Google vient d’annoncer l’activation expérimentale dans Chrome d’un nouveau principe de ciblage publicitaire, à savoir le Federated Learning of Cohorts (FLoC).
Cette technologie est disponible dans une dizaine de pays (Australie, Brésil, Canada, Inde, Indonésie, Japon, Mexique, Nouvelle-Zélande, Philippines, États-Unis), où un « faible pourcentage d’utilisateurs » sera désormais automatiquement réparti dans des « cohortes », c’est-à-dire des groupes anonymes de plusieurs milliers d’utilisateurs qui ont un historique de navigation similaire. Il faut préciser que cette répartition se fait en local, dans Chrome, et que l’historique de navigation n’est jamais partagé avec un tiers.
Qu’est-ce que ça change ? Les internautes verront les publicités en fonction de la cohorte à laquelle ils appartiennent, et non plus du cookie tiers stocké sur leurs machines.
L’avantage, selon Google, c’est que le ciblage individuel n’est plus possible, car chacun est noyé dans la masse de sa cohorte. La protection des données personnelles serait donc considérablement améliorée, sans pour autant que cela nuise au business publicitaire, très cher à Google.
Le géant du Web promet, à ce titre, qu’une campagne basée sur FLoC permettrait de convertir au moins 95 % des visites que la même campagne aurait permis de convertir avec des cookies tiers. L’efficacité serait donc presque identique.
Le FLoC est l’une des principales briques de « Privacy Sandbox », un ensemble de technologies Web permettant de livrer aux annonceurs des informations utiles sur les visiteurs d’un site sans pour autant révéler leur identité et leur vie privée.
Cette initiative a été présentée pour la première fois en 2019, en réaction au blocage de plus en plus massif des cookies au niveau des navigateurs.
« Lorsque d’autres navigateurs ont commencé à bloquer les cookies tiers par défaut, nous étions enthousiasmés par la direction, mais également inquiets de l’impact à court terme, explique Marshall Vale, responsable produit Privacy Sandbox dans une note de blog. Enthousiasmés parce que nous avons absolument besoin d’un Web respectueux de la vie privée, et nous savons que les cookies tiers ne sont pas une solution à long terme.
Inquiets, car aujourd’hui, de nombreux éditeurs s’appuient sur la publicité basée sur les cookies pour soutenir leurs efforts de contenu, et nous avions vu que le blocage des cookies engendrait déjà des solutions de contournement invasives (telles que les fingerprinting) qui étaient encore pires pour la confidentialité des utilisateurs.
Dans l’ensemble, nous avons estimé que le blocage pur et simple des cookies tiers sans alternatives viables pour l’écosystème était irresponsable, et même nuisible, pour le Web gratuit et ouvert que nous apprécions tous. »
La fin des cookies tiers est proche
Mais cette alternative se construit, il faut bien le dire, un peu au forceps. Google a décidé de ne plus supporter de cookies tiers dans Chrome d’ici à la fin 2022. Et comme Chrome accapare plus de trois quarts des parts de marché dans le monde (source : Kinsta.com), les annonceurs sont donc contraints de sauter sur un autre train.
Il n’est pas certain que celui proposé par le géant du Web leur convienne vraiment. Certains annonceurs préféreront le ciblage individuel, qui restera toujours plus efficace, quitte à se salir les mains avec le fingerprinting. Les réseaux publicitaires ne voient peut-être pas d’un bon œil que Google, qui est également leur concurrent, leur impose une telle usine à gaz.
À l’inverse, ce nouveau système ne sera peut-être pas suffisamment protecteur pour les militants des droits citoyens. L’association Electronic Frontier Foundation estime, par exemple, que le FLoC est une mauvaise idée, car elle pourrait — au contraire — simplifier le travail des spécialistes du fingerprinting en leur donnant un premier socle informationnel.
« Nous rejetons catégoriquement l’avenir de FLoC. Ce n’est pas le monde que nous voulons ni celui que les utilisateurs méritent. Google doit tirer les bonnes leçons de l’ère du suivi par des tiers et concevoir son navigateur pour qu’il fonctionne pour les utilisateurs, pas pour les annonceurs », estime EFF dans une note de blog.
La messe n’est pas encore dite.
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