Aux Etats-Unis aussi les discussions sur la neutralité des réseaux se poursuivent. Alors qu’en France, un rapport gouvernemental cherche à encadrer ce concept (voir encadré), deux géants américains d’Internet se sont associés pour proposer une nouvelle approche sur le sujet au Congrès. Une proposition qui provoque de vives polémiques outre-Atlantique.
Annoncée notamment sur le blog de politique publique de Google, la proposition semble au premier abord tout à fait rassurante : elle interdirait aux « opérateurs de pratiquer la discrimination entre les contenus Internet, applications ou services légaux, susceptibles de heurter la concurrence et les utilisateurs ». Soit une définition nette du principe de neutralité du réseau, à laquelle Google s’était jusque là fortement accroché.
Or le texte va plus loin. D’abord, il indique de manière assez floue que les fournisseurs d’accès à Internet pourraient, s’ils respectent la neutralité du réseau sur l’Internet « ouvert », offrir par ailleurs « n’importe quel service additionnel ou différencié » sur leur propre réseau. Des services qui devraient être distincts des services Web traditionnels « mais [qui] pourraient utiliser ou accéder à des contenus, applications ou services Internet et inclure une hiérarchisation du trafic ». Autrement dit, si la neutralité des réseaux sur l’Internet public demeurerait, ces nouveaux réseaux « privés » développés par les opérateurs pourraient être loués au plus offrant.
Schmidt et Seidenberg réclament de la flexibilité pour les opérateurs
Dans une tribune publiée dans le Washington Post, Eric Schmidt et Ivan Seidenberg, les patrons respectifs de Google et de Verizon, ont un peu détaillé leur plan : « Les fournisseurs d’accès à Internet devraient aussi disposer d’une certaine flexibilité pour gérer leurs réseaux et avoir l’opportunité de fournir des services supplémentaires – comme des applications de télétravail, de la surveillance santé ou des services de jeu optimisés – du moment que ceux-ci n’affectent pas la capacité des consommateurs à accéder simplement à leurs sites favoris sur les offres de l’Internet ouvert que [notre] proposition protégerait. »
« Internet ouvert » contre « Internet fermé » : cette division du réseau en deux tuyaux attise la méfiance de plusieurs éditorialistes de la presse américaine, à l’image de Craig Aaron du Hufftington Post qui compare non sans emphase ces nouveaux services « à une route à péage sur les super-autoroutes de l’information, une ligne rapide réservée à une minorité, pendant que tous les autres restent bloqués sur le cyber-équivalent d’une route poussiéreuse et sale ».
L’autre disposition qui fait polémique concerne les réseaux sans fil, qui d’après la proposition de Google et de Verizon échapperaient au principe de neutralité du réseau « à cause [de leurs] caractéristiques techniques et opérationnelles uniques ». « Ce marché naissant pour le haut-débit sans fil devrait être autorisé à se développer davantage avant d’appliquer une nouvelle liste de règles », indiquent encore les deux patrons dans leur tribune du Washigton Post.
Cette mesure, qui tient compte de la bande passante limitée dont disposent les opérateurs de réseaux sans fil, est cependant surprenante à l’heure ou l’équipement en smartphones monte en flèche. Et il est fort probable que les téléphones deviennent les principaux terminaux d’accès à Internet dans le futur… Mais elle permettrait à Verizon, présent sur le marché de l’ADSL et surtout plus grand opérateur mobile aux Etats-Unis, de gérer ses réseaux sans fil sans être ennuyé par la moindre régulation.
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