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Faut-il réformer le système des numéros d’urgence ?

Le système français des numéros d’urgence a subi sa première panne majeure cette semaine. Ces défauts sont pointés du doigt. Des pistes émergent pour l’améliorer.

Après la grave panne qui a affecté les numéros d’urgence gérés par Orange, un audit de sécurité a été commandé par le gouvernement. En attendant ses conclusions, de nombreux acteurs plaident déjà pour une réforme du système qui apparaît trop vulnérable.

Quelles sont les obligations des opérateurs ?

En plus du numéro européen 112, il existe 12 numéros d’urgence en France. Le 15 (SAMU), 17 (Police ou gendarmerie) ou 18 (Pompiers) sont les plus connus. Les appels d’urgence sont destinés aux services publics chargés de la sauvegarde des vies humaines, des interventions de police, de la lutte contre l’incendie et de l’urgence sociale.

  • Les opérateurs ont pour obligation de prendre en charge gratuitement ces appels.
  • Ils ont aussi des contraintes de qualité de service. L’opérateur « prend toutes les mesures de nature à garantir un accès ininterrompu aux services d’urgence », précise le Code des postes et des communications électroniques.
  • Enfin, ils doivent transmettre aux services d’urgence la localisation des appelants « en fonction des informations et listes transmises par les représentants de l’Etat dans les départements », comme le stipule le même texte. Et c’est là que ça se complique.

Une usine à gaz pour la réception des appels

Quand un utilisateur entre un numéro court, le réseau assure sa traduction en un numéro à dix chiffres qui va prendre en compte la localisation de l’émetteur.

Comme évoqué plus haut, la table de traduction, appelée Plan d’Acheminement des Appels d’Urgence (PDAAU), n’est pas gérée au niveau national, mais départemental. Elle est prise en charge par chaque préfecture. Les opérateurs réceptionnent à un rythme variable des fichiers mis à jour par les préfectures et doivent les traiter manuellement pour vérifier les éventuelles erreurs. Une véritable usine à gaz comme le souligne l’avocat Alex Archambault et ancien collaborateur de l’opérateur Free.

Une technologie RTC obsolète

Orange continue d’héberger une grande partie des numéros d’urgence en RTC (Réseau Téléphonique Commuté). Cela signifie que même les appels vers les numéros d’urgence passés en voix sur IP finissent par être traité par le vieux réseau RTC, plus vulnérable aux interruptions et aux incidents que le réseau IP.
En l’occurrence, ce sont les équipements chargés de basculer les appels en voix par IP (Internet Protocol) vers le RTC qui ont failli dans cette gigantesque panne.

Orange a arrêté de commercialiser de nouvelles lignes analogiques en décembre 2018. Mais l’arrêt du service RTC ne va se faire que très progressivement, par plaque, à partir de 2023.
Toutefois, passer en tout IP ne prémunira pas contre des interruptions de service. Elles seront toujours possibles : congestion du réseau en raison d’un grand nombre d’appels simultanés provoqués par un événement dramatique, attaque informatique, panne électrique et même catastrophe naturelle.

Le poids central d’Orange

Tous les réseaux des opérateurs sont liés inextricablement aux infrastructures d’Orange qui sont centrales en raison de son héritage historique. Ils se retrouvent donc vite affectés lors d’un dysfonctionnement rencontré par Orange.
En 2018, une gigantesque panne d’interconnexion avait touché les abonnés de Bouygues Telecom, Free et SFR lorsqu’ils tentaient de joindre un numéro d’Orange.

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Quelles solutions ?

L’AOTA (Association des opérateurs télécom alternatifs) propose de confier à une « entité commune aux opérateurs » la gestion des numéros d’urgence. Elle appelle aussi de ses vœux le recours à « un numéro d’urgence unique », qui permettrait, comme cela se fait déjà à l’étranger, de procéder « en quelques secondes au basculement vers des solutions de secours en cas de perte d’acheminement ». C’est aussi la position de la Fédération nationale des Sapeurs Pompiers de France qui milite pour le numéro européen 112. Une position que ne partage pas le SAMU.

Mais là encore, un numéro unique n’éviterait pas les incidents. Patrick Hertgen, médecin urgentiste et vice-président de la fédération nationale des pompiers a appelé de manière plus générale, sur BFMTV, à renforcer la résilience du système en soulignant que les appels ne sont désormais plus simplement téléphoniques.
D’où l’idée de parler plutôt de  « communications » d’urgence, tant les sources émettrices se multiplient, allant des SMS aux réseaux sociaux en passant par des messageries.

Une plate-forme unique multicanale financée par l’Etat serait ainsi peut-être la voie la plus prometteuse à étudier.

Sources : Code des postes et des communications électroniques, AOTA,

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Amélie CHARNAY