Dans un monde des télécoms où tous les clignotants sont au vert, il n’y pas que des succès. Le cas Iridium, le premier projet de téléphonie mobile via satellite, lancé en 1987 par Motorola, en est l’illustration. Faute de repreneur, le consortium, emmené par Motorola, s’est déclaré en faillite le 17 mars dernier. L’aventure aura coûté la bagatelle de 5 à 7 milliards de dollars et prendra fin avec la spectaculaire désintégration dans l’atmosphère des 66 satellites de la constellation. Un feu d’artifice qui sera facturé 50 millions de dollars.
Pour en arriver là, Iridium a commis nombre d’erreurs. Les retards répétés de lancement ont fait qu’“Iridium a été conçu à une époque où l’on ne pensait pas que le GSM aurait un tel succès”, explique Franck Pujol, directeur d’études à l’Idate. Le développement du GSM et la multiplication des accords d’itinérance entre opérateurs en ont fait un sérieux concurrent. Iridium a aussi payé le fait d’être trop orienté voix : le débit de transmission n’était en effet que de 2,4 Kbit/s. Du point de vue commercial, les téléphones ont d’abord été vendus à des prix exorbitants (23 000 F ht) tandis que la minute téléphonique avoisinait les 50 francs.
Le marché a répondu fra”chement : 20 000 abonnés dans le monde fin 1999, au lieu des 600 000 escomptés. Et ce malgré des baisses drastiques du prix des terminaux (à 9 500 F) et des communications (divisé par deux environ).
Globalstar moins global
La mort d’Iridium n’est évidemment pas de bon augure pour ses concurrents ICO et Globalstar. Ce dernier commercialise ses services (de la voix pour l’instant) depuis fin 1999. Les tarifs téléphoniques sont proches de ceux d’Iridium (de 10 à 24 F ht) et les terminaux à peine moins encombrants et moins chers (environ 8 700 F ht). Mais Globalstar a vu moins grand et a fait le choix de mettre en orbite moins de satellites qu’Iridium. De fait, il offre une couverture plus limitée : la réception au-dessus de la mer est limitée (excepté dans l’Atlantique Nord) et les pôles ne sont pas couverts, comme une majorité de l’Afrique. Ce problème fera probablement tiquer les grandes entreprises à la recherche d’une couverture globale. Quant au dernier venu, ICO, il a, lui aussi, frôlé la faillite récemment. Son tour de table a été bouclé grâce au soutien du milliardaire Craig McCaw. Il prévoit de commercialiser ses services en 2001. Mais pour ces deux rescapés, la même question se pose : les clients pointeront-ils aux abonnés présents ? Les 3 millions de clients évoqués pour l’an 2000 semblent désormais chimériques. Inmarsat, système de téléphonie et transmission de données par satellite géostationnaire, qui s’affiche aujourd’hui comme une solution alter- native à Iridium, n’enregistrerait que 200 000 clients…. après 21ans d’activité. Si la rentabilité de cette première génération de constellation de satellites est plus qu’incertaine, que dire, alors, de la seconde : les SkyBridge (Alcatel et une dizaine de partenaires) et les Teledesic (Craig McCaw et une demi-douzaine de partenaires), estimés respectivement à plus de 6 et 10 milliards de dollars. Eux se veulent l’Internet large bande du ciel. Ils ne visent plus les mobiles, mais des utilisateurs fixes ayant besoin d’un accès large bande, que les réseaux terrestres ne peuvent leur offrir parce qu’ils se trouvent dans des zones isolées ou en attendant que les réseaux optiques puissent les attein- dre, ou encore parce qu’il s’agit de chantiers mobiles.
Au-delà de ces caractéristiques communes, les deux systèmes sont assez différents. SkyBridge a joué la carte de l’économie et de la simplicité : 80 satellites au lieu de 288 (au départ plus de 800). En outre, SkyBridge se veut une ” boucle locale ” : le trafic reçu par un satellite est immédiatement redescendu vers le réseau terrestre, alors que Teledesic peut faire de la commutation intersatellite, et ainsi court-circuiter les réseaux terrestres. Ce qui n’empêche pas les deux groupes de déclarer qu’ils ne veulent surtout pas concurrencer les opérateurs. Pour preuve, ce sont ces derniers qui distribueront leurs services.
Bien que visant un marché différent, celui du multimédia et plus celui des mobiles, nul doute que les promoteurs de SkyBridge (*) et de Teledesic vont tirer la leçon de l’échec d’Iridium
(*) Alcatel est d’ailleurs bien placé pour faire l’apprentissage de ce marché puisqu’il est la fois dans Globalstar et dans SkyBridge.
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