Le ping-pong juridique entre France Télécom et Télé2 continue. Quelques jours après l’annonce de
poursuites à l’encontre de Jean-Louis Constanza, directeur général de Télé2 France, c’est au tour de France Télécom d’être condamné à payer 15 millions d’euros à son rival.Le tribunal de commerce de Paris a épinglé l’opérateur historique pour ses pratiques de reconquête de clients de téléphonie fixe partis à la concurrence, communément appelée
‘ winback ‘.L’opérateur historique subit donc son deuxième revers en un an, devant la même juridiction. En juin 2003, il avait en effet été condamné à verser 7 millions d’euros à neuf telecom pour ‘ concurrence
déloyale ‘. France Télécom avait fait appel de cette décision, le résultat devant être connu en fin d’année.La décision détaillée et écrite du tribunal de commerce de Paris n’a pas encore été transmise aux différentes parties à l’heure actuelle. France Télécom n’a pas été en mesure de communiquer sa ligne de défense, ni de préciser s’il avait
l’intention de faire appel. Dans sa plainte, Télé2 France estimait que France Télécom utilisait des informations liées à la présélection (procédé par lequel un client fait passer tous ses appels par un opérateur sans avoir à composer de préfixe de
numérotation particulier) pour contacter et tenter de récupérer des clients passés à la concurrence, une chose qu’interdit expressément le code des Postes et télécommunications.Olivier Anstett, directeur marketing de Télé2 France, n’hésite pas à qualifier ces pratiques de ‘ système frauduleux ‘
et estime à plus de 100 000 le nombre de clients reconquis de
façon déloyale. Télé2 réclamait à France Télécom une somme de 75 millions d’euros, correspondant, selon lui, au manque à gagner.Constats d’huissier à l’appui, Télé2 avait réussi à prouver en 2002 que les agents commerciaux de France Télécom pouvaient accéder librement à ces informations de présélection. L’opérateur historique l’avait reconnu, mais expliqué que
ses agents n’y avaient pas recours.Saisie par Télé2, l’ART avait mis France Télécom en demeure ‘ de supprimer, dans son système d’information, tout moyen permettant à ses agents commerciaux d’établir un lien entre l’un de ses
clients et des données relatives à la mise en ?”uvre de la présélection ‘. Selon le régulateur, l’opérateur historique s’est exécuté à la suite de cette mise en demeure. L’ART précisait néanmoins demeurer
‘ particulièrement vigilante ‘.
Le ministère de l’Industrie prêt à agir
Chez les opérateurs alternatifs, la suspicion est toujours de mise. ‘ Les informations concernant la présélection ont été retirées du système, mais rien ne nous prouve que France Télécom ne s’en sert plus d’une
façon ou d’une autre, explique l’un d’entre eux. La grande difficulté, c’est de prouver quels sont les fichiers utilisés par France Télécom pour faire du télémarketing ciblé ‘. Ainsi, Cegetel avait vu sa
plainte rejetée en janvier 2003 pour n’avoir pas réussi à prouver que France Télécom avait récupéré des clients de façon abusive. Il réclamait 54 millions d’euros.Le dossier ‘ Winback ‘ n’a pas fini de faire couler de l’encre, puisque la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé une enquête sur ce sujet à la
mi-2002, après avoir été alertée par des consommateurs et saisie par l’Association française des opérateurs de réseaux et services de télécommunications (Aforst).Les conclusions de cette enquête devraient être connues bientôt, et seraient même déjà sur le bureau du ministre délégué à l’Industrie, Patrick Devedjian. Ce dernier a confié à nos confrères de la Lettre télécom des
Echos, qu’il veillera à ce que cette enquête soit suivie dactions concrètes.
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