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Il y a 20 ans, l’iMac sauvait Apple et signait le retour de Steve Jobs

1997-98 : alors qu’Apple est au bord de la banqueroute, Steve Jobs revient aux affaires. Il réorganise les troupes, relance la communication de l’entreprise et initie la conception de nouveaux produits. L’iMac est né.

L’informatique personnelle n’est plus toute jeune. Certains la font naître avec le Macintosh, d’autres avant, d’autres encore clament qu’elle est morte avec l’avènement des smartphones, ordinateurs invisibles et omniprésents. Qu’elle soit morte ou ait juste évolué, son histoire comporte quelques grandes dates incontournables. Celle de l’annonce du premier iMac en est une. Bien que commercialisé pour la première fois en août 1998, l’iMac G3 a été présenté par Steve Jobs le 6 mai 1998. Si la date n’est pas symbolique, l’ordinateur l’est.

iMac 1998 Bondi blue.jpg

Un retour, une rencontre

En 1996, NeXT, la structure que Steve Jobs a créée à son éviction d’Apple, est rachetée par la société de Cupertino. L’année suivante, les deux entités fusionnent.

Très rapidement, en juillet 1997, Steve Jobs est nommé PDG par interim d’Apple, après le départ forcé de Gil Amelio. L’année 1997 sera une année intensive de changements et de remises en question. Le co-fondateur d’Apple va licencier près de trois mille personnes, réussir à convaincre le légendaire publicitaire Lee Clow de revenir travailler pour sa société et, enfin, va rencontrer un jeune designer de talent, à deux doigts de donner sa démission : Jonathan Ive.

Entré chez Apple en 1992, devenu chef du service design en 1996, le jeune Britannique n’était pas heureux dans son travail : « on n’accordait aucune attention aux produits, parce que tout ce qui comptait c’était d’augmenter les marges. », se souvenait Jonathan Ive, dans une interview à Walter Isaacson. Avec Steve Jobs, la donne est complètement différente. Le design est roi et au service d’un produit.

Ce changement de politique ne se fait pas dans un cadre serein. Il y a urgence. Apple va mal, très mal. Au cours de l’année 1997, la société a perdu plus d’un milliard de dollars et est à deux doigts de la banqueroute. « Nous étions à trois mois de la faillite », expliquait Steve Jobs à son biographe.

Avec l’iMac, Steve Jobs parle non seulement d’un produit unique et nouveau, dont « l’arrière est plus joli que l’avant des autres », mais aussi d’un moyen de stabiliser les résultats de son entreprise.

Pour Apple, l’iMac est autant une bouée de sauvetage que le premier fruit de la rencontre entre Steve Jobs et Jonathan Ive. C’est aussi la matérialisation parfaite de la campagne de Lee Clow Think Different, qui marqua le retour sur le devant de la scène de la société californienne. Pour Apple, les astres s’alignaient à nouveau. L’heure de la refondation et de la reconquête avait sonné.

https://www.youtube.com/watch?v=oxwmF0OJ0vg

L’iMac : l’anti-PC

Repensez aux PC entraperçus pendant votre enfance. Beiges, rectangulaires, empêtrés de fils, lestés d’antivirus… L’iMac était aux antipodes de cette réalité. Certes, son OS, Mac OS 8 puis 9 (et enfin 10) n’ont pas forcément laissé que des bons souvenirs, mais ce tout-en-un, premier de son genre pour le grand public, a marqué les esprits.

Coloré, translucide, ludique, facile à transporter, increvable, équipé d’un écran cathodique plutôt grand pour l’époque, avec ses 15 pouces (dont seulement 13,8 pouces sont vraiment utilisables), il abandonnait le lecteur de disquette au profit du lecteur de CD-Rom et proposait deux ports USB !

Un équipement qui a de quoi faire sourire aujourd’hui, mais qui représentait clairement un avant-goût du futur à l’époque. Une période où, déjà, les souris d’Apple n’étaient pas forcément la meilleure partie de l’expérience proposée ! 

https://www.youtube.com/watch?v=hIrs_AGBIww

L’iMac était aussi un outil de choix pour se connecter à Internet. Pensez donc, il embarquait à la fois un modem 33,6K puis 56K et un port Ethernet. Pour beaucoup, ce fut la première fois que leur appartement semblait moins petit sans gagner le moindre mètre carré. L’arrivée d’Internet, malgré la lenteur des connexions de l’époque, a tout bouleversé… et l’iMac était une de ces machines pensées avant tout pour assurer l’accès au réseau des réseaux.

Originellement, il devait même ne pas intégrer de disque dur, pour coller à l’esprit des « ordinateurs de réseau » que vantait Larry Ellison, patron d’Oracle, à l’époque. Le « i » de iMac est d’ailleurs emprunté à celui d’Internet, comme le confirmait Ken Segall, publicitaire de talent à l’origine du nom de ce Mac, qui a travaillé avec Apple pendant longtemps.

