Deux à trois ans après être entrés dans le monde du travail, quatre jeunes diplômés font le bilan. Derrière les désillusions, des parcours bien maîtrisés.
Tellement semblables ; tellement différents. Et, finalement, tellement représentatifs. Tous ont en commun d’avoir pu jouer une bonne partition : celle d’un secteur porteur. Pourtant, à l’heure de poser les premiers jalons de leur carrière, aucun n’a utilisé les mêmes notes ni composé la même mélodie. Deux d’entre eux évaluent pour la première fois le chemin parcouru. Anne Vix n’aspirait qu’à une chose : l’avant-vente. La dynamique du marché permet de changer aisément d’emploi et de diversifier ainsi ses expériences. C’est le chemin qu’elle a utilisé. Une voie mouvante qui ne vaut que si elle est sous-tendue par un solide fil directeur. Le sien : la maîtrise technique. Avant de trouver son bonheur chez un utilisateur, Angel Barro a dû, pour sa part, laisser derrière lui quelques illusions : quand bien même le secteur serait en état d’urgence, un titre ne peut se conquérir sans expérience ; le prestige de certaines grandes entreprises rime parfois avec mirage. Deux autres témoins s’étaient déjà livrés dans nos colonnes (01 Informatique n?’1539, du 16 avril 1999) . Ils étaient alors à une période charnière. Céline Tamalet, la chimiste, venait d’entamer un virage professionnel à 180 degrés. Elle était de ceux venus tenter leur chance à la faveur de la pénurie. Essai transformé. Quant à Slimane Merzouk, qui avait rapporté dans ses bagages californiens des rêves et des recettes de créateur d’entreprise, il a mené son projet à bonne fin
Slimane Merzouk, fondateur de Neoxy : ” La création d’entreprise à l’américaine “ C ertains cèdent aux sirènes de la Silicon Valley et s’expatrient. D’autres en reviennent avec le meilleur de cette culture. Slimane Merzouk est de ceux-là. ” J’ai attrapé le virus de la création d’entreprise aux Etats-Unis. Les gens y avaient un tel dynamisme… “ Mais il a aussi rapporté dans ses bagages les antidotes aux virus qui contaminent les projets de création d’entreprise dans l’Hexagone. En vrac : ” Les Américains sont les plus forts. Si j’échoue, j’aurai l’air d’un looser. Si je réussis, j’aurai honte d’en être fier. “ Autant de considérations balayées par l’expérience californienne. ” Les compétences françaises sont reconnues et appréciées. Les initiatives américaines ne sont pas toujours couronnées de succès. Un échec n’est pas un drame. “ Mettant en pratique ces enseignements, il monte son entreprise dans la plus grande sérénité. Son idée avait pris forme il y a un an autour des logiciels graphiques 3D. Elle s’est enrichie, entre-temps, de la dimension Internet. De quoi faire du tourisme virtuel ou du commerce électronique en 3D. ” Il ne faut pas avoir l’impression de se trahir en changeant son idée. C’est aussi une leçon américaine. “
Angel Barro, administrateur de bases de données au ministère des Affaires étrangères : ” Les grandes SSII : beaucoup de promesses… “ S on option conception et gestion de projets audiovisuel, médias et télécoms à l’INT devait faire d’entrée d’Angel Barro un chef de projet junior. Les premiers entretiens lui ôtent ses illusions. ” Les entreprises recherchent d’abord l’expérience technique. “ Où nourrir un solide apprentissage technique, sinon dans une grande SSII, pense-t-il. Le voilà chez Cap Gemini Telecom France. La technique est au rendez-vous. ” C’est un gros projet à l’international ; techniquement difficile, donc enrichissant. “ Mais les promesses tardent à se concrétiser. ” Le fait est qu’elles étaient assez floues. “ Les griefs se multiplient. ” En un an et demi, j’ai bénéficié de seulement trois jours de formation. “ Quant au salaire : ” La rémunération à partie variable est un handicap pour les jeunes diplômés. Chefs de projet et chefs d’équipe peuvent chiffrer leurs objectifs en connaissance de cause. Mais les jeunes diplômés, sans points de repère, doivent faire confiance. Or, les délais sont souvent irréalistes. Surtout sans formation. “ Il change une nouvelle fois son fusil d’épaule. Un concours d’attaché des systèmes d’information et de communication le mène à un poste d’administrateur de bases de données au ministère des Affaires étrangères. ” L’informatique du ministère est en pleine modernisation. En six mois, j’ai déjà bénéficié de trois semaines de formation. Le côté financier ? ” Ce n’est pas une priorité. “ Il préfère tabler sur des perspectives d’expatriation.
