits n’est pas attendu avant l’année prochaine, et les portages d’applications ne semblent pas se bousculer.

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Nicolas Belot