CitizenFour. CitoyenQuatre, si on devait traduire. C’est sous ce nom qu’un « employé gouvernemental expérimenté » a communiqué pendant plusieurs mois avec Laura Poitras. Laura Poitras est la documentariste qui a partagé le prix Pulitzer 2014 avec Glenn Greenwald qu’elle a accompagné à Hong Kong au printemps 2013. Et CitizenFour, c’est évidemment Edward Snowden. CitizenFour, c’est également le titre du film qu’elle a réalisé sur l’épopée qui a mené aux révélations du whistleblower américain.
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Deux informations d’importance
Ce documentaire de 114 minutes sortira sur les écrans américains le 24 octobre prochain, si tout se passe bien. Au fil des nombreux points qu’il aborde, il confirme un point important. Il existe une autre source, haut placée dans les services de renseignement américain, autre qu’Edward Snowden. C’est un détail essentiel puisqu’il confirme certaines rumeurs et analyses, notamment celles de Glenn Greenwald. Cela montre également que le jeune analyste n’est pas le seul à avoir voulu faire connaître la vérité.
Ensuite, on y apprend que la petite amie d’Edward Snowden l’a rejoint en juillet dernier pour s’installer en Russie à ses côtés. Anecdote d’une vie d’exilé forcé, qui a son intérêt toutefois. Car elle détonne avec l’image qu’on se fait habituellement du sonneur d’alarme banni. Un homme esseulé, abandonné de tous, coupé du monde et condamné au malheur. En l’occurrence, sans qu’Edward Snowden n’ait choisi de vivre à Moscou, et s’il indique qu’effectivement, il aimerait pouvoir revenir aux Etats-Unis, pour y avoir un procès juste au cours duquel il pourrait exprimer son point de vue et le défendre, sa vie ne semble pas si déprimante que cela, finalement. Pas si coupé du monde, non plus, puisqu’il intervient dans le débat qu’il a lancé et donne régulièrement des interviews.
Le devoir de préserver sa vie privée
Récemment Edward Snowden a d’ailleurs répondu à de nombreuses questions lors d’une interview en direct organisée par le New Yorker. C’est dans ce cadre qu’il est revenu sur la nécessité d’une réforme législative et également sur le besoin des citoyens à revendiquer leur droit. Pour lui la position du « je n’ai rien à cacher » n’est pas viable. « Quand vous dites : ’’Je n’ai rien à cacher’’, vous dites ’’Je me moque de ce droit’’. Vous dites ’’Je n’ai pas ce droit, parce que j’en suis arrivé au point où il me faut le justifier’’. Alors que la façon dont fonctionne le droit fait que le gouvernement doit justifier son intrusion dans vos droits. »
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Des services à éviter, des principes à suivre
Au-delà de cette position de principe, les utilisateurs grand public – monsieur et madame Tout-le-monde – doivent cesser d’utiliser des outils qui sont « nuisibles à la vie privée ». La première chose à faire est d’adopter des solutions logicielles chiffrées. Car « le chiffrement renforce votre droit à un niveau technique », explique-t-il. Il fait en sorte que vos communications soient protégées où qu’elles transitent.
Il faut ensuite abandonner tous les logiciels qui sont « hostiles à la vie privée, comme par exemple Dropbox. Abandonnez Dropbox », encourage-t-il. « Même chose pour les entreprises comme Facebook ou Google. Elles font des efforts pour améliorer la sécurité de leurs programmes et deviennent meilleures qu’elles ne l’ont été mais elles ne sont toujours pas sûres. », lâche-t-il. « Ce sont des services dangereux ».
Le grand public doit faire des efforts au quotidien pour assurer le respect de sa vie privée. Pour envoyer des SMS, « utilisez des programmes comme Redphone, ou SilentCircle […]., répète-t-il inlassablement. Ce sont des exemples types de produits gratuits meilleurs que les programmes installés par défaut sur votre téléphone. Et ils sont plus sûrs ».
Edward Snowden a également profité de cette longue interview, plus d’une heure, pour rappeler que les forces de l’ordre et les autorités américaines ne devraient pas se plaindre du renforcement de la sécurité des services destinés au grand public. A termes, un tel comportement risque de faire perdre des millions de dollars aux Etats-Unis, commente-t-il, rappelant que ce sont des emplois qui sont finalement en jeu.
D’autant que ce discours est hypocrite, car, quel que soit le système de chiffrement, il est toujours possible, avec les bons outils et un mandat légal d’obtenir la clé qui permet de déchiffrer les contenus protégés. Une manière de montrer que les motivations des agences américaines ne sont peut-être pas la lutte contre les criminels mais plutôt la surveillance de la population.
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Source :
The New Yorker
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