L’annonce du nouveau boîtier hybride X-S10 de Fujifilm s’est faite par le biais d’une conférence enregistrée diffusée sur YouTube qui cachait un discours jamais vu dans la communication des marques photo.
Si le contenu de ces 28 minutes – nouvelles optiques, présentation du boîtier, mise en scène, etc. – n’avait rien d’exceptionnel en soi, une portion de 30 secondes de cette longue vidéo « classique » cachait des éléments complètement nouveaux. Et d’actualité.
Si vous ne suivez pas les très nippones présentations d’appareils photo, il faut savoir que les entreprises du pays du soleil levant ont des biais systématiques. Typiquement, les photographes sont plus que majoritairement masculins, les sujets humains très souvent féminins, et tout ce beau monde est caucasien ou asiatique.
Dans la communication très standardisée et lisse des entreprises japonaises, la présence d’un photographe noir parlant (trop rapidement certes) de la qualité du rendu des tons des peaux noires a quelque chose d’exceptionnel dans un monde secoué par les injustices raciales américaines. Des injustices qui ont aussi eu leur pendant technologique.
Le rendu des tons chair, une discrimination de longue date
Plusieurs articles anglophones (ici, là et là aussi) ont, par le passé, mis en lumière un biais invisible dans la science des couleurs des rendus des tons chair. Pour faire simple : du temps de l’argentique, la color science des pellicules était entièrement optimisée pour obtenir les meilleurs rendus des peaux claires des européens caucasiens et des asiatiques.
Des optimisations technologiques qui nuisaient, par ricochet, au rendu des peaux sombres. Les personnes à la peau noires étaient ainsi bien souvent « naturellement » sous-exposées et donc encore plus sombres et moins discernables.
Le simple fait d’en parler est pour Fujifilm, qui a été un des géants de la pellicule, une petite révolution. Elle n’est certes pas abordée de front en nommant les « torts » passés, mais de mémoire de journaliste, c’est la première fois que ce sujet est soulevé. De même que la présence, plus importante qu’à l’accoutumée, de photographes femmes parmi les témoignages semble être une tentative, là encore discrète, de rééquilibrer un milieu largement dominé – parfois même écrasé – par les hommes.
Fujifilm n’efface certes pas tous ses biais et oui, la majorité des photographes et modèles présentés au cours de la présentation étaient des individus plutôt blancs (occidentaux et asiatiques). Et encore “oui”, le modèle féminin principal répondait au standard de la jolie poupée. Rome ne s’est pas faite en un jour…
Mais Fujifilm a eu l’élégance de commencer à faire bouger sa communication sans s’en vanter ni en faire un argument pleurnichard. Juste en nommant les choses et en faisant évoluer son discours.
Les plus grandes avancées se font (parfois) discrètement.
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