Quoi qu’il en soit, les équipes d’Apple réussirent à adapter les entrailles des machines professionnelles, les Power Mac G3, à ce boîtier en plastique transparent dont on voyait tous les composants, pour en faire un tout-en-un puissant pour l’époque. Il embarquait tout de même un Power PC G3 cadencé à 233 MHz. Le tout pour 1299 dollars.

Des tonnes de couleurs et d’itérations

Face à un succès indéniable, de 1998 à 2001, Apple va faire évoluer son iMac en ajoutant des couleurs, autre que le « bleu Bondi », des composants plus puissants au fil de révisions (Rev. C, Rev. D) et des mises à jour majeures.

Le lecteur de CD originel va aussi être remplacé par un modèle mange-disque et le disque dur grossir pour dépasser les 4 Go originels. La bonne nouvelle, c’est que les différentes itérations de l’iMac « bulle » vont voir leur prix diminuer progressivement, à quelques exceptions près.

Enfin, après un long combat, en janvier 2002, le tube cathodique rend les armes et est remplacé par une dalle LCD. Notons toutefois que le design de l’iMac originel perdurera quelques années encore, grâce aux quatre itérations d’eMac, des machines pensées pour le monde de l’éducation.

Quoi qu’il en soit, pour fêter ce changement, les équipes de Jonathan Ive passent au blanc, revoient le design et proposent un écran plat de 15 pouces porté par un bras articulé, relié à une base demi-sphérique. C’est le fameux modèle tournesol.

Il embarque un Power PC G4 et continue de muscler son offre en connectique réseau en proposant un modem 56K, une prise Ethernet et un module Wi-Fi 802.11b, en option. Il introduit également le graveur de CD et DVD Super Drive, ce qui était un sacré argument commercial à une époque où télécharger une image ISO pouvait encore prendre plusieurs heures.

Vendu à partir de 1299 dollars, l’iMac « tournesol » ne vivra que deux ans. Mais avant de disparaître, il connaîtra quelques mises à jour, notamment en proposant des écrans plus grands de 17 et 20 pouces.

La tête au carré

En août 2004, l’iMac passe au processeur Power PC G5 et pour accueillir cette puce qui avait besoin d’air, Apple a repensé le design de son tout-en-un. Le blanc domine encore, mais le boîtier est cette fois-ci parallélépipédique sur un pied en aluminium et rappelle celui de la gamme Cinema Display.

Les prémices du design actuel, en quelque sorte. La dalle LCD était déclinée en deux tailles d’écran, 17 et 20 pouces. Il faudra attendre octobre 2005 pour voir arriver le modèle avec une caméra iSight intégrée, l’ancêtre des caméras FaceTime.

Apple a d’autres ambitions pour cette machine, il veut en faire une sorte de téléviseur ou en tout cas de centre multimédia. En octobre 2005, un nouvel iMac est présenté et il s’accompagne d’une petite télécommande minimaliste et infrarouge qu’on peut ranger en l’aimantant sur le côté de l’appareil. Côté interface, les développeurs d’Apple ont mis au point Front Row, qui centralise les contenus vidéos.

L’écran de cet iMac grandira jusqu’à atteindre 20 et 24 pouces et va également embarquer dans son boîtier les processeurs Intel dès janvier 2006. Trois iMac vont être lancés au cours de cette année-là.

Alu-cination

La rupture interviendra en août 2007, avec l’arrivée des premiers iMac au boîtier en aluminium. Les tailles d’écran restent inchangés avec un maximum à 24 pouces mais l’écran commence à occuper davantage d’espace en façade.

Ce design connaîtra une évolution marquante avec une conception unibody à partir d’octobre 2009. Plus fin, l’iMac sera également plus grand et adoptera les diagonales d’écran qu’on rencontre toujours aujourd’hui, à savoir 21,5 et 27 pouces. C’est avec lui que les disques SSD font également leur premier pas dans les tout-en-un d’Apple.

Trois ans plus tard, en 2012, les équipes de Tim Cook introduiront l’iMac « slim », avec une forme en goutte d’eau, qui rappelle un peu celle des MacBook Air… et qui est toujours d’actualité. Les bords sont très peu épais, puis l’arrière du boîtier s’élargit pour loger l’ensemble des composants. En octobre 2014, l’iMac se pare d’une dalle Retina 5K.

La dernière révolution de l’iMac intervient en 2017, avec l’annonce puis la commercialisation de l’iMac Pro. Une machine au boîtier gris sidéral, dont la configuration n’a rien à envier à des stations de travail professionnelles encombrantes. C’est en quelque sorte un nouveau départ pour le tout en un, la validation d’un design poussé à ses limites et la première distinction flagrante entre les modèles pro et grand public.

Hier, pour l’anniversaire de l’annonce, Tim Cook tweetait sobrement :  « Il y a vingt ans aujourd’hui, Steve introduisait l’iMac, lançant ainsi Apple sur une nouvelle trajectoire et changeant pour toujours la façon dont les gens perçoivent les ordinateurs ». Ce n’est en effet pas tous les jours qu’une seule machine marque les retours tonitruants d’une société, de son fondateur et du design sur le devant de la scène. Le tout en couleur.

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Pierre FONTAINE