Née dans la souffrance, la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) de 2004 a au moins le mérite d’être claire : contrairement aux éditeurs de contenu, les hébergeurs de sites Web, considérés comme de simples
prestataires techniques, ne sont pas responsables du contenu qu’ils mettent en ligne. Ils sont juste tenus de réagir ‘ promptement ‘ dès qu’un contenu illicite leur est signalé (incitation à la haine
raciale, diffamation, etc.).Oui mais voilà, en 2004, le Web 2.0 n’existait pas. Et l’avènement des sites communautaires, où n’importe qui peut publier n’importe quoi, a fait vaciller la frontière entre éditeur, hébergeur et même simple internaute. C’est
l’une des conclusions d’un
rapport parlementaire, conduit par les députés Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre) et Corinne Erhel (PS) et présenté officiellement ce mercredi 16 avril 2008.
Celui-ci avait été requis par la Commission des affaires économiques de l’Assemblée, pour faire le point sur l’application de la LCEN.
Protéger les sites collaboratifs
Entre autres mesures, le rapport préconise une nouvelle loi pour s’adapter ‘ à la diversification de l’activité d’hébergeur, en tenant compte ?” par exemple ?” des spécificités de l’activité
d’hébergeur de sites collaboratifs ou de sites de vente aux enchères ‘. Le statut des sites collaboratifs, où les internautes sont les éditeurs des contenus, demande à être clarifié pour servir de base en cas de litige. Bien
que laconique, cette proposition pourrait donc être favorable aux acteurs du Web 2.0.Le rapport dénonce en effet la tendance des tribunaux à considérer comme éditeurs ?” donc comme responsables ?” des hébergeurs de sites, en l’absence de coupables évidents : ‘ le statut
d’hébergeur doit être préservé contre les interprétations jurisprudentielles ‘, prévient le rapport. ‘ Il faut que les sites collaboratifs continuent d’exister ‘, nous a précisé
de vive voix la co-rapporteuse Corinne Erhel. Les récentes affaires judiciaires opposant des célébrités à de ‘ petits ‘ sites 2.0
(Olivier Dahan/Lespipoles.com,
Olivier Martinez/Fuzz.fr, etc.), avec condamnation desdits sites, témoignent de cette problématique. Des condamnations qui
épargnent en revanche les ‘ géants ‘ du collaboratif, comme
Dailymotion ou Wikipedia, plus facilement identifiables comme hébergeurs.
‘ Castrer ‘ Internet ?
En contrepartie, le rapport suggère d’accentuer les obligations qui pèsent sur les hébergeurs. En particulier, celle de ‘ rendre publics les moyens qu’ils consacrent à la lutte contre les activités
illicites ‘, qui prouverait leur bonne foi. Stipulée dans la LCEN ?” au même titre que l’obligation de mettre à disposition un système de signalement de contenu illicite ?”, elle ne serait pas appliquée
selon les rapporteurs. Une autorité administrative comme la Cnil ou l’Arcep pourrait veiller à son respect.Reste à voir si le Gouvernement suivra les préconisations du rapport. Et ce n’est pas gagné : justement en visite aujourd’hui chez Dailymotion, le nouveau secrétaire d’Etat à l’Economie numérique, Eric Besson, a indiqué qu’une
‘ révision de la loi n’est pas dans les tuyaux ‘ et qu’il ne serait pas le ‘ ministre de la castration d’Internet ‘, a rapporté l’AFP.Quant à l’un des principaux concernés,
Dailymotion en l’occurrence,
‘ il n’y a aucune raison de changer la loi. Nous avons eu plusieurs
décisions de justice en notre faveur et notre statut d’hébergeur n’a pas été mis en cause. De plus, nous nous réunissons fréquemment avec les ayants droit pour mettre en place des solutions. Inutile de passer par la loi ‘,
commente Giuseppe de Martino, directeur des affaires juridiques du site de partage de vidéos. Tous les petits sites collaboratifs du Web français n’ont malheureusement pas le même arsenal.
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