Anne Vix, ingénieur avant-vente dans une start up : ” Mon parcours m’a menée où je voulais aller “ L a technique est difficile à maîtriser sans expérience du terrain. C’est par là que je voulais débuter. “ Anne Vix se donnera donc la technique comme fil rouge avant de parvenir à ses fins : l’avant-vente. A l’heure du premier emploi, elle cherche un poste dans les réseaux. Fraîchement diplômée de l’INT (Institut national des télécoms), elle entre chez Thomson Facilities Management comme ingénieur réseaux. L’équipe compte dix personnes : ” Retour d’expérience et pragmatisme assurés. “ Plus une petite touche de machisme. ” Mais, pour un premier poste, cela blinde. “ Au bout d’un an et demi, l’envie de bouger la prend. ” Je maîtrisais bien mon réseau, et je ne voyais pas de réelles perspectives d’évolution. “ Elle prospecte via les anciens de son école en visant une entreprise à taille humaine. Ce sera la société de services réseaux Nomea, dont elle intègre la division conseil en réseaux et télécoms. Elle découvre opérateurs et grands comptes. Mais l’idée de l’avant-vente la taraude toujours. Pourquoi pas chez un constructeur réseaux ? Finalement, grâce à ses relations, elle est approchée par une start up en passe de création, dédiée aux réseaux et à la voix sur IP. ” Je serai l’un des premiers ingénieurs avant-vente. “ De son parcours, elle ne regrette rien. ” Il m’a menée où je voulais aller. “ Avec, au bout du fil rouge, l’excitation de l’aventure.
Céline Tamalet, administrateur systèmes chez Teamlog : ” Informaticienne à 100 % “ O n efface tout. On recommence. “ Céline Tamalet est rompue à l’exercice. En 1998, elle laisse de côté son DEA de chimie moléculaire et les petits boulots sans lendemain. Un contrat de qualification dans la société de crédit Cetelem doit la mener sur la voie porteuse de l’informatique. Reconversion réussie. On lui confie un poste d’analyste-programmeur. Mais, à peine dans la place, son ami est nommé à Grenoble. Tous deux sont grenoblois d’origine. Elle prospecte dans la région en se sachant un petit handicap : ” Cobol et grands systèmes se pratiquent peu en province. “ Mais elle n’est pas du genre à battre en retraite devant les obstacles. ” Après tout, quand on a compris l’architecture grands systèmes et un langage… “ De plus, elle a eu l’occasion de découvrir SQL. Lors d’un entretien au sein de la SSII Teamlog, on lui reconna”tra cet atout. On prendra aussi en compte sa formation. ” Tu es une scientifique, tu apprendras facilement “ , s’entend-elle dire par son futur chef de service. Le 1er août 1999, elle rejoint les rangs de Teamlog. Exit le développement. Elle devient administrateur systèmes. ” Je me sens informaticienne à 100 %. Je n’ai rien à envier à ceux qui ont suivi deux ou trois ans d’études informatiques. “ Son avenir ? ” Le développement me passionne. J’aimerais y retourner. “ Aucun doute : c’est désormais une véritable informaticienne.
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