” […] Je suis frappé par la confusion – parfois savamment entretenue – entre logique d’intérêts et logique de valeurs. D’un côté, on nous explique que les industries de l’information et de la communication tirent 30 % de l’économie américaine – logique de l’intérêt – et, bientôt, de l’économie mondiale. De l’autre, on est submergé par un discours de valeurs “gaucho-libertaires ” sur les vertus d’Internet comme symbole d’une nouvelle société fraternelle et de liberté.Prétendre que la Toile peut réconcilier les deux logiques en étant simultanément la condition de la globalisation économique et celle de la communauté internationale me semble relever de l’imposture intellectuelle. […] Il est scandaleux de faire croire aux pays du Sud que s’ils s’équipaient de micro-ordinateurs, s’ils s’agrégeaient le plus vite possible au réseau, ils rattraperaient leur retard. Chacun sait bien que les rapports techniques de communication s’inscrivent dans des rapports sociaux. Bien sûr, les gens du Sud sont capables de se servir des réseaux. Mais lorsqu’ils éteignent leurs ordinateurs à Java, à Johannesburg ou à Cuba, il y a l’eau insalubre, la pauvreté, l’absence d’éducation… […] “(*) Directeur de recherche et directeur du laboratoire communication et politique au CNRS, auteur de l’essai “Internet et après ? “.
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