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François Maire, président de Deutsche Telekom France : ” L’état français ne pourra pas toujours protéger France Telecom “

Actif dans la téléphonie fixe, le mobile et internet, DT ne détient que 2 ou 3% du marché occupé en France par la concurrence. Mais il a bon appétit.

Il y a encore trois ans, Deutsche Telekom n’avait pas une seule activité en France. Et pour cause : l’opérateur allemand s’était engagé à ne pas concurrencer France Telecom sur son propre territoire. Après la tentative d’OPA ratée de Deutsche Telekom sur Telecom Italia, le couple franco-allemand a explosé en vol, permettant à chacun des partenaires de retrouver ses marges de man?”uvre. En achetant Siris(1), une société française qui apporte des solutions télécoms aux entreprises, et surtout le fournisseur d’accès Club-Internet au début de l’année 2000, Deutsche Telekom s’est offert un poste d’observation.On s’attendait à ce que l’opérateur allemand prenne dans la foulée un ticket pour l’UMTS. Mais à la surprise générale ?” et malgré la réduction du prix des licences consentie par Bercy ?”, Deutsche Telekom France n’a pas postulé pour le second round, contrairement à Bouygues Telecom. Mais l’opérateur, qui compte bien entamer le monopole de France Telecom, n’a pas dit son dernier mot. Explications de François Maire, président de Deutsche Telekom France depuis janvier 2000.Êtes-vous satisfait des performances cette année de votre fournisseur d’accès, Club-Internet ?Sur le plan de la croissance, nous sommes très satisfaits car, chaque année, nous nous rapprochons du million d’abonnés. En revanche, nous sommes toujours déficitaires(2) et cela ne peut pas nous réjouir. Nous avons un motif de satisfaction, c’est que sur nos 900 000 abonnés, nous en aurons bientôt 100 000 qui auront choisi la formule à haut débit ADSL. Ce qui nous place en deuxième position derrière Wanadoo (France Telecom). En général, les abonnés à l’internet rapide ont des niveaux de revenus élevés, et nous sommes persuadés que ce sera à l’avenir une forte source de rentabilité.T-Online est le premier fournisseur d’accès à internet en Europe avec 11 millions d’abonnés. Pourtant il continue à enregistrer des pertes… Comment comptez-vous vous en sortir ?Ces pertes sont dues aux investissements que nous avons consentis pour conquérir de nouveaux clients. Mais pour Club-Internet, le fait d’appartenir à un grand groupe est un élément très positif, car nous bénéficions ainsi du savoir-faire de la maison mère. Cela notamment pour les questions de marketing. Si l’on compte déjà 9 millions de clients à T-Online en Allemagne, ce n’est certainement pas un hasard !(3)Allez-vous garder le nom de Club-Internet ou bien pensez-vous un jour le rebaptiser T-Online ?Nous avons pris une décision raisonnable. Pour le moment, l’entité juridique s’appelle T-Online France, mais la marque commerciale conserve son nom, Club-Internet, car elle est déjà assez connue. Mais cela pourra évoluer. Dans toutes nos campagnes publicitaires, le sigle T-Online International est mentionné.La présence de Deutsche Telekom en France est vraiment minime. Vous avez d’autres projets ?Notre présence n’est pas si minime que cela. Nous avons près de 3 000 salariés au total, et un chiffre d’affaires, pour T-Systems, de 450 millions d’euros pour 2001. Nous nous attendons à une croissance forte pour 2002. Nos chiffres sont comparables à ceux de Cegetel dans le fixe. Si bien que nous sommes en deuxième ou troisième position derrière France Telecom. Nous pourrions évidemment faire mieux. Mais je n’ai pas le sentiment que la France facilite la tâche des concurrents de FT.C’est-à-dire ?Il suffit de comparer. La France est très en retard par rapport aux autres grands pays européens. Dans le domaine du fixe, la part de marché dévolue à la concurrence ne dépasse pas 11 à 12 %, quand elle est de 50 % en Grande-Bretagne et que la part de marché de Deutsche Telekom est de 54 % en Allemagne ! Sur la part prise en France par la concurrence, Deutsche Telekom France ne détient que 2 ou 3 % du marché. Ce n’est pas énorme, certes. Le gouvernement français a toujours cherché à protéger France Telecom, mais cela ne pourra pas durer éternellement. Enfin, les dernières positions de l’ART [Autorité de régulation des télécommunications, ndlr] sont encourageantes. Nous sommes préparés à prendre une part plus active dans ce domaine et nous avons la conviction que notre pari était le bon.Mais trouvez-vous, à l’inverse, que le gouvernement allemand facilite la tâche de France Telecom qui est empêtré en Allemagne avec Mobil Com ?Ils n’ont peut-être pas choisi le bon partenaire…Vous ne regrettez pas le divorce entre France Telecom et Deutsche Telekom au printemps 1999 ?Cela allait dans le sens de l’histoire.Pourquoi Deutsche Telekom, qui a payé un prix exorbitant pour sa licence UMTS en Allemagne, n’a-t-elle pas postulé pour une licence en France qui vaut, après révision, dix fois moins cher ?C’est un pari trop risqué, et nous préférons faire des paris moins téméraires ailleurs. Pour se lancer dans l’UMTS, il faut avoir une bonne base de clientèle et accepter de réaliser des investissements très lourds.Mais si vous repreniez une société comme Bouygues Telecom, par exemple, vous l’auriez cette clientèle…Ce n’est pas notre priorité du jour. Mais la France est certainement un pays important pour Deutsche Telekom.

(1) Le nom de Siris va bientôt être abandonné au profit de T-Systems.
(2) Deutsche Telekom France n’a pas souhaité divulguer le montant de cette dette étant donné que les résultats de T-Online sont consolidés.
(3) À titre de comparaison, Wanadoo enregistre 3,3 millions d’abonnés en France.
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Odile Benyahia-Kouider*