Un capteur, installé dans le rétroviseur, détecte des gouttes de pluie sur le pare-brise. L’information est transmise, via le réseau interne du véhicule, aux essuie-glaces qui se déclenchent automatiquement. Elle est reprise par un calculateur, qui, par un serrage léger et régulier des mâchoires sur les disques de frein, les maintiendra secs. Cela réduira sensiblement la distance de freinage. Le même renseignement pourrait être envoyé, via internet, au réparateur du véhicule qui vérifiera le niveau du liquide lave-glace et l’usure des freins. En plus, le professionnel pourra, à distance, opérer un diagnostic électronique du véhicule en utilisant une application hébergée chez un prestataire. La liaison pourra être utilisée par le conducteur et les passagers pour échanger des e-mails, s’informer du trafic, télécharger des musiques ou des vidéos, acheter en ligne. C’est tout cela l’e-véhicule.
Les acteurs partagés entre prudence et de méfiance
Un concept de voiture communicante qui provoque l’agitation parmi les intervenants issus de deux univers. D’un côté, celui de l’automobile : constructeurs, équipementiers et garagistes. De l’autre, celui des technologies de l’information : opérateurs télécoms, fournisseurs d’accès à internet, d’applications hébergées, de portails de services et d’informations, éditeurs de logiciels et de systèmes d’exploitation. Face à une demande embryonnaire, les relations entre ces deux milieux restent empreintes de prudence, voire de méfiance.Déjà, l’idée même de connecter la voiture à l’internet choque : “Imaginez si, par exemple, un hacker s’amusait à déclencher à distance les coussins gonflables de sécurité”, s’effraie un expert. Mais Bruno Simon, directeur de projet e-véhicule chez Renault, balaie cette méfiance. Il estime que “tout constructeur doit avoir la maîtrise de l’électronique embarquée dans le véhicule. Ceci afin de sécuriser l’ensemble du produit “. Reste encore à trouver l’équilibre entre faisabilité technique et marché. “Nous voyons les coûts. Pas forcément les revenus. L’automatisation de l’appel d’urgence, en cas de choc, n’est pas une idée vendable. Qui débourserait de l’argent pour ce service alors qu’il paye déjà pour la sécurité routière et la Sécurité sociale ?”, se demande-t-il.Sur le papier, l’idée de vendre des produits et des services en ligne provoque, certes, l’euphorie. Mais l’automobiliste consommateur y répondra-t-il ? Daniel Zamparini, directeur des systèmes d’information de PSA Peugeot-Citroën se montre sceptique : “Le véhicule comme espace de communication, nous y croyons beaucoup. Mais comme lieu de consommation, c’est encore à démontrer.” Il juge irréalistes les études qui estiment que, d’ici à cinq ans, les utilisateurs pourraient réaliser 6 % de leurs dépenses depuis un e-véhicule. “Mais, sait-on jamais ? Tempère-t-il. Nous devons faire en sorte d’être prêts “. A ses yeux, la partie la plus intéressante de cette télématique émergente est le lien technique avec la voiture. Opéré via internet, le diagnostic automobile permettrait d’économiser sur l’équipement individuel des garages réservé à cet effet. PSA Peugeot Citroën et IBM s’apprêtent à l’expérimenter. C’est possible car les véhicules des deux marques sont déjà dotés d’un boîtier de service intelligent. Il regroupe les informations de deux à trois réseaux locaux internes : un pour la mécanique, un ou deux pour la carrosserie et le confort.
Le système d’exploitation embarqué séduit peu
Les équipementiers ?” comme Bosch ou Siemens ?” travaillent sur le réseau moteur. Pour la carrosserie et le confort, ce sont des systèmes spécifiques. Une seule entreprise informatique y travaille depuis 1997 : Microsoft, avec son système d’exploitation embarqué, Windows CE for Automotive. “A l’origine nous voulions installer un PC dans la voiture. Bill Gates a même testé une Citroën Evasion dotée de la sorte. Mais le projet n’a pas abouti, révèle Guillaume Duley, ingénieur grands comptes chez Microsoft. Allégé, Windows CE FA est destiné aux équipementiers. Il fonctionne avec la commande vocale de Lernout & Hauspie. Mais le module internet n’est pas encore développé “. En cause, le manque de débit du GPRS et le retard de l’UMTS. Le système d’exploitation est actuellement utilisé par Clarion, dans son AutoPC qui équipe les Peugeot 607, Citroën Xsara et C5. Siemens VDO l’a aussi mis en ?”uvre dans les BMW haut de gamme (série 7) avec l’i-drive qui utilise une souris en bout d’accoudoir pour en piloter les équipements de confort. C’est peu. Mais Microsoft ne se décourage pas. Il prépare une version spéciale de sa plate-forme X-Box de jeu et de vidéo qui pourra être installée pour divertir les passagers à l’arrière ?” sécurité oblige. L’éditeur prépare aussi une offre, baptisée Car.Net, qui reprend l’architecture.Net, l’identification Passport, des services web, une version Windows XP Embedded, un serveur de messagerie et un navigateur internet.
Chacun cherche à tirer le marché dans son sens
La technologie émerge, certes, mais pour quels services ? Le plus commercialisable, celui de la navigation et ses dérivés, répond à un véritable besoin. Développé par Siemens VDO, enrichi d’une information trafic de Visionaute (groupe France Télécom), le système Carminat, de Renault, semble avoir séduit un certain public (voir encadré Produits et services). En parallèle, Navtech et Télé Atlas développent l’information géographique avec des répertoires (hôtels, restaurants, garages, musées, sites touristiques, etc.). Maporama propose une géolocalisation multimédia. Michelin et sa filiale numérique, Viamichelin, donnent accès aux cartes du Bibendum et aux contenus des Guides Rouge et Vert. L’innovation vient aussi de jeunes sociétés de la communication (Wavecom, Parrot) ou du logiciel (Opteway, Acunia). Enfin Webraska utilise la communication mobile avec la navigation distribuée, de façon à télécharger les cartes les plus récentes avec une information dynamique sur le trafic.Plus ambitieux, d’autres services de commerce sur internet connaissent des destinées moins brillantes. L’échec cuisant du portail internet Egery, lancé en fanfare par les présidents de PSA Peugeot-Citroën et de Vivendi, à l’automne 1999, en témoigne. Motif du divorce : le constructeur se serait rendu compte que son partenaire était surtout intéressé par le fichier clients, qu’il voulait convertir en abonnés mobiles. Chaque partie cherche donc à tirer le marché dans son sens. Or, pour exister, l’e-véhicule a besoin de standards communs.Les équipementiers ?” comme Bosch, Blaupunkt, Alpine ou Siemens VDO ?”, veulent imposer leurs systèmes propriétaires. Avec Clarion, le rouleau compresseur Microsoft est entré dans une brèche. Mais la technologie est versatile. Déjà les experts parlent de connexions avec des réseaux sans fil (Bluetooth ou 802.11), de développements sous Linux, ou d’assistants personnels embarqués. Ces nouveautés risquent de perturber les constructeurs, pour lesquels il deviendra ?” de nouveau ?” urgent dattendre !
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.