Paradoxe de l’actualité du petit village mondial : si le sommet du FMI et de la Banque mondiale à Prague s’est déroulé cette semaine sous les feux des projecteurs, le GBDe (Global Business Dialogue on Electronic Commerce) a, lui, tenu ses assises en Floride dans la plus grande des discrétions. Cette organisation aura pourtant probablement une influence non négligeable sur le monde de demain. Jugez des invités : les dirigeants d’AOL-Time Warner, de Walt Dysney, de Vivendi, d’IBM, d’Andersen Consulting, de Hewlett-Packard, de France Télécom, de Toshiba, de Bertelsmann, et on en passe des meilleurs. Ce club ?” qui compte environ 80 membres issus de l’industrie mondiale du multimédia ?” affiche tout simplement l’ambition de constituer un groupe de pression puissant face aux différents pouvoirs publics.Un succès, si on en juge par la vingtaine de hauts fonctionnaires américains qui se sont joints à cette réunion du GBDe, dont les thèmes majeurs portaient, cette année, sur la corégulation sur le Net, la lutte contre la cybercriminalité et la protection des cyberconsommateurs.
Du côté des administrations européennes, on ne dénombrait que 5 ou 6 représentants. Un comble quand on sait que c’est la Commission européenne qui a poussé elle-même à la création du GBDe. Soucieuse d’avoir en face d’elle un unique interlocuteur lors des débats sur les réglementations en matière d’e-commerce, elle avait en effet invité l’an dernier les groupes internationaux du multimédia à se rassembler au sein d’une même organisation.Trustée immédiatement par les entreprises américaines ?” pour qui le lobbying institutionnel est une habitude culturelle ?”, la première réunion du GBDe s’est déroulée en septembre 1999 à Paris, dans une atmosphère sulfureuse. Lors des discussions, s’était dégagée l’idée que les entreprises étaient seules aptes à modeler le cybermonde et d’en contrôler les dérives. Bref, l’autorégulation s’était imposée comme le maître-mot du GBDe, et les industriels demandaient tout simplement aux pouvoirs publics une liberté totale dans le domaine du commerce électronique.Après une année de réflexion, le GBDe semble avoir tempéré son discours ultralibéral, prône désormais le principe de corégulation et se cherche des valeurs ethiques : corégulation dans la lutte contre les cyberpirates, mise en place de projets privé-public pour le développement d’Internet dans les pays pauvres et les couches sociales défavorisées, création d’une charte de bonne conduite commerciale pour toutes les entreprises installées sur le Net, protection des données personnelles à l’échelle mondiale.Une première victoire pour les quelques entreprises européennes du GBDe, qui déplorent toutefois la surreprésentation américaine et l’omniprésence des grands groupes. Surtout quand on sait que l’adhésion à ce club ne coûte que 5 000 dollars par an. C’est-à-dire rien du tout pour avoir la chance de côtoyer Steve Case ou Jean-Marie Messier, et surtout, davoir son mot à dire sur le cybercommerce de demain.Prochaine chronique le vendredi 13 octobre
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