Le changement fait toujours réagir, certains voudront faire machine arrière – peu en l’occurrence – tandis que d’autres trouveront à redire sur la nouvelle voie empruntée. Le 10 juin dernier, Apple a dévoilé le très attendu iOS 7 et sa nouvelle interface simplifiée, épurée et composée d’aplats de couleurs vives, presque trop. Si la fraîcheur est au rendez-vous, si le dépoussiérage est réel, la déclinaison cupertinienne des interfaces plates ne séduit pas tout le monde.
Déception et contre-propositions
Les designers de tous niveaux et de tous horizons sont nombreux à partager en ligne leur vision d’iOS 7. Ainsi, Louie Mantia, designer reconnu dans la Silicon Valley, qui est notamment le créateur des icônes des applications Starbucks, iBooks, et autre TapTap Revenge a soumis au monde sa vision des icônes pour le nouvel OS mobile d’Apple, presque un an après avoir proposé sa version de celles d’iOS 6.
Pour prendre la mesure de cette déconvenue, de cette déception, nous avons interviewé Mohamed Kerroudj, jeune designer belge spécialisé dans la conception d’interface utilisateur pour mobile, tablette et pour le Web, qui a créé le buzz ces derniers mois, avec des vidéos de concept d’iOS 7.
Des concepts pour lesquels il a eu des retours officieux de salariés d’Apple enthousiasmés. Des concepts qui ont, en tout cas, frappé suffisamment juste pour ressembler sur certains points à ce qu’Apple développait de son côté. On pense notamment à ce glissement du doigt vers le haut qui dégage un panneau de contrôle pour accéder au Bluetooth, au mode Ne pas déranger, etc.
Complexité visuelle
Amoureux de « design ascétique, minimaliste », Mohamed Kerroudj a forcément un petit faible pour Apple, qui a porté ces valeurs au plus haut, ce qui explique sans doute qu’il ait parfois la dent dure… Car, il est lui aussi déçu par le renouveau proposé par iOS 7.
Et les problèmes commencent pour lui dès le premier contact. « Le lock screen est visuellement sympa. » Mais il souffre d’information visuelle « parasite », de détails malvenus qui complexifient l’expérience. « L’utilisateur veut déverrouiller l’écran en le glissant vers le haut, à cause de la flèche [qui sert en fait à faire apparaître le panneau de contrôle, NDLR]. Du coup, tu ne sais pas trop comment déverrouiller ton écran ». Vers le haut ? A droite ? A gauche ?
Sa première arrivée sur la page d’accueil l’a laissé sans voix : « Il n’y a pas de mot », lâche-t-il un brin dramatique. « Je ne sais pas ce qu’ils ont foutu », continue-t-il avant de marquer un petit silence.
Le cas des icônes
Pour tout dire, au départ lors de la keynote de présentation, il a cru à une blague et que la vraie interface serait présentée ensuite, plus tard. « C’est quoi ces icônes ? », s’interroge-t-il ? « Elles ont été faites à l’arrache », juge-t-il, avant de commencer à argumenter.
« Certaines icônes sont bonnes, mais d’autres, comme celle des Réglages, sont trop complexes. Une roue dans une roue avec du gris sur du gris ». Une finition inégale donc ? Un soin du détail dont toutes les icônes et les différents pans de l’interface n’ont pas bénéficié de manière égale ? « D’un point de vue visuel, ce n’est pas une bêta, c’est une alpha. Ca manque de cohérence. », condamne-t-il.
Il fait là référence à un reproche souvent fait à cette nouvelle interface, celui d’un manque d’unité entre les icônes. Il suffit de regarder l’icône Appareil photo et celle des photos, placées côte à côte. La première grise et sans charme est « moche », la seconde est bien plus réussie, presque solaire.
Perte de structure
Paradoxalement, au sein des applications, c’est le blanc gris qui domine et qui fait qu’on distingue moins leurs interfaces d’un coup d’œil. Mohamed Kerroudj cite alors Notes qui perd son fond jaune en même temps que le skeuomorphisme disparaît.
Le skeuomorphisme qui était « structuré, c’est ce qui faisait ma force d’Apple » et rendait lisible son interface en adoptant des icônes et parfois des fonds d’application qui reproduisent le plus fidèlement possible la réalité. « Avec iOS, Apple fait dans le super design, choisit un autre chemin, mais s’est égaré », analyse-t-il, avançant que la vision du design à plat d’Apple souffre de ne pas avoir été assez construite, lisible.
A l’image de la police fine, qu’il apprécie pourtant, mais qui nuit parfois à la reconnaissance des applications ou à la navigation dans l’interface. La faute notamment au choix des couleurs – « il aurait fallu choisir quelque chose de plus doux et jouer sur les détails » – et à trop de blanc qui « éblouit et fait un peu mal aux yeux ».
Le bon choix du design à plat
Pour autant, pour lui, « le design à plat, popularisé par Microsoft devrait bien vieillir », la question n’est donc plus de faire machine arrière. « Ce qui manque à Apple c’est de produire un design cohérent [pour son système d’exploitation, NDLR], qui ne donne pas l’impression d’être inachevé. La version finale devra être épurée », conclut-il. Tous les espoirs sont encore possibles d’ici là.
iOS 7 Concept (partie 2) from Kerroudj on Vimeo.
Un nouveau concept
Et, en attendant l’automne, Mohammed Kerroudj devrait sortir un quatrième concept, plus complet cette fois-ci, qui comprendra une interface générale revue et des interfaces retravaillées pour quelques applications. Le projet est à l’état de simple idée à l’heure actuelle, mais il pourrait associer son travail et celui d’un autre jeune designer belge, Alexis Jossart. Sur le site de créations graphiques Behance, on peut découvrir son travail sous son pseudo MCase. Plus proche de ce que propose Microsoft visuellement parlant, sa création se fait plus minimaliste avec des couleurs moins agressives. Un nouveau concept pour inspirer Apple ?
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