Fondateur de The Phone House, Geoffroy Roux De Bezieux, diplômé de l’Essec, a succédé à Charles Beigbeder à la tête de Croissance Plus en juillet dernier. L’association lobbyiste, qui regroupe les patrons de sociétés ‘ à
forte croissance ‘, milite en faveur du financement et de la création d’entreprises.01net. : Croissance Plus a fortement critiqué l’Agence pour l’innovation industrielle dont la création a été annoncée par Jacques Chirac. Quels sont les manques de cette nouvelle structure ?
Geoffroy Roux De Bezieux : L’Agence pour l’innovation industrielle acceptera des projets supportés par des entreprises dont le chiffre d’affaires se monte à un milliard d’euros. Tel quel, ce projet ferme de
facto la porte aux PME innovantes, par exemple aux éditeurs de logiciels français qui sont loin de réaliser de tels résultats. Entre l’Anvar qui finance l’amorçage et l’Agence pour l’innovation industrielle, il manque un maillon à la
chaîne de financement.
En France, on croit encore que l’innovation est le fait de grands groupes industriels. C’est faux ! eBay, Skype, Google ou encore Blackberry sont le fruit de quelques hommes ou bien résultent de spin-off [essaimage,
NDLR] de grands groupes. Lorsque j’ai créé un opérateur mobile virtuel, j’ai fait le choix de séparer la structure des 2 500 employés de The Phone House afin de donner une nouvelle impulsion à cette activité.En septembre 2004, suite à de fortes pressions de Croissance Plus, les assureurs s’engageaient à investir 6 milliards d’euros
dans les PME d’ici à la fin
2007. Un an après quel premier bilan peut-on dresser ?
Malheureusement, nous n’avons aucune visibilité sur les montants réellement investis. Les assureurs affirment qu’un milliard d’euros est allé financer les PME. Une chose est sûre, nous n’avons pas remarqué chez Croissance Plus d’afflux
massif d’argent en faveur des petites et moyennes entreprises. Nous allons rencontrer Thierry Breton, pour lui demander de dresser un bilan effectif de cet accord un an après sa signature.Un rapport remis au Sénat en juillet dernier prône, entre autres, l’appel à l’épargne pour
financer l’innovation. Est-ce bien réaliste de faire appel à l’argent des Français alors que l’indice de confiance des ménages est au plus bas ?
Il n’appartient pas aux ménages français de financer l’innovation. C’est une opération financière trop risquée. En revanche, je crois beaucoup plus au rôle des business-angels
[investisseurs individuels
fortunés finançant les start-up, NDLR]. Les États-unis en comptent 250 000 alors qu’ils ne sont que 3 500 en France. L’ISF [impôt de solidarité sur la fortune, NDLR] empêche un entrepreneur de réinvestir des
capitaux dans des entreprises innovantes.La suppression de l’ISF est un vieux cheval de bataille. Comment faire pour que les gens assujettis à cet impôt financent l’innovation ?
Nous ne réclamons pas la suppression de l’ISF. En revanche, il faut trouver une nouvelle définition de l’ISF qui permette de bénéficier de réductions d’impôt quand vous investissez dans l’innovation. Ce qui se fait d’autres cas, comme
lorsque vous investissez dans l’art par exemple.
Lorsque vous financez une jeune entreprise, vous ne bénéficiez d’aucune réduction d’impôt alors que les retours sur investissement se font sur plusieurs années. Et encore, si la société ne périclite pas d’ici là. Tel qu’il existe
aujourd’hui, l’ISF conduit les personnes qui y sont assujetties à s’exiler ou à investir dans de mauvais secteurs.Le Conseil d’Etat étudie un décret en vue d’empêcher les jeunes entreprises innovantes des secteurs sensibles de
passer sous la coupe de groupes étrangers.
Qu’en pensez-vous ?
L’Etat a le droit de protéger les secteurs qu’il juge vitaux ou sensibles. Mais ces secteurs tels qu’ils ont été révélés dans la presse doivent être mieux définis. Prenez les technologies duales, utilisées par les militaires et les civils.
Elles regroupent des objets aussi divers que le moteur à explosion, le téléphone par satellite. Sont-ils un enjeu de la sécurité nationale ?
De fait, l’Etat ne doit pas se contenter de mettre en place des mesures défensives. Il doit créer des mesures offensives comme celle de fonds de capital-risque en France dédiés à ces secteurs par exemple. Il ne faut pas empêcher les
entreprises de grandir.Quels vont être les prochains chantiers de Croissance Plus ?
Nous allons nous efforcer d’éliminer les barrières administratives et fiscales qui freinent la création d’entreprises. Au lieu de favoriser une entreprise en croissance, l’Etat la pénalise. Prenez le CNE [contrat nouvel embauche,
NDLR], au-delà de 20 salariés, il n’est plus applicable. Vous devez signer des CDD ou des CDI. Une jeune entreprise ne peut être traitée comme celles du CAC 40.
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