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Des réseaux sociaux comme outils : de l’addiction à l’addition (2/5)

Facebook, Twitter et tous les autres réseaux sociaux « mainstream » sont de véritables nids à information qui peuvent servir aussi bien à la surveillance légitime qu’à divers abus, voire à des guerres qui ne disent pas leur nom?

Avec ses 850 millions d’usagers, le plus gros des réseaux sociaux, Facebook, brasse une masse de données à faire pâlir d’envie les sociologues, statisticiens et économistes en tous genres, et présente des opportunités uniques – par la richesse et l’ampleur de son échantillon – tant pour l’étude des dynamiques sociales que dans d’autres domaines émergents plus abstraits.

A ces usages globalement vertueux et légitimes viennent s’ajouter d’autres usages « indirects », comme celui de la surveillance des suspects dans le cadre d’une démarche judiciaire. Les coûts facturés par les opérateurs (gratuits dans le cas de Facebook) aux autorités pour divulguer des informations dans le cadre d’une instruction sont au plus bas, et la collaboration plus intense que jamais. Facebook possède une équipe de 25 employés permanents affectés à cette seule tâche de liaison avec les autorités.

Le réseau social comme outil d’abus et de coercition

La propension des usagers à oublier les règles élémentaires de la prudence et à diffuser des informations potentiellement dommageables n’a pas échappé aux criminels qui, à condition de parvenir à pénétrer le cercle d’une victime, accèdent souvent à des informations très « utiles », permettant tantôt de cambrioler, tantôt, dans les cas extrêmes, de kidnapper ou d’exercer des pressions.

Mais même si vous avez la prudence de n’accepter que des amis proches et que vous êtes sûr de leurs identités, vous pourriez vous retrouver en butte à un nombre croissant de pratiques plus que douteuses dans les domaines de l’éducation et de l’emploi. Entre autres incidents, on notera ces universités et ces administrations (comme l’administration pénitentiaire américaine) qui demandaient le mot de passe Facebook des candidats, avant que l’Union américaine pour les Libertés Civiles (ACLU) ne les contraigne à adopter une approche plus « modérée », en faisant compulser le contenu du compte Facebook au candidat en présence d’un agent de recrutement.

Malgré l’illégalité de ces pratiques, la plupart des personnes concernées semblent s’y plier tant bien que mal. A quand le candidat évincé parce qu’il n’a pas de compte Facebook et ne peut ainsi montrer patte blanche ?


Le social computing et la sécurité du territoire, l’un des nombreux ouvrages (publics ou confidentiels) traitant de l’exploitation des réseaux sociaux sous l’angle sécuritaire.

Le réseau social comme champ de bataille

Outre les petites guéguerres personnelles, idéologiques et autres « flame wars » qui se manifestent fatalement dès qu’une masse critique d’internautes se trouve rassemblée et sans lesquelles, il faut l’avouer, tout réseau social perdrait de son charme, les réseaux sociaux, en premier lieu Facebook, sont également le lieu de conflits bien réels.

Témoin de ces actes d’infiltration de malfaiteurs chinois, ces invasions de « socialbots », ces actes d’espionnage dont ont été victimes des militaires de l’OTAN trop crédules, les manipulations politiques et les campagnes de propagande en tout genre… La difficulté à sécuriser un réseau de l’ampleur de Facebook – démontrée par maintes attaques d’hackers – donc son incapacité à garantir la protection des énormes volumes d’informations collectées, mérite également d’être pesée.

Comme l’ont prouvé plusieurs divulgations et fuites émanant de sources comme Wikileaks, mais aussi de documents déclassifiés, plusieurs outils facilitant l’infiltration, la gestion d’identité multiples, etc. sont utilisés tant par les pouvoirs publics que des sociétés privées engagées dans la « guerre de l’information » ou « guerre électronique », la dernière obsession du Pentagone. Une guerre invisible pour la plupart des utilisateurs, mais qui n’en agite pas moins profondément les entrailles des réseaux sur lesquels nous passons tous plus ou moins de temps.

Vous n’êtes pas sur Facebook, et pourtant si

Facebook suit à la trace la navigation de ses membres, qu’ils soient ou non connectés au site. Suffit-il alors de ne pas utiliser Facebook pour échapper à son œil inquisiteur ? Rien de moins sûr ! Selon une plainte déposée par l’Autrichien Max Schems, Facebook prélèverait de nombreuses informations lui permettant de réaliser un « shadow profiling », construisant un profil « fantôme » correspondant aux activités des non-membres, identifiés par leur adresse IP, et parfois de manière nominale grâce au partage – consenti ou non – des carnets d’adresse de téléphone mobile des usagers, par exemple. Le petit bouton « J’aime », devenu un outil promotionnel indispensable adopté – serait-ce à contrecœur – par la quasi-totalité des sites, agit dans les faits comme un mouchard et transmet à Facebook des informations sur chaque visiteur, enregistré ou non. Même la moins sociale des activités – le surf solitaire – n’échappe pas à la captation de la vie privée.

Lisez le premier volet de cette série d’article : Réseaux sociaux : de l’addiction à l’addition (1/5)

Dès demain, retrouvez la suite de notre petit feuilleton noir.

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Nathan Sommelier