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Google devient un géant de la publicité en ligne

Le moteur de recherche débourse 3,1 milliards de dollars pour s’offrir le prestataire de solutions de tracking DoubleClick. C’est deux fois le prix qu’il a payé pour acquérir YouTube.

C’est environ le prix de onze Airbus A380, le futur gros porteur du constructeur européen EADS. Google met sur la table 3,1 milliards de dollars en cash pour s’offrir l’américain DoubleClick, prestataire de solutions de
tracking en ligne.Pour comprendre de quoi il s’agit, il suffit de se rendre dans les cookies de son navigateur, ces petits fichiers espions qui marquent le passage de l’internaute sur les sites Web. Il y a fort à parier que chacun y trouve quelques
fichiers du type ‘ [email protected] ‘, traces du parcours de l’utilisateur sur la Toile. A tel point que Doubleclick peut définir des données socio-démographiques (âge, sexe ou informations comportementales) le
concernant. La société rend compte ensuite à ses clients de l’impact de leurs campagnes et les conseille sur les changements éventuels à y apporter. L’outil maison, Dart, permet même aux annonceurs de gérer l’ensemble d’une campagne, en amont et en
aval (ordre d’achat, lancement, suivi des opérations, etc.).Des concurrents tels que 24/7Real Media, Saleforce.com, aQuantive ou encore le français Weborama ont développé des outils similaires. Mais tous sont loin derrière DoubleClick en termes de part de marché. Fort de
1 500 clients dans son portefeuille, dont des agences de publicité ou encore des grands noms de l’Internet comme AOL ou MySpace, DoubleClick a réalisé en 2006 un chiffre d’affaires estimé à 300 millions de dollars.

Deux fois plus cher que YouTube

Pour mettre la main sur ce prestataire, Google a accepté de payer un prix élevé,
deux fois celui déboursé pour acquérir YouTube. Et trois fois plus que les fonds d’investissement Hellman & Friedman et JMI Equity, qui avaient racheté DoubleClick
1,1 milliard de dollars, il y a deux ans. La société est moins connue du grand public que YouTube, mais ses domaines de compétences s’inscrivent en droite ligne des développements de Google dans le secteur de la publicité.A la fin de l’année dernière, le spécialiste des liens sponsorisés a annoncé son intention d’élargir son activité aux médias traditionnels comme la presse, la radio et la télévision. Depuis quelques mois, il met les bouchées doubles.
Google s’est offert, début 2007, la régie radio dMarc Broadcasting, une plate-forme technologique qui envoie directement la publicité aux radios. Puis, début avril, il a signé un accord avec le groupe de télévision par satellite
EchoStar.Le géant du Web entend placer de la publicité sur les chaînes de télévision et les stations de radio grâce à ses services Google Audio Ads et Google TV Ads. En version bêta pour le moment, ceux-ci fonctionnent sur les mêmes
principes que les Adwords : les annonceurs choisissent une chaîne, l’horaire, la couverture géographique de leur campagne publicitaire. Les synergies avec DoubleClick paraissent évidentes puisque la société a développé des outils permettant de
juger l’efficacité des campagnes vidéo en streaming.Certains s’attendent à ce que Google développe une offre branding. Autrement dit, les bannières publicitaires. ‘ Pour positionner un plan média, on ne peut pas proposer que des liens
sponsorisés sans faire du
branding. Si, demain, Google vend du positionnement de marque sur le Net, tant mieux ‘, analyse Jérôme de Labriffe, directeur général de
l’Internet Advertising Bureau en France, une association dédiée à la promotion de la publicité interactive. ‘ Ce rachat va dans le sens de la maturité du média. Les acteurs élargissent leurs offres quitte, pourquoi
pas, à dépasser les limites d’Internet. Ce rapprochement va obliger d’autres acteurs à prendre position sur le marché pour proposer des offres complètes aux annonceurs. ‘

Inquiétudes sur la protection des données

En acquérant DoubleClick, Google coupe aussi l’herbe sous le pied à Microsoft, qui tente de développer sa propre régie publicitaire. L’éditeur était prêt à faire une offre de 2 milliards de dollars selon le
Wall Street Journal.Aujourd’hui, Brad Smith, vice-président et conseiller général de Microsoft, s’inquiète dans un communiqué : ‘ Cette offre de rachat soulève de sérieuses inquiétudes concernant la concurrence et la
protection des données. En cela, elle donne au couple Google/Doubleclick un contrôle sur la publicité en ligne sans précédent et un accès à une énorme quantité d’informations sur les consommateurs en traquant ce qu’ils font en ligne. Nous pensons
que cette fusion mérite un examen minutieux des autorités de régulation pour préserver la concurrence du marché de la publicité en ligne. ‘
Régulièrement, le peu de cas que faisait DoubleClick de la protection des données personnelles des internautes s’est
retrouvé sur le devant de la scène. La société a d’ailleurs été condamnée par la justice américaine en 2002 : elle croisait les informations récoltées par ses cookies avec des
éléments d’identification comme les adresses e-mail des internautes. Même inquiétude quant à Google
qui gardait sans limitation de durée les logs de tous ses utilisateurs.‘ Chez Google, nous sommes engagés dans le respect de la vie privée, autant celle des annonceurs que celle concernant les données récoltées [autrement dit, les internautes, NDLR] ‘, a
déclaré laconiquement Eric Schmidt, PDG du moteur de recherche lors d’une conférence de presse. Il faudra s’en contenter.

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Hélène Puel