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Droit et internet commencent à faire bon ménag

Nom de domaine, contenu illicite ou paiement défaillant. Autant de problèmes d’ordre juridique qui peuvent freiner l’essor d’une entreprise sur le net. Mais les garde-fous existent aujourd’hui.

Internet, terre de liberté où tous les coups sont permis. Une époque bientôt finie pour le réseau. Nom de domaine, propriété et responsabilité du contenu, droit sur l’information, confidentialité, détournement des paiements… Peu à peu, chacun des points d’achoppement trouvent leur solution, le vide juridique se comble. Des lois spécifiques font leur apparition dans chaque pays, et les tribunaux n’hésitent plus à appliquer aux nouvelles technologies les textes déjà en vigueur sur la vente par correspondance ou les droits d’auteur.Des ennuis juridiques qui peuvent survenir avant même qu’une entreprise apparaisse sur le réseau. Altavista l’a vécu dans l’hexagone. “ Le lancement du site français était prévu pour le 15 février 2000, raconte Pierre Paperon, directeur Europe d’Altavista. Or, lorsque nous avons voulu déposer le nom de domaine en novembre 1999, Altavista. fr était déjà déposé. Un premier procès pour récupérer notre nom a été gagné devant le tribunal de commerce, mais le jugement n’était pas exécutoire à la date prévue du lancement. Nous avons donc demandé un référé devant le tribunal de grande instance. Et devant la menace de poursuites pénales, le propriétaire illégitime nous a restitué le nom, quarante-huit heures avant l’ordonnance de référé “.

Nom de domaine: deux logiques en conflit

Altavista a eu de la chance. La société a pu prouver la mauvaise foi du déposant, qui, étant français, a reculé devant de possibles sanctions pénales. Mais ce n’est pas toujours le cas. Thalès, ex-Thomson-CSF, a dû se rabattre sur le nom de domaine thalesgroup. com, faute d’avoir vérifié que thales. fr, . com ou . net étaient disponibles. En effet, à la différence du nom commercial ou de la marque, le nom de domaine est attribué à la première personne en ayant fait la demande, quelle que soit son activité. La leçon est claire : toute entreprise doit protéger les noms de domaine qu’elle souhaite utiliser, ou dont elle pense avoir besoin un jour. Et, bien entendu, surveiller et acheter les noms sur les nouvelles extensions qui apparaissent. A l’inverse, il faut aussi systématiquement déposer une marque équivalant à un nom de domaine, pense Emmanuel Gougé, avocat au cabinet Bird & Bird. “Il vaut donc mieux choisir les classes de produits les plus larges. La jurisprudence française est stable dans ce domaine. Le droit des marques prime sur le nom de domaine, de même que le nom patronymique ou le nom commercial. En ce qui concerne l’international, deux logiques entrent en conflit : sur internet, n’importe quel site est accessible mondialement, alors que le droit des marques est territorial, au niveau français ou européen. Il y a encore peu de décisions à ce sujet, mais les critères tiennent au public auquel le site est destiné, à la langue utilisée, aux produits et aux services proposés.”Autre sujet de confrontation entre un site internet et le droit, le contenu. A condition d’en être propriétaire ! En effet, si le contrat ne le précise pas, les créations artistiques et les développements technologiques appartiennent aux prestataires, et non au commanditaire. Sinon, ce dernier n’en possède qu’un droit d’usage non exclusif, et il n’a donc aucun moyen de défense si un concurrent monte un site quasi identique. De plus, même si toute l’infrastructure appartient à une entreprise, celle-ci rencontrera peut-être des problèmes en matière de droits d’auteur. Et ce même si elle utilise l’?”uvre intellectuelle d’autrui, y compris celle de ses salariés, sans avoir au préalable négocié de cession des droits spécifiques à un usage sur internet.

Un contenu respectant les lois en vigueur

Propriétaire, la société est res-ponsable civilement et pénalement de tout le contenu de son site. Concrètement, cela signifie que tout le contenu du site doit être filtré pour n’enfreindre ni les différentes législations commerciales ni le droit de la presse. Pour Frédéric Altenburger, juriste à iBazar, cette obligation de surveillance du site est une obligation de moyens. “Ce n’est pas parce qu’une annonce ne plaît pas qu’on doit la supprimer. Il faut pour en arriver là que son contenu soit illicite ou contraire à notre charte. En cas de doute – une diffamation ou une contrefaçon, par exemple -, notre entreprise n’a pas le droit de s’ériger en juge.”Une démarche qui n’est pas réservée aux seuls sites de vente aux enchères ou de petites annonces. Toutes les entreprises internet sont concernées dès lors qu’elles ouvrent un espace de discussion aux internautes (chat, forums de discussion, services de messagerie, albums photo, etc. ). Une solution existe : proposer une charte du site. L’internaute saura ainsi ce qu’il peut faire et dire. Cette charte devrait se moduler et s’adapter aux versions locales et aux lois en vigueur dans chaque pays. Elle informera également l’utilisateur des conditions commerciales et de la façon dont seront utilisées les données privatives. A ce titre, en France, tout site web susceptible de recueillir des informations sur ses visiteurs doit obligatoirement être déclaré à la Cnil (Commission nationale informatique et libertés). La loi de 1970 incite le webmestre à préciser toutes les bases de données nominatives réalisées (questionnaires, fichiers clients, etc. ) et à donner un droit d’accès aux informations personnelles figurant dans les fichiers.

La loi sur la VPC couvre le commerce électronique

De même, le site a une obligation de sécurité envers ses visiteurs en garantissant que les tiers ne peuvent accéder à des données sensibles, tel le numéro de carte bancaire. Mais c’est dans le domaine de la vente que les problèmes juridiques liés au paiement sont le plus présents. De nombreux systèmes électroniques garantissent la sécurité de la transaction – Télécommerce, Payline, Paybox, ou Cyber-Comm, par exemple. Il est également possible d’effectuer des règlements par chèque ou par mandat. En fait, hormis les réticences instinctives, les risques réels pèsent davantage sur le commerçant que sur l’acheteur. En effet, comme pour toute vente à distance, le consommateur garde la possibilité de retourner – sans justification et contre remboursement – le produit acheté dans les sept jours ouvrables qui suivent la livraison. De plus, comme le paiement sur internet n’est que rarement validé par le code secret, le porteur de la carte peut contester et exiger un remboursement de la part du vendeur. Des litiges courants et couverts par la loi sur la vente par correspondance. Il en va de même pour les recours sur le courtage en ligne, portant sur la réalité ou les délais de passation d’ordres en Bourse, déjà encadrés par des textes existants.

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téphanie Chaptal