La pénurie de semi-conducteurs a montré la dépendance du monde entier aux usines asiatiques, notamment à celles de TSMC (et dans une moindre mesure, à celles de Samsung). Les seules capables de graver en utilisant les procédés EUV qui permettent de dépasser la barrière des 7 nm. Les seules ? Plus pour longtemps ! Lors d’un symposium de « l’Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens » (IEEE, en charge de nombreux standards) au sujet de la gravure des semi-conducteurs, Intel a dévoilé des détails de son procédé en cours d’industrialisation appelé Intel 4 – le 4 faisant référence aux nanomètres de TSMC – et qui arrivera dès 2023.
Parmi ces détails, deux chiffres très importants pour prendre la mesure des progrès qu’Intel promet entre son procédé actuel, Intel 7, et l’Intel 4. Le premier est celui de la consommation énergétique, qu’Intel annonce comme 40% inférieure à fréquence égale – de quoi faire des puces vraiment moins consommatrices.
À l’inverse, quand on recherche la puissance, Intel 4 (ou I4) permet d’augmenter les fréquences de 21,5% à consommation égale. Dans les faits, Intel (ou ses clients) pourront jouer avec ces deux bénéfices selon leurs besoins, et créer des puces à la fois plus puissantes et moins énergivores.
Meteor Lake : Intel avance ses technologies, mais TSMC est toujours devant
Prévu pour courant 2023, le SoC Meteor Lake sera la première puce commerciale à profiter de la gravure Intel 4. Plus qu’un simple CPU, il s’agira d’une puce tout-en-un intégrant non seulement un CPU, mais aussi une puce graphique (GPU). Des éléments conçus séparément avec des nodes différents et assemblés comme des Lego grâce à la technologie Foveros d’Intel. Tout comme AMD qui joue avec ses chiplets, Intel dispose de son propre arsenal technologique pour continuer de faire avancer la finesse de gravure et les performances, sans (trop) faire exploser les prix.
La brique CPU de ce futur processeur sera donc le premier circuit à être gravé en I4. Un node ainsi nommé pour faciliter la comparaison avec ceux de TSMC – ici, le node N4 donc, dont les parties les plus fines des circuits sont gravées en 4 nm.
D’ailleurs, les slides d’Intel ne trompent pas : c’est à partir de la génération “Intel Next”, après le node 18A, qu’Intel souhaite avoir récupéré son « leadership indiscutable ». Pour l’heure, l’Américain sait pertinemment que le géant taïwanais, qui le sert aussi bien qu’Apple, Qualcomm et les autres, reste devant.
Intel entre (vraiment) dans l’ère EUV
La réduction actuelle de la taille des circuits est aujourd’hui le fait de l’emploi d’une nouvelle technologie appelée EUV pour « ultraviolets extrêmes », en référence à la longueur d’onde employée (13,5 nm contre 193 nm pour la gravure DUV). Et c’est avec I4 qu’Intel l’emploie pour la première fois. Ce qui est assez paradoxal
Car Intel rattrape ici un retard industriel, et non un retard technologique. Depuis plus de deux décennies, l’Américain est un des plus gros contributeurs au développement de cette technologie. Intel investissant autant en recherche & développement (par le biais de thèses, de recherche interne, etc.) qu’en partenariat autour de l’EUV. Il est ainsi, avec TSMC, le premier partenaire du constructeur de ces machines, le néerlandais ASML. Si TSMC est le premier à avoir commandé les premiers scanners (steppers) en masse, devant Samsung, c’est bien Intel qui va recevoir les scanners de dernière génération dits « à grande ouverture » (High-NA).
C’est moins un manque de maîtrise qu’une cascade de mauvais choix qui ont retardé Intel – déploiement de plusieurs technologies à la fois pour le 10 nm, volonté de pousser la gravure DUV jusqu’à la fin, peur des investissements massifs que représente l’EUV voire, selon certains analystes, volonté d’Intel de se séparer de ses outils industriels. Mais ça, c’était avant Pat Gelsinger, nouveau patron du géant américain.
Déploiement technologique pragmatique et chronométré
Heureusement pour Intel, Pat Gelsinger a, contrairement aux demandes de certains financiers de Wall Street, fait tout l’inverse. Fils de la maison Intel, père du 486, l’ingénieur est revenu chez Intel en 2021, et a investi massivement dans de nouvelles usines et de nouveaux sites – des fabs aux USA et en Allemagne, le centre européen de design en France. Mais il a aussi revu intégralement le calendrier des déploiements technologiques.
Fini les nodes complexes qui introduisent dix nouveautés à la fois et qui prennent trois à cinq ans à développer comme ce fut le cas du 10 nm. La feuille de route technologique du nouvel Intel qui s’étend de 2021 à 2025 compte cinq nodes (en quatre ans), chacun introduisant une à deux nouveautés majeures au maximum. Fini les sauts quantiques, mais des sauts de puce réalisés avec une cadence accélérée. Et des délais respectés !
Dans cette feuille de route, le node Intel 7 (qui découle du 10 nm) était le point zéro. Intel 4 est donc la première vraie brique de « l’ère Gelsinger » avant l’entrée dans « l’ère Angström » en 2025, l’année où Intel veut reprendre sa couronne de roi de la gravure. Rendez-vous en 2023 pour évaluer si Intel, avec son node I4, est bel et bien revenu dans la course.
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Source : Tom's Hardware US