Ce n’est pas tous les jours que l’on parle de jeux en ligne massivement multijoueurs à l’Assemblée nationale. Mercredi 19 novembre, deux députés UMP ont présenté à la presse, au Palais-Bourbon, un rapport sur la cyberdépendance
traitant essentiellement de l’addiction à ces plates-formes. Arlette Grosskost, élue du Haut-Rhin, et Paul Jeanneteau, député du Maine-et-Loire, ont été alertés à l’origine par l’association Le Cap, qui avait lancé
l’opération ‘ Dix Jours sans écran ‘ à Strasbourg.Mi-mai, ils se lançaient dans une série d’auditions et de rencontres avec des associations, des psychologues, des psychiatres, des spécialistes de l’addiction, afin de dresser un état des lieux de cette
dépendance d’un nouveau genre, qui peut
entraîner une hospitalisation, et formuler des propositions pour lutter contre elle.Ils se sont particulièrement intéressés aux jeux massivement multijoueurs, World of Warcraft et consorts, en raison du principe même de ceux-ci. ‘ Plus vous pratiquez, plus vous accédez à une
certaine reconnaissance par les autres et plus vous entrez dans un cercle sans fin, car se sont des jeux qui n’ont pas de fin ‘, explique Paul Jeanneteau. Autant d’éléments qui peuvent river pendant des heures un joueur
à son écran, jusqu’à le désocialiser.‘ Loin de nous l’idée de stigmatiser les jeux et les jeunes. La moyenne d’âge des joueurs [de jeux vidéo en général, et non seulement en ligne, NDLR] est d’ailleurs de 38 ans. L’enjeu est
de savoir quand et comment se déclare ce type d’addiction ‘, précise Arlette Grosskost.A la suite des auditions, les députés avancent une estimation de 600 000 à 800 000 personnes concernées par la cyberdépendance (1), dont 10 % consulteraient un spécialiste. Mais, comme il reste un certain flou,
leur première préconisation concerne la nécessité d’une ‘ vraie étude épidémiologique, pour avoir des chiffres fiables ‘.
Messages d’avertissement et volet sanitaire
Plusieurs mécanismes pour réguler le temps de jeu sont ensuite envisagés. Première étape, basique : une campagne de sensibilisation à l’intention des parents, pour leur rappeler leur rôle.Ensuite, Arlette Grosskost et Paul Jeanneteau suggèrent aux industriels d’afficher à l’écran, pendant le jeu, une horloge, de placer des messages sur les emballages des jeux vidéo, de provoquer l’envoi automatique régulier de messages
d’avertissement sur le temps de jeu.Autres pistes : créer un personnage virtuel qui apparaîtrait après un certain temps pour inviter le joueur à faire une pause, et faire en sorte que l’avatar du joueur se fatigue avec le temps et devienne moins performant pendant une
même session. Les deux députés plaident pour un code de bonne conduite approuvé par les industriels et les pouvoirs publics, qui reprendrait ce genre de dispositions.Un volet sanitaire est également conseillé. Il s’agirait de développer la recherche sur cette dépendance, de mettre en place un numéro de téléphone spécial pour ceux qui ont besoin de se confier sur le sujet, de former les personnels
écoutants de ce genre de services ainsi que ceux des centres de soins en addictologie. ‘ La cyberdépendance est un phénomène clinique émergent ‘, note Arlette Grosskost.Les deux députés ambitionnent d’intégrer certaines de ces mesures à deux lois à venir. Dans le projet de loi sur
l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent en ligne, ils souhaitent un volet sur le jeu vidéo sur Internet.
Le ministre du Budget, Eric Woerth, doit présenter le texte en décembre. Plus à la marge, le projet de loi Hôpital Patient Santé Territoire pourrait aussi accueillir quelques articles généraux sur la cyberdépendance. Le texte a été présenté le
22 octobre en Conseil des ministres par Roselyne Bachelot.(1) Estimation effectuée en considérant que, selon des spécialistes, 3 à 4 % des 20 millions de joueurs en France peuvent présenter des addictions.
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