01net. : Comment interpréter les mouvements de Bourse à l’échelle mondiale ? Est-ce un krach ou une correction ?
Elie Cohen : Quand le Nasdaq perd 25 % en une semaine, c’est l’équivalent d’un krach rampant. Et si l’on ne parle pas d’un krach, on peut parler d’une forte correction.Quelles en sont les causes ?Les causes sont évidentes. Elles tiennent au délire des évaluations des valeurs Internet. Depuis plusieurs mois, il est évident qu’on a perdu de vue les critères permettant d’évaluer l’activité d’une entreprise : le PER, c’est-à-dire le rapport entre le cours boursier et les bénéfices ; la rentabilité, etc. A cela s’ajoutent des comportements grégaires : quand la tendance est à la hausse, les investisseurs suivent, même s’ils savent que c’est déraisonnable. Tout le monde a suivi le même mouvement, jusqu’à l’étincelle qui a fait exploser le tout. La seule question était de savoir quand la correction interviendrait. C’est l’annonce, le 8 mars, de l’absence de compromis entre la justice américaine et Microsoft qui a mis le feu aux poudres. A cela s’ajoutent les pronostics alarmistes d’Abby Cohen, de Goldman Sachs, sur les valeurs technologiques.Les titres de la nouvelle économie vont-ils retrouver leur vraie valeur par rapport à l’économie traditionnelle ? Leur heure de gloire est-elle passée ? La semaine dernière, on a assisté à un massacre des valeurs de la nouvelle économie au profit des valeurs traditionnelles. La sélection des valeurs est en train de s’opérer. Les valeurs du B-to-C et du B-to-B chutent. Mais ce qui est nouveau, c’est que les valeurs stars, comme Cisco ou Intel, suivent le mouvement. Toutes sont surévaluées. Il y aura donc inévitablement une correction, plus ou moins forte, selon le poids réel des acteurs. Mais, depuis vendredi, la correction dépasse le seul cadre de la nouvelle économie. Elle touche à la macro-économie classique. Les observateurs se demandent si l’économie américaine est arrivée à la fin d’un cycle de neuf ans et demi de croissance, si l’on s’oriente vers une reprise de l’inflation [aux Etats-Unis, Ndlr] et si l’on va assister à une hausse des taux d’intérêts. Mais la situation économique ne justifie pas cette correction.Est-ce la fin de l’âge d’or des start-up et du capital-risque ?On est passé de l’inexistence à la débauche de capital-risque investi sur des projets peu mûrs. Les 1000 projets“me too “, c’est-à-dire copiés sur les Etats-Unis risquent de se planter. La hiérarchie des valeurs qu’on observe aux Etats-Unis se retrouvera en France : les brasseurs, les routeurs ?” Cisco… ?”, les portails qui ont réussi à établir leur autorité ?” comme Yahoo! et AOL ?” et les sites ayant un positionnement original ?” eBay, eTrade… ?” resteront au-dessus du panier. Les valeurs liées au B-to-B aussi. La réorganisation de la fonction achat dans les entreprises ne va pas sarrêter en si bon chemin, mais dans les sites de B-to-C, la réorganisation a déjà commencé. Témoin, le rachat de Peapod, une épicerie en ligne américaine, acquise par le néerlandais Koninklijke Ahold.
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