01 Informatique : La reprise américaine est dopée par le rebond de la dépense informatique. En ressentez-vous les prémices en France ?Gérard Philippot : Pour la première fois depuis longtemps, j’observe un certain frémissement des commandes. Je trouve la crise actuelle très intéressante. Elle est beaucoup plus dure qu’il y a dix ans, lors du creux qui
avait suivi la première guerre du Golfe. On ne peut plus se contenter d’attendre que ça reparte. L’informatique est en train de devenir adulte. Ce qui veut dire, en premier lieu, qu’il faut être à l’écoute du client afin de savoir ce qu’il
veut.Toujours au niveau mondial, comment voyez-vous évoluer le métier du service ?Dans ce domaine, beaucoup de choses m’étonnent. Par exemple, Carly Fiorina, la patronne de HP, ne parle jamais de services. Je ne vois pas du tout sa stratégie. Accenture, lui, s’en sort plutôt bien. Le groupe a échappé à la
disparition d’Andersen, puisqu’il s’en était détaché avant que la crise n’éclate [à la suite de l’affaire Enron NDLR]. Coup de chance ! Mais celui qui m’impressionne le plus, je crois, c’est IBM, avec sa reconversion
réussie vers les services. Je viens d’ailleurs de finir le livre écrit par Louis Gerstner. Et je reste vraiment sidéré de la façon dont il a ‘ remonté ‘ l’entreprise en conservant la totalité du
groupe.Revenons en France. Avec le rachat de SchlumbergerSema par Atos Origin, la vente de Transiciel à Cap Gemini… le paysage des SSII est en pleine recomposition. Comment vous situez-vous ?Sur Transiciel et son intégration dans Cap Gemini Ernst & Young, je suis très réservé. Quant à Sema, c’est assez compliqué : ils avaient été rachetés il y a deux ans pour démontrer une complémentarité supposée avec
Schlumberger… Et maintenant, ils sont revendus à Atos Origin. Difficile, dans ces conditions, d’y voir clair et de dire exactement ce qui va se passer. Mais le président d’Atos Origin a plutôt bien réussi sa stratégie de croissance externe.
Mon analyse, celle que j’essaie d’appliquer chez Unilog, est la suivante : quand on fait de la croissance externe, elle doit toujours être mesurée, maîtrisée. Nous, par exemple, nous avons longtemps privilégié la croissance organique. Nous
sommes conscients d’être encore trop petits à l’étranger. Nous devons corriger cette situation et avoir une vision à long terme. Ainsi, dans dix ans, nous serons certainement aux Etats-Unis. Et ailleurs.Vos clients exercent-ils une forte pression sur les tarifs ?Et comment ! Aujourd’hui, le scénario est bien rodé : d’un côté, vous avez les dirigeants d’entreprise, qui veulent absolument réduire le nombre de leurs fournisseurs. De l’autre, vous voyez les mêmes forcer ces
fournisseurs à leur en donner toujours plus, tout en tirant sur les prix. C’est la quadrature du cercle. Et pourtant, il faut s’y adapter. Je ne vous donnerai qu’un exemple : celui de France Télécom. En quelques mois, ses fournisseurs sont
tombés de mille à moins de cent. Vous imaginez le changement que cela implique, à tous points de vue.Les prix sont-ils uniformes en Europe ?Pas du tout. Ainsi, les SSII françaises sont globalement plus intéressantes que leurs homologues de plusieurs pays d’Europe. Je pense notamment aux sociétés allemandes, qui pratiquent des tarifs extra-ordinairement élevés. Au point
qu’en France, on pourrait faire de l’offshore pour l’Allemagne !A ce propos, vous avez récemment ouvert à Amiens un centre de services axé sur le ‘ rightsourcing ‘. Qu’en est-il exactement ?Le site d’Amiens est un centre de services dédié à la production. Il répond aux besoins des entreprises qui entendent redimensionner leur système d’information en fonction de leur propre évolution. C’est ce que nous appelons le
‘ rightsourcing ‘. Autrement dit, la possibilité de délocaliser certaines activités, mais en fonction d’un dosage spécialement adapté. Et pas trop loin. Cet aspect géographique est important.
L’outsourcing, quand c’est loin, c’est moins cher… Mais c’est surtout plus risqué !Combien d’embauches prévoyez-vous ?Nous allons engager jusqu’à trois cents collaborateurs d’ici à 2006. L’embauche s’effectuera prioritairement au niveau local.Avec quelles chances de réussite ? On dit que les jeunes informaticiens s’en vont à la première occasion…Non, je ne le crois pas. Les jeunes d’aujourd’hui ne sont pas si différents de ceux d’il y a vingt ans. Ceux qui entrent dans l’entreprise peuvent très bien rester et s’épanouir. Il suffit de recruter les bons ! Et, pour cela,
il n’y a pas d’autre solution que de les séduire. Cela dit, on observe, effectivement, une certaine mobilité dans notre domaine.
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