En quarante ans d’existence, les SSII avaient rarement vu une telle déferlante : en quelques mois, le raz de marée des start up a, petit à petit, emporté leurs meilleurs consultants. Et elles ont assisté impuissantes à cette fuite de compétences. Rien ne pouvait arrêter ces professionnels en quête d’aventure. Ni l’argent ni les belles promesses de carrière. “C’était la panique, car il n’y avait tout simplement rien à faire ! “, se souviennent les directions des ressources humaines, unanimes.Depuis l’été dernier, les SSII dites ” traditionnelles ” – élevées dans la pure tradition des prestations de services informatiques en régie, au forfait ou en infogérance – soufflent enfin. L’hémorragie s’est calmée brutalement. Comme par enchantement. Quelques échecs retentissants et mini-krachs boursiers ont suffi à calmer les ardeurs des ingénieurs. Reste que, entre-temps, et sous la pression de quelques autres phénomènes, dont les trente-cinq heures et les évolutions culturelles globales dans le pays, les SSII ont peaufiné de nouvelles armes pour attirer et retenir les collaborateurs, sources de tout chiffre d’affaires dans ce secteur.Le salaire n’est plus qu’un composant parmi d’autres dans un package de rémunération qui inclut depuis longtemps déjà les primes sur objectifs et primes individuelles, mais aussi tout un ensemble d’avantages plus récents. Difficile, alors, d’évaluer précisément sa rémunération, et davantage encore de la comparer à une autre proposition. Ces packages se caractérisent en effet fréquemment par leur complexité. Sans compter qu’une même entreprise propose souvent des éléments différents en fonction de la catégorie de salarié : commercial, technicien, profil très recherché ou manager, chacun aura sa prime spéciale, ou ses stock options réservées.Bien entendu, ce sont précisément ces stock options – responsables de tant de démissions – qui ont fait la percée la plus remarquée dans les SSII. “Nous les réservons à une centaine de managers et de commerciaux, mais tous nos salariés participent à nos bénéfices, précise Pierre Dalmaz, directeur général de Transiciel. Et comme nous enregistrons des croissances de plus de 50 %, ils sont largement gagnants.”Jacques Poupon, DRH de GFI, renchérit : “Ce sont mille personnes qui ont bénéficié de stock options lors de notre dernier plan, sur un effectif de quatre mille personnes à l’époque. Et nous préparons actuellement un nouveau plan qui touchera plus de monde encore.”Au départ réservée aux managers, leur diffusion à l’ensemble des salariés d’une entreprise se répand comme tra”née de poudre. Pour Pierre Dellis, délégué général du Syntec, “la généralisation de ce phénomène est en cours”.
Des cadeaux pour l’embauché et l’embaucheur
Mais les SSII ne se sont pas arrêtées là. La prime de cooptation – petit présent de quelque 3 000 à 5 000 francs offerts au collaborateur qui est à l’initiative d’une embauche – est de plus en plus fréquente. On va même jusqu’à offrir des cadeaux au candidat lorsqu’il signe son contrat ! Une pratique courante aux Etats-Unis désignée sous le nom évocateur de welcome gift : voyage, prime substantielle pour certains profils – par exemple, chez Andersen Consulting -, voire un salaire d’autant plus élevé que le candidat signe rapidement !Lorsqu’on touche aux avantages matériels, la panoplie se diversifie davantage encore. Voitures de fonction, voyages de récompense, ordinateurs portables et téléphones mobiles se généralisent, surtout cette année. N’oublions pas que ces matériels resteront, en général, la propriété des individus… Et puis – moins avouables car sous le coup d’interdictions fiscales et sociales – les notes de frais se gonflent souvent. Enfin, les SSII encouragent et organisent toutes sortes d’activités sportives et culturelles pour fidéliser leurs troupes. Une façon de rester ” en famille ” tout en pratiquant – gratuitement, bien sûr – son hobby préféré.Si quelques-uns continuent de privilégier le salaire – “Nos salaires sont au-dessus de la moyenne du marché”, indique ainsi Claude Czechowski, PDG de CSC Europe, la majorité des SSII développe ainsi tout un arsenal d’accessoires de rémunération en tout genre. Reste que, comme l’indique justement Pierre Dellis, “toute chose acquise dans ce domaine est définitivement acquise” !
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