C’est une vidéo mise en lumière par le site américain dédié à la photo Petapixel qui a mis le feu aux poudres : des cartouches « presque vides » des imprimantes photo du célèbre constructeur japonais Epson qui contiennent toujours de l’encre… et pas qu’un peu. Il resterait en effet entre 15% et 20% du précieux liquide dans une cartouche déclarée comme « à changer » par l’imprimante. Quand on connaît le prix au litre de l’encre, souvent supérieur aux plus grands vins, il y a de quoi avoir les dents qui grincent : pour l’imprimante citée, un modèle professionnel appelé Stylus Pro 9900 utilisé par le studio d’impression Bellevue FineArt, la facture se compte en centaines de dollars par mois. Cette première vidéo a donné suite à une seconde postée par un autre utilisateur, Rob LIM, photographe et professeur de photographie. Moins haut de gamme, l’imprimante photo incriminée (Epson Stylus Photo Pro 3880) laisse, elle aussi, beaucoup trop d’encre dans ses cartouches.
Epson s’explique…
L’industriel a rapidement répondu aux vidéos et s’est fendu d’une longue lettre qu’Epson France nous a fait parvenir. Avec moult précautions et détails techniques, Epson Corp explique que l’encre restante n’est pas comptabilisée dans l’encre « utile », que cette encre résiduelle est là pour « protéger les têtes d’impression », que l’avertissement « niveau d’encre bas » n’interdit pas d’imprimer et que dans le cas où l’imprimante n’a plus assez d’encre pour nettoyer ses têtes on peut tout à fait utiliser une cartouche neuve pour le nettoyage puis remettre la cartouche initiale pour la termine. Ce qui nous interroge quand même sur la quantité d’encre nécessaire à un nettoyage : les impressions photo consommant beaucoup d’encre, comment aurait-on assez d’encre pour relancer une impression mais pas assez pour nettoyer les têtes ?!
… mais les utilisateurs lui donnent tort
Revenons sur ce nettoyage de têtes. Outre le fait qu’il semblerait que les imprimantes photo Epson consomment une grande quantité d’encre pour cette opération, un élément souligné par de nombreux commentaires d’utilisateurs sur le site Petapixel nous turlupine : comment se fait-il que le concurrent Canon permette de vider complètement ses cartouches sans risquer de boucher les buses ?
Sur ce plan, soit Epson mène ses utilisateurs en bateau, soit ses technologies sont moins évoluées que celles de Canon. Transparentes et dépourvues de cette pochette interne en aluminium, les cartouches d’encre du concurrent permettent un vrai contrôle du niveau d’encre restant – on voit à travers – et aux vues des photos publiées par les utilisateurs, il semblerait qu’elles vont vraiment au bout de leur capacité. Dans tous les cas, il semble que le double système de mesure de l’encre restante d’Epson – mesure du nombre de gouttelettes plus une sonde qui s’active en fin de vie de la cartouche – soit assez mal calibré. Et penche plus en faveur d’un changement précoce des cartouches que d’une utilisation maximale. Gaspiller c’est mal Mr Epson.
Evolution des mentalités
Ce demi-scandale et cette réponse d’Epson dont certains éléments sont discutables ne doit pas occulter le fait que l’industrie est en train de changer, au moins dans les modèles à destination des experts et des pros. Entre le programme « Instant Ink » de HP où l’utilisateur ne paie que ce qu’il consomme et les nouveaux modèles « EcoTank » d’Epson, vendus plus chers mais équipés de très grosses recharges d’encre à prix modéré, les géants de l’impression jet d’encre commencent à comprendre que les utilisateurs en ont marre de servir de vaches à lait.
Faire évoluer la perception de l’achat (revaloriser le hardware) est un grand enjeu pour les constructeurs d’imprimantes. En se livrant à une féroce guerre des prix ces quinze dernières années, ils sont arrivés à une situation ubuesque où ils proposent certains modèles imprimantes quasiment à perte dont le faible prix est compensé par des cartouches dont le renouvellement coûte plus cher que l’appareil lui-même.
L’industrie doit clarifier les choses
Les constructeurs d’imprimantes ont régulièrement essuyé le feu des critiques. Que ce soit pour le prix des consommables, pour les compteurs d’impression cachés qui entravent le fonctionnement, les cartouches à péremption programmée ou encore les cartouches à puce électronique qui interdisent les encre compatibles – et c’est sans même parler de ces imprimantes multifonctions (coucou Canon et Epson !) qui interdisent la numérisation si une cartouche d’encre est vide. Le fameux documentaire « Prêt à jeter » diffusé sur Arte en 2011 (et disponible sur YouTube) s’ouvrait d’ailleurs par l’impossibilité de réparer une imprimante de marque… Epson – une Stylus C42UX pour être précis. S’il est tout à fait louable que les constructeurs indiquent la production moyenne de leurs cartouches, il faut non seulement qu’ils communiquent sur la quantité utile, mais aussi sur la quantité de réserve et le prix au litre utile.
Nous sommes en 2015 dans une ère où les citoyens/consommateurs sont à la recherche de plus de transparence, de maîtrise des coûts réels et il serait bon que le monde de l’impression se mette à la page.
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