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Free : et si la prochaine Freebox offrait un débit de 10 Gbit/s ?  

L’opérateur suisse Salt, qui appartient à Xavier Niel, vient de lancer une box fibre avec un débit symétrique astronomique de 10 Gbit/s. La nouvelle Freebox  attendue cette année pourrait ne pas être en reste.

“On peut aller au-delà de 1 Gbit/s de débit”, nous avait sobrement indiqué Xavier Niel au sujet de la future Freebox lors de la présentation à la presse des résultats du groupe Iliad la semaine dernière.
Depuis, sa société Salt a lancé une box à 10 Gbit/s de débit symétrique sur le sol helvétique. Le boîtier, très puissant, est capable d’atteindre ces niveaux grâce aux particularités du réseau de fibre optique loué par Salt à Swiss Fiber Network. Il repose sur la technologie du XGS-PON, un standard dernière génération adopté en 2017. Xavier Niel peut-il profiter du lancement de la nouvelle Freebox avant la fin de l’année pour réitérer cet exploit en France ?

Free est aujourd’hui le deuxième FAI derrière Orange avec 6,5 millions d’abonnés fixes. S’il ne compte que 556 000 abonnés à la fibre de bout en bout (FttH), il totalise 6,2 millions de foyers éligibles, d’après les derniers chiffres communiqués. Ce qui fait tout de même un nombre non négligeable d’internautes potentiellement concernés.

Une vieille technologie pour faire du 10 Gbit/s asymétrique

Le XGS-PON utilisé par Salt n’est pas le seul à pouvoir fournir du 10 Gbit/s. “Il y a le XG-PON, adopté en 2010. Mais il est asymétrique et n’a été déployé quasiment qu’en Chine”, nous a détaillé un porte-parole de l’équipementier Nokia. “On trouve enfin le NG-PON2 qui permet comme le XGS-PON d’obtenir un débit symétrique de 10 Gbit/s. Et le 10G-EPON, qui date de 2004. Mais il ne suscite pas beaucoup d’intérêt de la part des opérateurs européens”.

Pourtant, c’est bien sur ce vieux standard EPON qui signifie Ethernet Passive Optical Network que Free pourrait s’appuyer pour sa prochaine box. Même si l’opérateur n’a pas voulu nous accorder de commentaires à ce sujet, plusieurs photos ont déjà circulé sur les réseaux sociaux et le site La fibre.info. Elles montrent que Free a déployé des équipements 10G-EPON dans les NRO (noeuds de raccordement optiques) de ses zones AMII :

Le 10G-EPON peut être symétrique ou asymétrique. Or, dans le cas de Free, les équipements cités sont asymétriques : 10 Gbit/s en download et 1Gbit/s en upload.
Le moment venu, Free pourra déployer le 10G-EPON sans  problème partout où il a déjà lui-même fibré, c’est-à-dire dans les zones denses et les zones moins denses d’initiative privée. “Mais dans les réseaux d’initiative publique où il loue la plupart du temps des infrastructures partagées, il faudra qu’il ait accès à la fibre noire pour descendre suffisamment bas dans le réseau”, nous fait observer Benoît Felten, fondateur du cabinet de conseil en télécom Diffraction Analysis. Ce n’est pas le seul problème.

Quels terminaux et quel Wi-Fi ?

“Free semble bien parti pour positionner le 10G-PON en France mais quid des infrastructures chez les particuliers ou pros dont le réseau local (LAN) et/ou le matériel terminal n’est pas prévu pour supporter un tel débit ?”, s’interroge David Marciano, le président de l’AOTA (l’Association des opérateurs télécoms alternatifs).
“Il faudra donc se méfier d’une promesse marketing et d’un positionnement technique qui ne correspondra peut être pas à l’attente première des consommateurs qui veulent désormais du service et de la bande passante de qualité”, ajoute-t-il. On pense bien entendu aux problèmes d’interconnexion qui subsistent avec des plates-formes comme Netflix. “Si ses abonnés continuent d’être confrontés à des goulots d’étranglement malgré leurs 10 Gbit/s, la déception risque d’être grande avec une effet de frustration à la clef”, fait encore observer Benoît Felten.

Reste également à savoir quel choix technologique Free fera au sujet du Wi-Fi de sa future box. On le voit avec le cas de Salt, même avec du XGS-PON dernière génération, le Wi-Fi ne dépasse pas les 2 Gbit/s. Xavier Niel semble écarter le passage au futur standard Wi-Fi 802.11ax. “Le Wi-Fi, c’est un problème que l’on va solder. Mais pas forcément en intégrant le futur nouveau standard”, nous avait-il déclaré lors de la dernière présentation des résultats de son groupe. Envisage-t-il des solutions de Wi-Fi maillé et dans ce cas, distribuera-t-il gratuitement plusieurs points d’accès ou les facturera-t-il en option ? Ces questions restent en suspens.

Les autres opérateurs restent prudents

Si Free est déjà en mesure d’offrir un débit de 10 Gbit/s dès cette année, que font les autres opérateurs ? Il y a deux ans, Orange communiquait sur une expérimentation avec un standard plus évolué que celui de Free : le NG-PON 2 déjà mentionné plus haut.

Depuis, l’opérateur historique s’est montré plutôt discret sur le sujet. “Orange a déjà réalisé des expérimentations réussies sur la fibre à 10 Gbit/s à Palaiseau et à Cergy auprès de clients testeurs en 2016 afin d’anticiper les usages de demain. Dans l’immédiat, nous concentrons nos efforts sur le déploiement de la fibre pour en faire profiter un maximum de clients”, nous a déclaré un porte-parole.

SFR ne cache pas non plus son intention de passer à moyen terme au NG PON-2 et a annoncé cette semaine une expérimentation à 10 Gbit/s réalisée au mois de février dernier dans son laboratoire de Vélizy. Mais il ne fixe pas non plus d’échéance à court terme.

Du côté de Bouygues Telecom, on se montre encore plus prudent. “Aujourd’hui, le standard GPON fournit un service correspondant à l’ensemble de nos besoins, en débit et en capacité”, nous a confié un porte-parole.

Toutefois, si Free lance une offre à prix cassé avec un débit faramineux, les autres opérateurs seront peut-être obligés d’accélérer les choses. Comme ce fut le cas en 2004 quand il fut le premier à proposer 15 Mbit/s de débit en passant à l’ADSL 2 +, alors que ses rivaux temporisaient à 8 Mbit/s avec de l’ADSL simple.
Le lancement d’une nouvelle Freebox compatible 10 Gbit/s qui renouvellerait l’équipement des abonnés et permettrait d’en conquérir de nouveaux, serait une occasion en or pour réitérer ce “coup”. Une fenêtre de tir à ne pas laisser passer. Surtout si Xavier Niel attend encore huit ans sans la renouveler comme c’est le cas actuellement avec la Freebox Révolution.

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Amélie CHARNAY