Le futur service de jeu en streaming de Google a désormais un nom. Annoncé hier, Stadia sera lancé en 2019. Si de nombreuses questions majeures restent en suspens, comme le modèle économique (abonnement ? Prix ?) ou le catalogue de jeux disponibles au lancement, on sait cependant qui est aux commandes côté matériel : AMD. On devrait même dire « AMD forcément » tant il apparaît, au regard de l’état actuel de l’industrie, qu’il ne pouvait en être autrement.
AMD, l’évidence
Pour la partie matérielle de sa solution, Google pouvait soit partir de zéro, soit trouver un partenaire. Le premier choix semble difficile : même les champions des consoles se font aider ! Dans le monde des jeux vidéo 3D hautes performances, il n’y a que deux entreprises qui comptent : Nvidia et AMD. À côté, Intel est en train de monter son équipe graphique (en débauchant chez AMD) et Imagination Technologies (qui travaillait sur les puces Apple Axx) ainsi que Qualcomm n’offrent pas le même niveau de puissance puisqu’ils sont spécialisés dans des puces mobiles.
À vrai dire, entre Nvidia et AMD, on devrait presque dire qu’il n’y a pas de choix. D’un côté, Nvidia n’a plus de partenariat hautes performances en cours – il ne motorise plus que la Switch –, ne produit pas de puces x86 (il n’a pas de licence) et dispose de son propre service de jeux en streaming, le GeForce Now. De l’autre, AMD semble le partenaire idéal : il est le numéro 2 mondial des processeurs x86 et, outre son savoir-faire en matière de GPU (les Radeon), l’entreprise a aussi une grande connaissance des partenariats technologiques autour de la production de GPU « customs ». Les Gamecube, Wii U, Xbox 360, Xbox One (S, X) ou encore PS4 (et Pro) embarquent toutes une solution graphique développée par AMD pour ses partenaires.
Plus que la puissance absolue – les GPU de Nvidia sont reconnus pour être les plus performants depuis quelques générations – c’est autant le savoir-faire global (CPU, GPU) que les capacités d’écoute d’AMD que Google est venu chercher.
Avare en détails techniques, Google n’a lâché que peu d’informations sur le matériel employé. Mais suffisamment pour faire un portrait-robot du hardware…
Puce graphique : l’odeur du Vega 56
Que nous dit Google sur la partie graphique des serveurs de ses futurs serveurs ? Que le GPU affiche une puissance brute de 10,7 Tflops, intègre 56 unités de calcul et fonctionne avec de la mémoire HBM2. Des spécifications qui ressemblent étrangement à la Radeon Vega 56, une puce lancée en août 2017 à côté de la Radeon Vega 64, plus puissante. Sur le papier, cela semble logique. La puce a suffisamment de bouteille et peut ainsi être jugée assez fiable pour être intégrée dans des serveurs qui tourneront 24h/24h 365 jours par an. Un serveur n’est pas un PC de jeu personnel : la dernière version de la puce la plus puissante n’y a pas sa place si elle tombe plus souvent en panne que la moyenne.
Quant à la structuration matérielle, il y a fort à parier qu’elle se situe entre une Radeon et une Radeon Pro. S’il semble bien s’agir du même GPU que la version grand public, les composants qui l’accompagnent (condensateurs, etc.) répondent sans nul doute à un cahier des charges professionnel. Là encore, il s’agit non pas de puissance, mais de fiabilité.
Processeur : du x86 pour la filiation PC
Si l’architecture ARM est la reine dans le jeu mobile, l’architecture x86 de nos ordinateurs règne sur le jeu sédentaire : outre les PC (et les Mac !), les Xbox One et PS4 ont lâché l’architecture Power PC des générations précédentes pour le x86 (là encore made by AMD) du monde PC. Un choix qui facilite le portage des jeux console<>PC et qui permet de profiter des améliorations continues des processeurs PC – de son côté, l’architecture Power PC est de plus en plus délaissée par l’industrie.
Dans le portfolio des processeurs actuels d’AMD, aucun n’affiche la fréquence de 2,7 GHz. On peut néanmoins spéculer sur le fait que la puce développée pour Google doit être basée sur l’architecture Zen, car la présentation fait mention de l’hyperthreading, une technologie qui était absente des générations antérieures à Zen ainsi que des CPU pour consoles susmentionnés. Impossible cependant de déterminer si la puce sera basée sur l’architecture Zen ou Zen+ – Zen 2, qui n’a pas encore été lancée ne semble pas le bon client, là encore, pour des raisons de fiabilité (pas encore assez éprouvé).
Si on compare les spécifications publiées par Google – hyperthreading et 9,5 Mo de mémoire cache L2+L3 – et le portfolio de puces Zen, deux puces pourraient servir de base : les Ryzen 5 1400 (Zen) et Ryzen 5 2500X (Zen+). Les deux puces de 65W de TDP embarquent quatre cœurs physiques pour huit cœurs logiques (hyperthreading), fonctionnent avec de la DDR4 à double canal et se logent sur un socket AM4. Des puces qui sont donc peu coûteuses (moins de 200$) et se montent sur un socket éprouvé : voilà qui fleure bon des processeurs économiques et faciles à intégrer.
Si la fréquence du processeur « custom » est inférieure à celles des processeurs susceptibles d’avoir servi de base technique, c’est sans doute pour des raisons de consommation énergétique et de surchauffe : Google va aligner des milliers de serveurs en rang d’oignons. Ce sous-cadençage ne devrait pas nuire significativement aux performances des jeux puisque ce sont surtout les GPU qui sont sollicités dans les applications vidéoludiques. On est donc en droit d’attendre 70% de la performance d’un Ryzen 5 2500X pour un TDP inférieur ou égal à 45W… dans le cas où votre jeu ne requière qu’une seule instance du serveur.
Un serveur par personne… voire plus ?
Car c’est là toute la force – et le flou ! – de l’architecture de Stadia : selon les slides diffusées par Google, les ressources de son architecture peuvent être mutualisées lorsqu’une application devient trop gourmande. Il n’y a qu’à voir la promesse : une plateforme Ryzen 5 2500X avec Radeon Vega 56 ne peut en aucun cas lancer un jeu 4K HDR à 60 i/s avec un niveau de détails élevés.
En termes de qualité d’image, l’atout des serveurs Google/AMD pourrait donc se situer dans leur aptitude à répartir intelligemment la charge selon la bande passante des utilisateurs et la gourmandise matérielle des jeux.
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