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En 2006, le spam s’est doté d’une image de pro

L’envoi de spams coûterait en France près de 1,5 milliard d’euros par an. Un quart est désormais constitué de ‘ spams-images ‘ qui échappent aux filtres antispam.

Le spam va-t-il tuer l’e-mail ? Ce qui pourrait se traduire en bon français par ‘ le pourriel aura-t-il la peau du courriel ? ‘. La question est récurrente. Mais elle a pris en
2006 une tournure encore plus inquiétante. Selon Secuserve, fournisseur de services de sécurisation des courriels, le nombre de spams a presque doublé entre décembre 2005 et décembre 2006. En France, 95 % des messages échangés aujourd’hui
seraient des spams. C’est-à-dire des messages non sollicités qui, au mieux, viennent polluer nos boîtes aux lettres électroniques et, au pire, nous proposent de nous soulager de quelques dizaines d’euros (ou de dollars, c’est selon). S’il est le
plus souvent indolore pour l’utilisateur final, qui n’y voit que le temps qu’il perd à nettoyer sa messagerie, le phénomène ‘ spam ‘ a un impact économique réel. Selon la Commission européenne, il représenterait pour la
France un manque à gagner annuel de 1,4 milliard d’euros.Il faut dire que pour préserver leurs très lucratives activités, les spammeurs ne reculent devant rien. Dernière trouvaille : le spam-image, qui représente désormais 25 % du total. Un procédé bête comme chou qui consiste à
expédier non plus un pourriel traditionnel (composé de texte et de liens hypertexte), mais une image contenant un message (publicité pour du vrai-faux viagra…), qui passe entre les mailles du filtre antispam des messageries. Les outils de
détection ont bien essayé de s’adapter en associant à chaque spam-image une sorte d’empreinte digitale permettant de les identifier. Mais les spammeurs ont facilement trouvé la parade : modifier les propriétés de l’image, la couleur, la taille,
etc. ‘ Il suffit parfois de modifier quelques pixels dans le corps d’une image et le tour est joué ‘, explique Bruno Rasle, expert informatique et co-auteur du livre Halte aux
spams.

Le spam, un eldorado mafieux

Au niveau juridique, si, en France et en Europe, la législation semble adaptée, ce qui frappe le plus, c’est l’apathie des internautes. Comme s’il s’agissait d’un phénomène normal. ‘ Aujourd’hui, personne ne porte
plainte, car les spams étant souvent d’origine étrangère, les gens sont conscients qu’il y a peu de chance que tout cela aboutisse,
détaille Bruno Rasle. Mais il existe un espoir, notamment en droit français, si l’on adopte le
principe des
class actions [c’est-à-dire d’une action en justice commune à plusieurs centaines ou milliers de plaignants, NDLR].
Aux Etats-Unis, il arrive désormais que des spammeurs
soient condamnés à plusieurs années de prison. Un risque qu’ils sont prêts à prendre au vu des revenus (plusieurs centaines de milliers de dollars par mois) que le spam peut générer.
‘ On assiste également à une criminalisation du phénomène, explique Bruno Rasle. C’est la fin des spammeurs artisans. Ceux?”ci sont vite repérés par des spammeurs beaucoup plus importants qui leur
proposent de les prendre sous leur aile, moyennant un partage des revenus. C’est une sorte de méthode Tupperware, appliquée aux spams ‘.
Mais une autre évolution du spam est encore plus préoccupante. ‘ On constate que les mafias italienne et russe investissent dans la constitution de réseaux de PC zombies (des machines infectées par un virus qui
servent de relais à l’expédition des spams). Une tendance qui traduit le rapprochement de deux mondes, celui des spammeurs et celui des créateurs de virus ‘.
A chaque fois, la cible est la même : des ordinateurs mal
protégés et un public de primo-accédants à l’informatique.

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Philippe Crouzillacq