Connexion/Fin ! En cédant son site iBazar à son concurrent américain eBay, Pierre-François Grimaldi a définitivement mis un terme à une aventure commencée quinze ans auparavant. Cloîtré, une jambe cassée, dans une morne chambre d’hôpital, ce Corse découvre un étrange objet ramené par sa mère d’une agence France Télécom : le Minitel.Fort de son expérience dans la distribution informatique et la gestion d’entreprise, il s’exile à Paris, en 1987. Il y rencontre les galères que subiront les patrons de start-up dix ans plus tard : un petit bureau dans un appartement partagé. C’est pourtant la ruée vers l’or. En phase de démarrage en France, le Minitel a alors l’avantage de rémunérer confortablement les éditeurs de services, et en particulier sa société Telestore. Un bandit manchot toujours gagnant, en quelque sorte.” En remplissant un seul formulaire, on pouvait faire passer nos services d’un tarif de 0,98 franc la minute à 1,27 franc. Et le trafic était toujours aussi important, c’est incroyable, en rigole-t-il encore. En dix minutes, vous augmentiez votre chiffre d’affaires de 30 %. C’est ça qui nous a permis de prendre des risques, car lorsque vous façonnez un business, vous faites toujours des erreurs. Et le 3615 nous donnait un bon matelas financier. “
Coup sur coup sur le web
Lorsqu’il découvre internet, en 1995, l’homme se pique au jeu. Pourtant, si Pierre-François Grimaldi aime les entreprises profitables, les pers-pectives de rentabilité du réseau sont bien incertaines. Il n’en cherche pas moins à s’insérer dans le milieu internet de l’époque, peuplé de programmeurs universitaires.” Internet était alors un produit culturel, et pas un produit de supermarché comme aujourd’hui “, rappelle-t-il. Première opération d’envergure, sa tentative de rachat de l’hébergeur de pages personnelles Mygale, fondé par Frédéric Ciréra, alors étudiant. Pour 700 000 francs, Grimaldi croit conclure l’affaire. Au point de s’offrir la marque. Mais au dernier moment, Ciréra se rebiffe pour choisir, plus tard, de s’allier avec Michel Meyer, actuel patron de Multimania. Seulement Pierre-François Grimaldi est propriétaire de la marque Mygale. Il force donc Michel Meyer à rebaptiser Mygale en Multimania. Un joli coup, qu’il reproduit en achetant le nom eBay.fr, préalablement au débarquement français du géant américain des enchères. À son arrivée en France, eBay est contraint de se présenter à l’adresse eBayfrance.com !La société de Pierre-François Grimaldi, Telestore, enchaîne les lancements : Chez.com, Ibourse, iBazar, France Mail. “Il nous fallait faire un choix stratégique : soit développer tous nos services sur le marché franco-français, soit n’en choisir qu’un et aller à l’international.”Il retiendra la deuxième solution, avec iBazar. Quelques jours après la vente du site à eBay, le 22 février, Pierre-François Grimaldi a le sentiment de s’en être sorti la tête haute. Et de lancer : “Des sociétés tout-internet, il n’en restera pas beaucoup. Lorsque la spéculation financière prend le pas sur le côté entrepreneurial, il y a malaise. Aujourd’hui, je suis déçu parce que j’y ai cru.”Déçu de s’être laissé emporter par la spirale d’un iBazar valorisé plus de 3 milliards de francs au sommet de sa gloire. Essoré par la machine internet, l’entrepreneur préférerait aujourd’hui “s’occuper d’une entreprise traditionnelle et de la faire progresser grâce aux nouvelles technologies “. Celui qui se cherchait une vie après le Minitel, envisage désormais l’après-internet.
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