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Distribution : le trouble jeu de HP

Le constructeur reprend en direct 100 grands comptes français. Il supprime les ” marges arrière ” aux revendeurs et leur propose de se rémunérer davantage sur la vente d’accessoires.

Aux indices qui laissent présager que HP France s’apprête à renforcer son activité de vente directe, Frédéric Dussart, DG de la division PSG, réplique d’emblée : “Nos distributeurs n’ont pas de raison de s’inquiéter.”
Mais l’ensemble du réseau de distribution reste dans le flou. Jusqu’ici aucune annonce n’est venue donner un éclairage à la nouvelle politique de distribution française du constructeur. Cela fait pourtant plusieurs mois que HP étudie la refonte de ses conditions commerciales. Il s’agit d’une adaptation du programme PartnerOne annoncé récemment aux États-Unis par Carly Fiorina.“HP doit réaliser plus de ventes en direct, car nos clients nous le demandent. Certains ne sont plus prêts à payer des intégrateurs. Pour autant, le réseau de distribution reste indispensable dans notre stratégie”, a déclaré le PDG de HP au quotidien américain en ligne, CRN.

La mise en place d’un modèle de distribution hybride inquiète

Ce n’est pas la première fois que HP s’essaie à la vente directe. Le constructeur a déjà ouvert, aux États-Unis, une boutique en ligne, HP Store, à destination du grand public. En France, les entreprises pouvaient déjà acheter directement par téléphone. Cette fois, HP met la barre plus haut en s’attaquant au marché professionnel, et précisément aux très grands comptes.Le point qui soulève le plus d’inquiétude, notamment chez les chaînistes, est l’annonce de la mise en place d’un modèle de distribution hybride. HP étend à une centaine de grands comptes sélectionnés ce qu’il faisait déjà avec une vingtaine d’entre eux.“Nous traiterons en direct, ou dans les conditions du direct, une liste de grands comptes choisis en fonction de leur maturité face à la vente directe : leurs habitudes d’achats et leur capacité logistique”, ajoute Frédéric Dussart.En clair, il s’agit de récupérer les comptes collaborant déjà avec Dell. Par ” conditions du direct “, HP entend négocier directement avec ses clients les tarifs et les pourcentages de marges accordés aux partenaires logistiques et intégrateurs. Mais ces derniers voient du coup la négociation leur échapper.En guise de compensation, HP proposera à ses intégrateurs Téléweb, un centre d’appels chargé, entre autre, de les informer des promotions et des projets de clients potentiels. Mais ce service, dont les contours restent encore à définir, est également une structure de télévente destinée aux grands comptes. Le flou persiste, car les chaînistes sont informés au compte-gouttes des intentions réelles du constructeur.“HP nous a envoyé des courriers pour nous prévenir que les conditions commerciales allaient changer. Nous savons déjà que les délais de paiement seront raccourcis : ils passent de 30 jours à 15 jours”, révèle Denis Garnier, PDG de Computacenter France.

” Tous les constructeurs veulent copier le modèle de Dell… “

Mais la vraie surprise est encore toute fraîche : HP France souhaite en finir avec le système de rétribution par ” marges arrière “. Une douche froide avec une petite contrepartie, les chaînistes pourront se rémunérer davantage sur les accessoires. “Nous voulons transformer le modèle économique et valoriser les ventes additionnelles, écrans, claviers et mémoires, par de meilleures marges”, explique Frédéric Dussart.Bien sûr, aucun des chaînistes interrogés ne s’estime officiellement menacé par les ambitions de HP, qui n’a ni les moyens d’un Dell, ni la possibilité de tourner du jour au lendemain le dos à son modèle de distribution à trois niveaux (grossistes, revendeurs, et clients finaux).“Tous les constructeurs veulent copier le modèle de Dell, mais ils n’ont ni la logistique, ni les équipes adaptées. S’ils ont constitué un réseau de distributeurs, c’est qu’ils étaient conscients de leur incapacité à gérer l’ensemble des problèmes posés par la distribution directe. De toute façon, la rentabilité de Dell ne s’est jamais faite sur le modèle en lui-même, mais sur la logistique”, analyse Georges Saliège, gérant du réseau Aredia, qui réalise 60 % de son CA avec le matériel HP.Même son de cloche ou presque chez Econocom, dont 70 % du CA est lié à HP. “À la suite de la fusion, nous nous attendions à des conditions commerciales moins avantageuses. À nous de justifier nos tarifs par notre valeur ajoutée, qu’il s’agisse d’intégration des logiciels, de déploiement ou de maintenance. De toute façon, HP ne pourra pas se passer de nous”, se rassure Didier Bertho, DG d’Econocom.Les revendeurs ne sont évidemment pas dupes, et restent vigilants. “Par rapport aux États-Unis, HP France a pris du retard. Et si le message concernant la vente directe n’est pas aussi clair, c’est peut-être parce que le réseau de distribution français est ici plus fort qu’ailleurs”, suggère Denis Garnier.

Le BTO pour les grossistes

Le constructeur n’entend cependant pas se battre sur tous les fronts. Sur un marché des PME qui représente près de 50 % de son chiffre d’affaires, HP veut jouer la carte de la transparence.“Nous devons associer nos revendeurs à cette phase de restructuration”, précise Frédéric Dussart. Pour présenter son nouveau programme, Select Express, à ses 9 000 revendeurs PME, HP organise un tour de France qui débutera en octobre et fera halte dans huit grandes villes. Le constructeur souhaite également renforcer ses relations avec ses grossistes.“Nous allons leur fournir les outils du direct, c’est-à-dire des configurateurs leur permettant de proposer du BTO”, ajoute Frédéric Dussart. Ce programme de fabrication de PC à la demande est testé en pilote par Actebis-DSM. Il sera ensuite étendu aux autres grossistes, ETC-Métrologie, Ingram Micro et Tech Data.Sans assumer ouvertement ses intentions en matière de vente directe, HP France change bel et bien les règles du jeu. Un seul objectif semble désormais guider la stratégie du constructeur : le volume.

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Virginie Hofman et Armelle Siccat (Décision Distribution)