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Grosse déprime

Je viens de faire une découverte, devant laquelle il n’est même plus question d’être de mauvaise humeur. On ne peut que baisser les bras, fataliste. En…

Je viens de faire une découverte, devant laquelle il n’est même plus question d’être de mauvaise humeur. On ne peut que baisser les bras, fataliste. En relisant Voltaire, notamment son ineffable Micromégas, je viens de réaliser que l’homme ne poursuit qu’un but dans la vie : l’impossible résolution d’une équation à quatre inconnues. L’argent, les idées, l’amour, le temps. Quoi d’autre peut nous intéresser, nous les humbles, les sans-gloire ? Essayer de gagner sa vie en défendant quelques principes, tout en cherchant le bonheur avec un peu de recul. Eh bien, sachez-le, c’est foutu, vous n’y arriverez pas. Vous êtes aspiré dans une spirale infernale : le monde de l’argent n’a pas d’idées, le monde des idées n’a pas d’amour, le monde de l’amour n’a pas de temps et le monde du temps n’a pas d’argent. Si vous ne pensez qu’au pognon, il faudra avancer sans se creuser la tête ; si vous vous mettez à trop réfléchir, vous finirez par oublier votre c?”ur ; si vous cédez à l’amour, vous manquerez toujours de temps et si vous voulez vivre en moine, vous serez vite obligé de faire l’aumône. Alors comment me motiver sur ce qui faisait le sel de ma chronique: les mesquineries humaines des relations au travail, les aveuglements technocratiques des mammouths financiers, l’incroyable vacuité des grands stratèges de la mondialisation, les mirages ébouriffants de la high-tech marketisée ? Non, plus rien ne m’inspire, tout n’est que vanité des vanités, poussière de la poussière, à l’image de Jospin et Chirac, soldats sans âme d’un combat sans enjeux. Et, pour compléter ce tableau noir, Amélie n’a pas eu d’Oscars ! Cest décidé, je me débarrasse de mes stock-options et pars faire le tour du monde. Pour relater mes exploits, je signe un contrat avec TF1 et Robert Laffont. Bon, voyons, il me faudra un grand bateau en carbone dessiné par Philippe Starck, avec des voiles en kevlar sur enrouleur électrique ; il me faudra aussi un GPS, un radar, un PC portable dernier cri, un téléphone satellite… La vie est simple, non ?

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La rédaction