Les propositions faites par Google pour remédier aux entraves à la concurrence qui lui sont reprochées par la Commission européenne ne conviennent pas à la plupart des concurrents du géant d’internet, pour qui les remèdes proposés seraient pires que le mal.
Mieux vaut ne rien faire
« La Commission ferait mieux de ne rien faire plutôt que d’accepter ces propositions », car si elle les accepte, cela va graver dans le marbre pendant cinq ans des pratiques qui nuisent à la concurrence, a estimé au cours d’une conférence de presse Thomas Vinje, porte-parole de la coalition FairSearch. FairSearch regroupe plusieurs plaignants comme le site de voyage Tripadvisor ou les comparateurs de prix Twenga ou Foundem. Mais il est surtout largement financé et motivé par Microsoft, géant ébranlé du Net et de la recherche sur le Web.
Consultation sur une pratique anticoncurrentielle
En l’occurrence, Google est soupçonné de biaiser la concurrence sur les marchés de la recherche et de la publicité en ligne en mettant en avant ses propres services au détriment de moteurs de recherches spécialisés, par exemple dans les restaurants ou la géolocalisation.
La Commission a lancé le 25 avril une consultation pour tester auprès de ses concurrents les engagements de Google. Le géant américain propose notamment de labelliser les liens vers ses propres services de recherche spécialisés faisant l’objet d’un traitement préférentiel, par exemple en les entourant d’un cadre, afin que les utilisateurs puissent les distinguer et faire leur choix en toute connaissance de cause.
Publicité déguisée
Mais plusieurs organisations et entreprises du net ayant participé à la consultation ont fait part vendredi de leurs inquiétudes au cours de la conférence de presse organisée par FairSearch, et jugent cette mesure non seulement inefficace, mais contreproductive. En singularisant ses propres résultats par une présentation différente, « Google s’offre une belle bannière publicitaire », a souligné Moritz von Merveldt, du groupe de médias audiovisuels allemand ProSiebenSat1. En faisant cela, Google « ne fait rien d’autre que sa propre publicité », a-t-il insisté.
« L’utilisateur normal (du web) est attiré par ce qui est le plus gros et le plus visible sur la page », a renchéri Michael Weber, patron de Hot Maps, une entreprise qui propose des cartes et plans interactifs en ligne.
Ne pas pénaliser les services tiers
Les remèdes proposés par Google concernent aussi d’autres sources de préoccupation de la Commission européenne, notamment concernant l’utilisation par Google de contenu de sites appartenant à des tiers, y compris des médias, sans leur autorisation. Pour y remédier, le moteur de recherche propose d’offrir à tous les sites web la possibilité de refuser l’utilisation de leur contenu dans ses propres services spécialisés, tout en s’engageant à ne pas pénaliser ces sites par un mauvais classement dans ses résultats de recherches générales.
Durcir le ton
Mais plusieurs participants à la conférence de presse de mardi ont également fait part de leurs inquiétudes à ce sujet. Ils ont été rejoints par plusieurs dizaines d’éditeurs européens de presse en ligne, qui appellent à ce qu’« aucun contenu d’éditeurs de presse (journaux et magazines) ne soit utilisé par Google au-delà de ce qui est strictement nécessaire (…) sans leur consentement préalable ». Ils sont également inquiets du fait que les propositions de remèdes de Google concernent par exemple Google.fr pour la France ou Google.de pour l’Allemagne, mais pas Google.com, pourtant très utilisé par les internautes européens, ou encore Google Chrome ou Voice Search.
« Si Google ne fait pas très vite de nouvelles propositions fondamentalement améliorées, nous appelons la Commission à utiliser tout l’arsenal légal qu’elle a à sa disposition, y compris sous la forme d’une communication des griefs assortie de remèdes effectifs », écrivent les éditeurs de presse européens dans leur communiqué.
Rendez-vous à l’automne
La consultation doit se terminer jeudi et la Commission s’appuiera sur ses résultats pour décider si elle peut, comme elle le souhaite, clore le dossier « après les vacances d’été ». Le commissaire européen chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia, a cependant indiqué fin mai qu’il demanderait « vraisemblablement » à Google « d’améliorer encore ses propositions ».
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