Le secteur des semi-conducteurs, ces composants indispensables de nos smartphones, serveurs IA et voitures, est bien dans le collimateur de Donald Trump. Le président américain a non seulement durci les règles envers la Chine, mais ses déclarations précédentes de taxes supplémentaires sur les puces électroniques commencent à prendre forme. De quoi inquiéter de nombreuses entreprises américaines, mais aussi européennes.
Le 1er avril dernier, une enquête officielle a été ouverte par l’administration américaine, visant à faire le point sur l’importation des puces électroniques dans le pays, et sur leur chaîne d’approvisionnement. Si les puces sont conçues généralement aux États-Unis, comme chez Nvidia, le leader du secteur, elles sont ensuite fabriquées en Asie chez Samsung, SK Hynix (Corée du sud) et surtout chez TSMC, à Taïwan, d’où sortent la majorité des semi-conducteurs aujourd’hui.
Or, selon une note publiée le 16 avril dans le Registre fédéral américain, et repérée par Contexte, jeudi 17 avril, Washington veut, dans cette enquête, analyser les effets sur la sécurité nationale des importations de « semi-conducteurs, d’équipements de fabrication de semi-conducteurs et de leurs produits dérivés ».
Une enquête pour fixer de nouveaux droits de douane ?
Les conclusions de cette investigation seraient utilisées pour fixer de nouveaux droits de douane sur l’industrie des puces, rapporte le Washington Post. La menace de taxes du secteur est donc de plus en plus palpable. Ce marché, qui échappait jusqu’à présent aux « droits de douane réciproques », pourrait donc bien essuyer une tempête Trump. Ces dernières semaines pourtant, le président américain avait exempté les puces et les produits électroniques de ses droits de douane. Mais le milliardaire était ensuite revenu sur cette exception, en prévenant, le 13 mars dernier, que des taxes sectorielles seraient finalement annoncées, dans les semaines à venir.
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Pour Donald Trump, l’objectif est simple : la menace de taxes supplémentaires sur les puces électroniques importées aux États-Unis devrait inciter les entreprises du secteur à relocaliser des usines dans le pays. L’idée est de « rapatrier » la fabrication de semi-conducteurs dans le pays – un objectif difficilement atteignable pour de nombreux experts, au vu de la chaîne de fabrication des semi-conducteurs, aujourd’hui morcelée, complexe et mondialisée.
Mais si les droits de douane sont réellement appliqués, ils devraient être répercutés sur les prix des semi-conducteurs arrivant d’Asie – une augmentation à laquelle devra faire face l’industrie américaine, qui importe massivement ces composants. Au risque de voir le prix final de très nombreux produits (smartphones, ordinateurs, voitures…) augmenté dans le pays, et dans le monde.
Les H20 de Nvidia ne peuvent plus être achetés par la Chine
À côté de la question des droits de douane, Donald Trump a, dans le même temps, durci les règles relatives aux exportations de puces vers la Chine, dans la continuité de la politique initiée par Joe Biden depuis octobre 2022. La nouvelle a mis à mal plusieurs entreprises américaines.
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Mardi 15 avril, le ministère américain du Commerce a annoncé qu’il émettait de nouvelles exigences en matière de licences d’exportation, cette fois pour des puces destinées au marché chinois, à savoir, les H20 du géant américain Nvidia, les MI308 d’AMD – Advanced Micro Devices, un autre fabricant de semi-conducteurs américain – ainsi que leurs équivalents.
Mercredi 16 avril, Nvidia a confirmé dans un document financier, que l’administration lui avait bien interdit d’exporter ses H20 en Chine. Ces puces avaient pourtant été conçues pour se conformer aux précédentes restrictions à l’exportation, imposées par Joe Biden depuis 2022. L’opération devrait lui coûter près de 5,5 milliards de dollars, a indiqué l’entreprise. Chez AMD, son rival, même son de cloche. L’entreprise américaine a déclaré dans un rapport déposé mercredi que ces nouvelles restrictions lui feraient perdre près de 800 millions de dollars.
Conséquence, plusieurs entreprises du secteur ont vu leurs actions baisser, à l’image de la première concernée, Nvidia, dont 13 % de ses revenus proviennent de Chine, selon CFRA Research, cité par Axios. Pour l’un de ses analystes, cette nouvelle restriction pourrait, au lieu d’asphyxier la Chine, « renforcer les concurrents chinois nationaux, en particulier Huawei », qui produit désormais des puces équivalentes.
Le système de licences de Joe Biden poursuivi ou arrêté ?
Les prochaines semaines devraient être décisives : tout le secteur attend de voir à quelle sauce il sera finalement mangé. Pour ASML, le fabricant néerlandais d’équipements pour semi-conducteurs, « les récentes annonces de droits de douane accroissent l’incertitude (…) ».
D’autant que l’administration américaine a jusqu’au 15 mai, pour décider de poursuivre ou pas le système mis en place par Joe Biden en janvier 2025. L’ancien président américain avait imposé au monde entier, avant de quitter la Maison-Blanche, des contrôles et des limites à l’achat de semi-conducteurs destinés à l’intelligence artificielle, toujours dans le but d’entraver le développement technologique de la Chine.
S’il est mis en œuvre, seul un petit groupe d’alliés des États-Unis sera autorisé à acheter autant de puces qu’il le souhaite. Tous les autres (y compris des pays européens) seront désormais soumis à des quotas. Certains ne pourront tout simplement plus acheter de semi-conducteurs destinés à l’IA.
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La Chine a riposté aux droits de douane déjà annoncés en limitant les exportations des terres rares, utilisées dans tous les produits de la tech (moteurs, serveurs, smartphones…).
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