Du temps du monopole intégral, chacun était plus ou moins conscient que, financièrement, il se faisait avoir avec la facture de France Télécom. Mais les choses étaient claires : France Télécom dépensait en fonction
d’orientations assez politiques, et le client réglait sa facture, comme s’il s’agissait d’une sorte d’impôt ‘ communication ‘.En échange, le pays bénéficiait de belles choses du type téléphone numérique, Minitel gratuit, R&D et aides à la R&D industrielle de l’ordre de 1 Md d’euros par an, avec tous les emplois induits (de l’ordre de
100 000).Aujourd’hui, la société veut toujours nous faire croire qu’elle n’agit que pour notre bien, mais cela passe mal : le système concurrentiel a rendu le consommateur méfiant. Et s’il met son nez dans
l’affaire, il découvre des faits troublants.Le plus troublant est la volonté de la société d’augmenter le prix de l’abonnement de la ligne de l’abonné, même si ce dernier n’utilise avec FT que la partie allant de son domicile au point d’accès.
Le coût de la pose de ces lignes est en effet en général amorti depuis belle lurette et chacun constate que cette partie du réseau ne tombe que très rarement en panne.Le coût mensuel de location de ce bout de ligne physique brute, sans service, devrait donc être au maximum de 1 euro par mois. Mais FT entretient une confusion : lorsqu’il parle de ligne qui lui coûte cher, car
employant de gros moyens informatiques et des dizaines de milliers d’emplois, il parle en fait des services qu’il rend à ceux qui utilisent son réseau pour téléphoner.Il oblige donc chaque client dégroupé de Cegetel ou 9Telecom à payer des services qui ne servent qu’aux clients de FT. Ce qui est particulièrement antipathique.Mais puisque FT nous oblige à réfléchir sur le sujet, allons plus loin : pourquoi ces lignes qui empruntent les voies des villes et des communes resteraient-elles éternellement la propriété de FT après privatisation ? Il
serait logique que les communes installent des tuyaux dans leurs voiries et qu’elles louent leur utilisation à tous les opérateurs intéressés, quels qu’ils soient, pour passer les câbles les mieux adaptés à leurs besoins. Il ne serait
plus alors nécessaire de déranger ART et parlementaires à chaque augmentation de tarif souhaitée par FT !Concernant les mobiles, nous ne reviendrons pas sur le prix des SMS, facturés plus de dix fois leur prix de revient, car les associations de consommateurs se sont emparées de l’affaire. Mais nous avons tout de même une question
iconoclaste : pourquoi les forfaits ne baissent-ils pas puisque les réseaux GSM actuels sont complètement amortis ?Il est clair que Vivendi a besoin des énormes bénéfices de sa filiale SFR pour rembourser sa dette ; mais cela arrange bien FT, qui, numéro 1 oblige, se fait un plaisir d’être encore plus cher que SFR.
Comment payer trois fois pour l’ADSL
Quant à l’ADSL, souvenons-nous : il y a trois ans, avant de devenir officiellement enthousiaste, FT freinait des deux pieds de peur de devoir donner un jour aux concurrents un support pour des services qui concurrenceraient
les siens. Puis il s’est rendu compte que c’était le service idéal pour que les utilisateurs fanas de GSM ne se désabonnent pas de leur ligne fixe, d’autant qu’il y avait moyen d’associer un abonnement (revenu
fixe) au service ADSL.FT a alors annoncé un plan ‘ volontariste ‘ de couverture de la France. Les utilisateurs ont cru que c’était pour leur bien… Puis FT a découvert qu’il y avait possibilité de faire
éventuellement payer deux fois l’ADSL, pour Internet, et pour la télé sur ADSL. Les plans de développement ADSL de FT sont alors devenus encore plus volontaristes.Depuis un an, FT sait enfin qu’il ne va pas pouvoir empêcher l’arrivée du téléphone IP sur ADSL, technologie qui mangera obligatoirement ses revenus traditionnels. Gageons qu’il prépare un plan pour nous faire payer
une troisième fois l’ADSL, au travers d’un abonnement du type ‘ téléphone illimité pour X euros par mois ‘. FT a en effet encore suffisamment de puissance pour presque tout rafler en France en matière de
téléphonie sur IP.Ne croyez pas que l’affaire s’arrête là. Il y a une suite. Dans quelques mois naîtra probablement en France un deuxième Internet, dit Internet+ (nous y reviendrons), proposé également sur ADSL. Mais là, la capacité
technologique de l’ADSL risque de s’essouffler.C’est sans doute la raison pour laquelle Thierry Breton, le P-DG – qui accomplit, pour sa société, un travail remarquable -, a pour la première fois évoqué en début de mois qu’il s’intéressait désormais au
très haut débit (probablement VDSL). Enfin ! Jusqu’alors, sa société estimait que le très haut débit ne pourrait pas servir aux particuliers à moyen terme.* Rédacteur en chef d’ Electronique International HebdoProchaine chronique mardi 30 mars
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