Rien n’arrête le géant de l’informatique. Même en période de ralentissement de l’économie. Jusqu’où ira IBM ? En une semaine et demie, Big Blue a procédé à deux acquisitions majeures. D’abord, celle des activités conseil de PricewaterhouseCoopers, puis celle de Matra Datavision, la filiale informatique du groupe européen de l’aéronautique EADS, pour renforcer son pôle de services et solutions PLM ?” Product Lifecycle Management, ou gestion du cycle de vie des produits. Ces deux branches seront intégrées dans la nouvelle entité d’IBM, baptisée Business Consulting Services, elle-même devenant partie intégrante d’IBM Global Services, qui a réalisé l’an dernier près de 40 % du chiffre d’affaires total du groupe.“Ces acquisitions sont stratégiques pour IBM, et l’activité PLM est le quatrième pilier de sa stratégie e-business dans l’industrie, après la gestion de la relation client et celle de la chaîne logistique. Nous venons de racheter EADS Matra Datavision, à l’exception de sa filiale Open Cascade spécialisée dans l’open source, qui ne nous intéressait pas. L’agrément est acquis, et l’opération d’acquisition est soumise aux autorités réglementaires de la COB”, explique Cosme de Moucheron, vice-président des opérations à IBM Europe. Pour ajouter que tout ce qui touche à l’optimisation du système d’information et de la productivité de l’entreprise est un investissement nécessaire pour les industriels. Même dans une conjoncture défavorable. “Les progiciels de gestion intégrés ont permis aux entreprises de réduire leurs coûts. Les solutions PLM constituent pour elles, en quelque sorte, un nouvel outil stratégique pour pouvoir se différencier sur leur marché concurrentiel. Leur approche se fonde alors sur la valeur ajoutée, et non plus sur la réduction des coûts. Elles n’hésiteront pas à investir dans ce type de solutions. Même avec la baisse actuelle des dépenses informatiques”, ajoute Cosme de Moucheron.
“Un acteur de moins en concurrence “
EADS Matra Datavision, fleuron français de la CAO, passe donc sous pavillon américain. L’éditeur d’Euclid a réorienté ses activités vers les services informatiques en début 1999 pour laisser place libre à Dassault Systèmes, éditeur de Catia, qui reprenait sous son aile les fonctions et les clients d’Euclid.Aujourd’hui, ce recentrage vers les services est largement opéré autour des solutions Catia, Enovia, Smarteam et Delmia de Dassault Systèmes (voir 01 Informatique n?’ 1694 page 35). Et c’est IBM qui en recueille les fruits. Marc Hittinger, président du Groupe francophone des utilisateurs de Catia, s’exprime au sujet du rachat : “Il renforce les capacités d’IBM en termes d’installation de produits ?” en particulier dans le domaine de l’usine numérique. Mais, pour les industriels, cela fera un acteur de moins à mettre en concurrence.”IBM, dont la division PLM est récente ?” sa création date du début 2000 ?”, va ainsi renforcer ses équipes européennes avec les quelque neuf cents personnes d’EADS Matra Datavision, dont quatre cent cinquante en France. Cela donnera au total, en France, plus d’un millier de spécialistes PLM, allant du consultant spécialiste de l’industrie aux développeurs d’applications. Son portefeuille de clients en bénéficiera également.
Une croissance à deux chiffres
Selon le cabinet Cimdata, IBM devancerait déjà EDS et PTC en termes de revenus tirés des services et des logiciels PLM entre 1999 et 2001. Pour IDC, le marché mondial des services associés au PLM serait doté d’un potentiel non négligeable, estimé en 2001 à près de 1,9 milliard de dollars. Pour IBM, près de 40 % de ces revenus concerneraient le seul marché européen. Selon lui, le segment de marché des services PLM est l’un des rares à afficher une croissance à deux chiffres ?” environ 15 % en 2002 ?” et probablement autour de 20 % dans les quatre ans à venir. Ce n’est pas le cas dans certains secteurs d’activités de services, comme l’intégration de systèmes, en baisse depuis près de deux ans. “Le marché des services autour du PLM devrait dépasser en 2005 celui des PGI. Quant à notre chiffre d’affaires dans les services, il deviendra prépondérant ?” il représente environ 40 % du chiffre d’affaires total du groupe. Même si, pour l’instant, les services PLM vont contribuer à ce taux dans des proportions encore modestes”, précise Cosme de Moucheron.Pour la société rachetée, l’appartenance à un groupe informatique ?” et, en outre, au premier d’entre eux ?” est plutôt une bonne nouvelle. Reste à savoir comment se rétabliront les équilibres délicats entre les trois partenaires autour du PLM ?” Dassault Systèmes, l’éditeur français de Catia, EADS Matra Datavision, prestataire de support et de services, et IBM, distributeur privilégié ?”, puisqu’ils ne seront plus que deux. L’éditeur français déclare que cette opération “ne change rien à ses relations avec IBM”. A condition que l’appétit de Big Blue s’arrête là.
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