Digg vient de renaître de ses cendres. Les geeks qui fréquentaient déjà Internet en 2005 ne peuvent que se rappeler de ce site d’actualités communautaires, entièrement généré par ses utilisateurs : ils publiaient des liens qu’ils estimaient intéressants, qu’ils soumettaient alors au vote de la communauté. Les liens qui réunissaient le plus de votes (les fameux Digg) étaient alors placés en Une du site.
Ce modèle d’avant Facebook et Twitter a marché… un temps. A la belle époque, entre 2006 et 2007, Digg était The place to be pour tous les accros à l’info, les surfeurs invétérés et ceux qui souhaitaient savoir tout avant tout le monde. Digg était tellement populaire qu’il a même engendré une expression, le Digg Effect : quand une page montait en Une de Digg, il était fréquent qu’elle devienne inaccessible devant la masse incroyable de requêtes des internautes qui souhaitaient la consulter. Le succès de Digg fit vite des envieux et de nombreux Digg-like virent bientôt le jour, dont Scoopeo, un temps populaire parmi les francophones.
D’ailleurs, le succès de Digg était tellement alléchant que de très gros poissons s’y intéressaient : en 2008, Google – rien que ça – approcha l’équipe pour tenter de racheter le site. 200 millions de dollars étaient en jeu, mais l’entreprise capota.
Le début de la fin ? Toujours est-il que ce pionnier n’a ensuite fait que péricliter. L’émergence de Facebook et surtout de Twitter, dès 2007, ont transformé Digg en véritable dinosaure des médias sociaux en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Aux côtés du bouton « Digg » sur une page Web, on trouvait désormais le « J’aime » et rapidement les internautes ont fait leur choix. En 2010, le lancement de la quatrième version de Digg, bourrée de bugs et de fonctions ennuyeuses, acheva définitivement le site, qui depuis n’a fait que vivoter.
Un site racheté pour 500 000 dollars
Juillet 2012 : le site a tellement perdu de sa valeur qu’il est vendu à Betaworks, une entreprise spécialisée dans le financement de start-up, pour presque rien : 500 000 dollars, une paille pour la Silicon Valley. Betaworks prend alors un pari osé : repasser en mode start-up et relancer le site de zéro en six semaines, après un brain storming intense et un appel à la communauté d’internautes restés fans. Le résultat de ce hard reset vient donc de débarquer sur la Toile.
Le principe de Digg n’a pas fondamentalement changé même si le site est méconnaissable : formaté comme un vrai journal, il propose un design épuré et une véritable mise en avant des photos. L’ancêtre des médias communautaires a cependant plié devant la puissance des réseaux sociaux rois : désormais, vos Diggs s’ajoutent à votre journal Facebook ou se tweetent. Mobilité oblige, Digg a aussi ses applications mobiles, pour iOS comme pour Android.
Betaworks a donc tout changé, tout recommencé. « La vieille infrastructure de Digg était chère et ne nous offrait que peu de latitude pour innover et développer rapidement. Quand nous avons acheté Digg, nous avons eu comme objectif agressif de basculer vers une nouvelle infrastructure en six semaines. C’est un effort intensif mais cela vaut le coup. On recommence avec une base de code tout frais. C’est moderne, rapide, brillant et nouveau », explique l’entreprise. Attention toutefois : si cette v1 marche correctement, elle est encore un peu boguée, parfois difficile d’accès et ne dispose pas de toutes les fonctions que l’équipe voudrait implémenter au final, comme une API et un système de commentaires par exemple.
Reste à savoir si ce reboot suffira à regagner une audience perdue. Cela reste à prouver, car la chose est rare sur Internet. Prenons par exemple le cas de Delicious, vétéran des réseaux sociaux, abandonné par Yahoo! après son rachat, puis revendu en septembre 2011 aux fondateurs de YouTube : malgré une relance similaire – moins ambitieuse, tout de même –, Delicious n’est jamais parvenu à retrouver sa gloire d’antan. Internet est, tout simplement, passé à autre chose, à d’autres moyens de partage. Espérons que Digg ne connaisse pas le même sort…
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