Une machine unique réunissant bases de données d’entreprise, applications traditionnelles, serveurs d’applications et serveurs web. C’est ainsi qu’IBM voit et propose ses grands systèmes, en particulier depuis la sortie de ses zSeries en octobre dernier.Alors, tactique pour éviter la fin de ses environnements ou véritable argumentaire ? Nés en 1964, les grands systèmes d’IBM possèdent des qualités qui en font indiscutablement les serveurs les plus sophistiqués du marché. Fiabilité, puissance, évolutivité, disponibilité, capacité à gérer de fortes montées en charge prévisibles ou non, etc. , sont toujours au rendez-vous. “Personne d’autre n’arrive à un tel niveau de débit d’entrées/sorties”, explique, par exemple, Patrick Dagorne, directeur de l’activité grands systèmes pour Amdahl Europe du Sud.Comme leurs prédécesseurs S/390, les zSeries s’appuient sur une architecture multiprocesseur symétrique (SMP). Mais chaque module SMP compte désormais jusqu’à vingt processeurs 64 bits. De un à trois d’entre eux demeurant affectés à la gestion des entrées/sorties, déchargeant ainsi les moteurs principaux. Un quatrième processeur sert de secours pour ces trois-là.
Des qualités techniques certaines
Par ailleurs, l’environnement de clustering Parallel Sysplex autorise l’exploitation de grappe composée de trente-deux de ces armoires au maximum, soit une machine culminant à 640 processeurs. Enfin, z/OS, successeur du système d’exploitation S/390, autorise l’exécution sur chaque serveur physique de quinze partitions logiques, qui sont autant de serveurs virtuels. Ces derniers exécuteront un des environnements IBM (z/OS, z/VM, S/390, VM, etc. ) ou Linux.Ce matériel accepte désormais en premier niveau les versions de Suse et de Redhat du système libre (déjà en 31 bits sur S/390 et dans le courant de l’année en 64 bits sur zSeries). Ces partitions se situent bien entendu au c?”ur de la stratégie e-mainframe d’IBM, puisqu’elles concrétisent la possibilité d’exécuter concurremment et sur une même machine des applications différentes dans des environnements différents (applications maison S/390, SGBD sur z/OS, Apache ou Samba sous Linux, par exemple) et de les faire dialoguer à la vitesse du bus interne.Pour des performances encore plus importantes, les partitions se voient allouer un certain nombre de processeurs, mais un mécanisme de répartition de charge autorise une réallocation entre plusieurs d’entre elles, par exemple. Si le serveur détecte une saturation sur un des serveurs virtuels, il peut lui attribuer une partie de la puissance exploitée par une autre partition moins consommatrice au même moment.Mieux encore, IBM rendra disponible le mécanisme Hiper Sockets (High Performance Sockets) qui assurera un lien TCP/IP virtuel de mémoire à mémoire entre les instances systèmes z/OS et Linux pour zSeries.
Le coût des licences toujours en question
Malgré ces qualités techniques incontestables, les S/390 et leurs successeurs, les zSeries, ne séduisent pourtant pas en tant que e-mainframe. “Sur mon secteur, celui de la finance – qui, historiquement, compte nombre de grands systèmes, ndlr -, nous ne rencontrons pas la solution “tout-grand système”, confirme ainsi Alain Denigot, senior manager chez Unilog Management.
La configuration la plus courante pour l’e-business comprend la plupart du temps un environnement Gcos de Bull ou MVS d’IBM avec les applications cobol des années soixante-dix ou quatre-vingt et les applications internet sur un ou deux serveurs Unix.”C’est le cas, par exemple, dans le groupe Natexis Banques Populaires. “Et lorsque nos besoins changeront, ajoute Luc Jarny, directeur système d’information et logistique, si je dois étudier une solution du type serveur grand système unique, j’en regarderai avec circonspection le coût global.”Car s’il est un argument en défaveur de l’achat ou de l’utilisation d’un grand système sur lequel les directeurs informatiques tombent tous d’accord, c’est bien son coût.“Les Mips reviennent très chers”, résume tout simplement Dominique Fantinato, directeur informatique de la Casden Banque Populaire. “Les prix des environnements MVS sont exorbitants“, renchérit Jean-François Bourgeois, directeur informatique de la Fnac. Bien sûr, comme le rappelle Eric Auvray, vice-président de la division serveurs et stockage IBM France, “il est possible d’acquérir un S/390 modèle Multiprise 50 Mips pour 400 000 F”.Cependant, pour des configurations de taille raisonnable, les montants se mesurent plus souvent en millions, voire en dizaines de millions de francs. “Et il ne faut pas oublier le coût des licences”, ajoute Alain Poussereau, directeur du schéma directeur de la Cnav (Caisse nationale d’assurance vieillesse).En effet, plus que le matériel, c’est bien souvent la tarification du logiciel qui freine les décisions d’achat. Et ce, même si IBM a révisé sa politique de licence afin qu’un utilisateur ne paie plus un logiciel en fonction de la puissance de sa machine, mais bel et bien de la puissance utilisée par l’applicatif (voir encadré page 5).
“L’exploitation de ces environnements représente aussi un coût important, note encore Alain Denigot. Les contrats se chiffrent en millions de francs annuels, auxquels il faut ajouter les outils système, les outils d’administration et le personnel, un poste beaucoup plus lourd que sous Unix.” Difficile, en effet, d’envisager de se lancer dans quelque projet grand système sans posséder les compétences idoines. Or, plus encore qu’ailleurs, elles y sont particulièrement rares.
Le système Linux est arrivé un peu tard
Bien sûr, il pourrait exister un véritable avantage à conserver ses applicatifs existants en l’état sur leur serveur d’origine et donc à ne pas devoir tout redévelopper. “Mais, poursuit Alain Denigot, intégrer au e-business – c’est-à-dire alléger et rajeunir des programmes, qui, dans le meilleur des cas, datent des années quatre-vingt – s’avère complexe. Plus de 90% de mes clients les redéveloppent de toute façon. Sans oublier que, inexorablement, de plus en plus, d’applications quittent les grands systèmes pour être remplacées par des progiciels sous Unix.”Qui plus est, en ce qui concerne le développement de la partie web du projet, les offres de développement sur S/390 et la possibilité d’exécuter Linux pour héberger des sites sont arrivées un peu tard. La plupart des projets e-business en entreprise avaient démarré depuis déjà plusieurs mois. “Notre grand système est en infogérance chez Altaïr, la filiale informatique du groupe Banques Populaires auquel nous appartenons, souligne ainsi Dominique Fantinato, directeur informatique de Casden Banque Populaire. Et nous avons choisi de nous rallier aux options déjà prises sur les autres projets internet du groupe, à savoir WebSphere et DB2 UDB d’IBM. Or, quand nous avons lancé notre propre projet, WebSphere n’existait pas encore pour S/390.”Même situation à la Coface. “Nos projets ont été lancés avant l’annonce d’IBM, insiste le directeur des systèmes d’information, Jacques Romand. Et il n’est plus question de revenir en arrière.”
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