En marge de la GTC, qui bat actuellement son plein à San José, Jensen Huang, patron et fondateur de Nvidia, s’est plié au traditionnel jeu des questions-réponses devant quelques journalistes dont nous étions. L’occasion de faire un point sur GeForce Now, le service de cloud gaming de sa société, lancé puis repensé, puis relancé et enfin accessible en France depuis janvier 2018 mais toujours en bêta restreinte.
A petits pas
Aujourd’hui, GeForce Now sert leur dose de jeux vidéo à 300 000 joueurs… Un résultat qui pourrait être plus impressionnant puisqu’un million d’impatients sont actuellement sur liste d’attente.
Pourquoi ne pas les faire entrer ? « Le cloud gaming n’est malheureusement pas encore prêt », lâche Jensen Huang de but en blanc. Il est sans doute « assez bon pour des millions de personnes », mais pas pour le patron de Nvidia. A ses yeux, trois défis l’attendent.
Le premier tient à la maturité du projet. « Nous sommes les meilleurs et il nous faut encore nous améliorer », juge-t-il. L’enjeu est « d’opérer à la bonne échelle, avec une bonne qualité de service ». En ce sens l’annonce de l’arrivée d’ici la fin de l’année, au plus tard, des cartes RTX sur les serveurs GeForce Now est déjà la promesse d’un joli bond en avant des performances.
S’étendre partout
Mais la prochaine étape sera a priori de s’étendre au-delà des marchés classiques, occidentaux. Un défi de taille, auquel Nvidia ne s’attaquera pas seul. Lundi dernier, Jensen Huang officialisait la GeForce Now Alliance. Une sorte de partenariat qui lie la société de Santa Clara à des opérateurs de téléphonie fixe ou mobile, notamment en Indonésie et au Brésil. Ils ajouteront des serveurs GeForce Now à leurs réseaux afin d’offrir le service dans les meilleures conditions possibles. Jensen Huang le promet, 2019 sera l’année de la croissance de son service.
En l’espèce, ses ambitions sont énormes. « En étant optimiste », le patron de Nvidia verrait bien son service conquérir le milliard de joueurs, qui utilisent des PC un peu vieillissants, qui ne sont pas équipés d’une carte GeForce. Ces joueurs qui aiment le PC mais ne ressentent pas le besoin ou n’ont pas les moyens de s’offrir l’expérience de jeu « ultime ». Des gamers que les différences de performances entre cloud gaming et jeux sur PC ne dérangeront pas.
Pour perspective, à l’heure actuelle, ce sont environ 200 millions de joueurs qui gravitent dans l’univers GeForce. GeForce Now a donc la possibilité de multiplier par cinq la présence de Nvidia auprès des joueurs. L’enjeu est de taille.
Trouver un modèle économique
D’ici là, et c’est le troisième défi, Jensen Huang voudrait réussir à « réduire les coûts » de son cloud gaming. Cette volonté tient autant à une politique financière qu’à une vision claire. « Si on arrive à réduire le coût de fonctionnement, alors on pourra donner accès à des titres free to play », commente-t-il. Le plus souvent des incontournables qui pourraient enrichir la liste de plus de 500 jeux déjà disponibles.
Ce contrôle des coûts est d’autant plus important que Nvidia sait que le modèle économique de ce genre de service n’est pas arrêté, voire trouvé. Selon le patron de Nvidia, le modèle publicitaire n’a pas fait ses preuves sur ce genre de service.
Par ailleurs, il est clair que GeForce Now n’est pas appelé à devenir un Netflix du jeu vidéo. Le positionnement ne lui semble pas pertinent et Jensen Huang liste ainsi quelques raisons.
Tout d’abord, commence-t-il, « notre modèle économique n’est pas de proposer un Store. Les éditeurs veulent garder le contrôle et les revenus, et Nvidia est d’accord avec ça, ils le méritent ». « Notre business c’est les GeForce dans le Cloud, le matériel. Si vous possédez le jeu ou qu’il est gratuit, vous pouvez y jouer chez nous… », précise-t-il avant de continuer.
De toute évidence, les jeux sont très différents du cinéma ou de la télévision. Le marché vidéoludique tient à cinq ou dix jeux, qui ne seront jamais exclusifs à une plate-forme de distribution – même si celle d’Epic Games s’essaie avec ferveur à cet exercice depuis son lancement. S’enfermer dans un modèle à la Netflix, c’est donc priver les joueurs de certains titres.
Le cloud gaming selon Nvidia prend son temps pour atteindre un niveau de qualité qui ne décevra pas. Une vision élitiste séduisante du point du joueur. Toutefois, il ne faudrait pas que la société de Santa Clara laisse trop s’installer des solutions comme Stadia, dévoilée par Google dans le cadre de la GDC de San Francisco et qui devrait arriver en Europe dans le courant de l’année.
Pour l’heure, GeForce Now est toujours en bêta, « parce qu’une bêta est gratuite », s’amuse le patron de Nvidia, qui se souvient sans doute que son service a été payant… Mais si GeForce Now ne quitte pas la bêta, c’est aussi parce qu’aux yeux de Jensen Huang, aussi bon soit-il, son cloud n’a pas atteint le niveau requis. Il faut dire qu’il vise haut, très haut. On a la nette impression, à l’entendre, qu’il aimerait un jour que son cloud gaming puisse rivaliser avec ses propres GeForce, qu’il puisse remplacer ces cartes auprès des core gamers, ces joueurs pour qui la moindre latence fait la différence entre être fragueur ou fragué.
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