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Face à OpenAI et Google, la presse française passe à l’attaque

Haro sur nos articles de presse : l’Alliance de la presse d’information générale et le Syndicat des éditeurs de la presse magazine exigent d’être rémunérés pour l’utilisation de leurs contenus par les géants de l’IA. Si les négociations ne commencent pas d’ici la fin du mois de juin, la question pourrait se régler devant les tribunaux.

Pour les géants de l’IA, la fête est-elle en passe d’être finie ? Dans un courrier envoyé à 25 entreprises de l’intelligence artificielle dont OpenAI, Google, Meta mais aussi Mistral, l’Alliance de la presse d’information générale (Apig) et le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) demandent des comptes. Ces deux syndicats, qui réunissent 800 titres de presse et 220 éditeurs, exigent la mise en place de négociations. L’objectif est de « fixer notamment les conditions financières et les modalités techniques de l’utilisation de leurs publications, par les services d’IA générative », écrivent-ils dans un courrier rapporté par La Correspondance de la Presse, et Les Echos, ce vendredi 7 juin.

Ces deux organisations exigent de savoir quels contenus ont été utilisés par les entreprises de l’IA lorsqu’elles ont « entraîné » leurs outils. Il est en effet difficile de savoir quels articles ont pu être « avalés » par les crawlers. Ces robots explorateurs du Web ingurgitent des millions de données sur lesquelles les IA génératives comme ChatGPT ou Bard sont formées, dans la plus grande opacité. Il n’existe jusqu’à présent aucune obligation de transparence sur les données utilisées – ce qui devrait changer avec l’IA Act, le règlement européen sur l’intelligence artificielle. Mais cela ne signifie pas, pour autant, que ces entreprises peuvent librement se servir des données protégées par le droit d’auteur ou les droits voisins qui se trouvent sur le Web, à l’image des articles de presse.

Sans accord signé, pas de récupération et d’utilisation de nos contenus, prévient la presse français

Car si, en droit européen, la directive sur le droit d’auteur de 2019 autorise bien une entreprise à collecter des données sur le Web (ce qu’on appelle l’exception dite du « text and data mining »), cette dernière doit respecter des conditions. La collecte doit se faire seulement à des fins de recherche, et non à des fins commerciales. Et surtout, elle ne peut avoir lieu que si l’auteur n’a pas fait valoir son « opt-out », une sorte de droit de refus. Or, si de nombreux médias l’ont mis en place – une façon pour ces titres de dire : non, je refuse que mes contenus soient utilisés pour entraîner l’IA – difficile de dire si ce « non » est réellement respecté par les géants du secteur.

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Et c’est un point sur lequel les deux organisations insistent : « tant qu’un accord n’a pas été négocié et signé, vous n’êtes pas autorisés à récupérer et à utiliser les contenus (…) pour entraîner une intelligence artificielle (…) ou pour établir ou fiabiliser les réponses de vos outils ».

Les entreprises, qui ont reçu ce courrier le 30 mai dernier, ont un mois pour entrer en négociation. Si rien ne se passe, la presse française « en tire(ra) toutes les conséquences », est-il écrit dans le courrier. Comprenez : des actions judiciaires seront menées. Interrogé par Les Echos, Pierre Pétillault, directeur général de l’Apig, confirme : « on espère des négociations constructives mais on est prêt à aller au procès, s’il le faut ».

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C’est la première fois que ces deux organismes français parlent d’une même voix sur ce sujet. En France, la stratégie des médias face aux entreprises de l’IA était jusqu’à présent disparate. Seul le groupe Le Monde a réussi à négocier un accord avec OpenAI. À l’étranger, les titres qui ont « réussi » à négocier des rémunérations avec des géants du secteur se comptent sur les doigts d’une seule main.

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D’un côté, les entreprises de l’IA ne semblent pas prêtes à mettre la main à la poche et à rémunérer (tous) les ayants droit ou les créateurs de contenus protégés par le droit d’auteur. C’est ce qu’on peut lire dans leurs commentaires envoyés à l’office américain du droit d’auteur l’année dernière. Pour les sociétés du secteur, il serait impossible de développer des ChatGPT sans ces contenus. Ces entreprises s’exprimaient cependant aux États-Unis, où il existe une exception au droit d’auteur du « fair use » qui n’a pas son équivalent en Europe.

De l’autre, les médias de presse français ne parlaient pas jusqu’à présent d’une seule voix – et rien ne semble se profiler au niveau européen pour l’instant. Sur le Vieux continent pourtant, le rapport de force pourrait être différent.

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Dans les colonnes des Échos, les deux syndicats expliquent avoir fait appel à un expert technique, un juriste et un huissier pour voir si l’opt-out était bien respecté. Ces pièces leur permettront de mieux négocier une rémunération pour utilisation non autorisée, quand – ou si – les 25 entreprises concernées accepteront d’ouvrir des discussions à ce sujet.

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Stéphanie Bascou
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