Les joueurs doivent conserver leur libre arbitre. C’est en ces mots que l’on pourrait résumer l’ensemble du communiqué écrit par Scott Herkelman (PDG du Radeon Technologies Group) et envoyé par AMD à l’ensemble de la presse spécialisée.
Une communication qui, lorsque l’on lit entre les lignes, se réfère explicitement au fait que le concepteur des cartes graphiques Radeon estime être menacé et/ou lésé par le dernier programme commercial pour les marques partenaires mis en place par Nvidia, le GeForce Partner Program. Ce programme fait couler beaucoup d’encre depuis plusieurs semaines car quelques-unes de ses lignes frôleraient l’anti-compétitivité.
Seule alternative d’AMD pour rester dans la course, être visible dans les catalogues et, donc, faire appel à ses partenaires habituels afin de créer des gammes consacrées à ses propres produits.
Asus, premier partenaire pour valser avec AMD
Le premier à ouvrir le bal n’est autre qu’Asus avec sa nouvelle famille de produits AREZ. Celle-ci sera entièrement dédiée aux cartes graphiques AMD. Vingt modèles sont d’ores-et-déjà annoncés, dont seulement deux en RX Vega 56 et 64.
Pas de prix annoncés mais une disponibilité est prévue pour le mois de mai. On remarque que toutes embarquent des systèmes de ventilation personnalisés et qu’il y a donc fort à parier que les composants soient tous vitaminés pour gagner quelques images par seconde de plus par rapport aux modèles “de base”.
Les cartes graphiques pour commencer mais il y a fort à parier que d’autres produits utilisant des technologies gaming AMD – comme les écrans FreeSync par exemple ou des PC portables avec processeurs Ryzen et/ou cartes graphiques Radeon – rejoignent aussi cet écosystème plus tard.
On peut donc imaginer que la marque ROG (Republic of Gamer) d’Asus pourrait –elle- progressivement n’être dédiée qu’aux composants et aux configurations à base de solutions Nvidia. Pourquoi ? Mais pour être éligible au GeForce Partner Program, pardi.
Le GeForce Partner Program fait polémique
Au tout début du mois de mars de cette année, Nvidia postait un message à propos du GeForce Partner Program (GPP) sur son blog officiel. Cette nouvelle initiative commerciale y est décrite comme un moyen d’offrir à ses partenaires des moyens de promouvoir ses créations. Sa devise ? « Permettre aux joueurs d’avoir une vision claire de ce qu’ils achètent, tant en matière de composants que de plate-forme logicielle et avoir tous les bénéfices [de la marque] GeForce ».
Toutefois, selon AMD, ce programme frôle l’anti-compétitivité et ne lui permet pas de travailler en bonne intelligence avec les marques. C’est en tout cas ce que confiaient certains représentants de la marque au site HardOCP (HOCP) il y a quelques semaines.
Des confidences qui ont donné lieu à une enquête de la part de nos confrères journalistes. Pourtant, toujours dans le billet de blog de Nvidia, on peut y lire « le GPP n’est pas exclusif. Nos partenaires peuvent continuer à promouvoir et vendre les produits des autres marques. Ils peuvent rejoindre et quitter le programme quand ils le souhaitent. »
Au cours de leurs investigations, les journalistes de HOCP ont d’abord eu du mal à avoir des informations précises puisque sur toutes les marques sollicitées par leurs soins (sept en tout), aucune n’a souhaité s’exprimer officiellement. Tous les témoignages ou avis recueillis par le site l’ont été sous couvert d’anonymat pour éviter d’éventuelles complications, tant pour eux que pour leur société.
En croisant les informations fournies par ces dites-sources, HOCP aurait par exemple eu confirmation que les fabricants de PC adhérents au GPP profiteraient d’opérations de promotion conjointes (jeux concours sur les réseaux sociaux, double visibilité, etc.), des packs promotionnels (offres de jeux gratuits ou coupon de réduction sur des produits Nvidia) et des réductions portant sur l’achat massif de cartes. Voire des fonds pour des campagnes de publicités par exemple. Jusqu’ici, tout semble presque normal.
Mais, en poussant davantage ses investigations, le site HOCP aurait constaté que Nvidia est bien moins flexible qu’il ne veut le laisser paraître au travers de son billet de blog.
Selon un document que s’est procuré l’un des journalistes du site, les partenaires souhaitant intégrer le GPP se verraient dans l’obligation de composer leur gamme dédiée au gaming « exclusivement avec des cartes ou des solutions Nvidia ». Pour faire simple, si une gamme de produits – ROG dans le cas d’Asus par exemple – propose à la fois des Radeon et des GeForce, celle-ci ne peut prétendre faire partie du GPP. Seule solution, créer une nouvelle gamme de produits, dédiée aux solutions AMD pour continuer à vendre ces dernières sans toutefois être potentiellement lésé oui boudé par Nvidia.
Pas d’adhésion, moins de GPU ?
En outre, au travers des entretiens menés par HOCP, il leur est également apparu que certains partenaires avaient l’impression que ne pas adhérer au GPP pourrait – à moyen ou long terme – les désavantager sur le plan commercial. En effet, Nvidia pourrait très bien décider de leur livrer moins de cartes graphiques ou de puces pour PC portables au motif qu’ils n’ont pas adhéré au GPP. Bien entendu, Nvidia a publiquement réfuté toutes ces accusations.
Nvidia domine le marché, AMD demeure (très) fébrile
De notre point de vue, un tel comportement – voire de telles pratiques – de la part du concepteur vert demeurerait pour le moins étrange. Mais pas inenvisageable. Et si tout cela se vérifiait malgré le démenti, voilà qui ternirait énormément l’image de la marque auprès d’un public qu’elle chérit tant, les joueurs et les passionnées, capables de dépenser des sommes folles pour avoir la meilleure carte ou le meilleur PC à un instant « t ».
Car, aujourd’hui, les GeForce – et par extension, Nvidia – sont clairement en position de force sur le segment des cartes graphiques, tant dans les PC de bureaux que dans les PC portables depuis plus de deux ans maintenant. Des cartes graphiques vertes, c’est bien simple, il y en a partout. Et même lorsque des constructeurs de PC annoncent dans leurs catalogues que des configurations en AMD seront disponibles dans le commerce, on ne les trouve que très rarement en rayon. Sans parler du fait de pouvoir, à notre niveau, les tester.
Il est aussi très clair qu’AMD peine à sortir des solutions compétitives pouvant ébranler le quasi monopole de Nvidia. Les RX Vega pour PC de bureau ne nous ont pas convaincus, tout comme les puces Polaris des Radeon RX 400 qu’AMD recycle et renomme depuis leur sortie, il y a deux ans. Si l’on se fie aux annonces du CES 2018, le concepteur rouge n’a rien prévu de neuf pour cette année encore.
Avec un programme comme le GPP, le concepteur des GeForce tente surement d’asseoir un peu plus sa domination. Ou, d’anticiper très maladroitement le prochain mouvement d’AMD. Il n’en demeure pas moins que si AMD parvenait (enfin ?) à sortir des bons GPU, capables de battre les solutions Nvidia, il ne fait pas l’ombre d’un doute que l’industrie du PC changerait son fusil d’épaule. Il en a presque été toujours ainsi.
A l’heure actuelle, notre sentiment est le suivant : pour qu’AMD continue d’être présent a minima dans les catalogues ou dans les machines, il doit jouer une carte plus qu’usée par ses soins, celle du prix abordable ou cassé. Une puce moins chère permet de créer – in fine – un PC abordable pour une marque. Ou une carte graphique personnalisée à moindre coût.
Mais si la puissance n’y est pas et que, pour quelques euros de plus, opter pour une solution Nvidia est l’assurance d’avoir un PC plus puissant, plus à même d’encaisser les besoins des jeux actuels et futurs, beaucoup de joueurs n’hésiteront surement pas longtemps. GPP ou non.
Sources :
AMD, Asus, Nvidia, Wccftech (1) et (2), HardOCP
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