Dennis Austin, le co-créateur du PowerPoint, logiciel autant utilisé que méprisé par des figures de la tech, est décédé le 1ᵉʳ septembre dernier. Le développeur est mort des suites d’une longue maladie, un cancer du poumon, à l’âge de 76 ans, rapporte le Washington Post. En 1987, la petite société de logiciels Forethought sortait un produit qui allait révolutionner — voire créer — le monde de la présentation : « Presenter », la toute première version du PowerPoint que nous connaissons aujourd’hui. Trente-six ans plus tard, le logiciel est toujours utilisé pour créer, selon Microsoft, plus de 30 millions de présentations par jour.
Pour beaucoup, il y eut un avant et un après PowerPoint. Dans les années 80, il fallait, pour faire des présentations, passer par un rétroprojecteur : l’appareil pouvait projeter des diapositives, elles-mêmes conçues par des sociétés extérieures qui les fabriquaient à la demande. « Presenter » promettait de ne plus faire appel à ces prestataires de service en permettant à tout employé, disposant d’un ordinateur, de créer lui-même des présentations — soit un déroulé de diapositives précis.
Son rôle : rendre le logiciel facile d’utilisation
Et justement, le rôle de Dennis Austin, qui travaillait avec Robert Gaskins, l’autre concepteur du PowerPoint, était de rendre le programme facile d’utilisation. L’ingénieur, passé notamment par le prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT) et l’université de Californie à Santa Barbara, est parvenu à créer une « interface de manipulation directe » écrit-il dans un historique du développement du logiciel non publié, mais cité par nos confrères. La grande nouveauté était que « ce que vous éditiez ressemblait exactement à ce que vous pouviez voir sur la présentation finale ».
Pour Robert Gaskins, l’autre cocréateur de PowerPoint et auteur du livre « Sweating Bullets : Notes sur l’invention de PowerPoint », Dennis Austin « est à l’origine d’au moins la moitié des principales idées de conception » de ce programme. C’est bien simple : s’il n’avait pas conçu le logiciel, « personne n’en aurait jamais entendu parler », ajoute-t-il.
Pendant ses études, il travaille sur un ordinateur qui fait la taille d’une pièce
Né en Pennsylvanie, dans le nord-est des États-Unis, Dennis Austin grandit dans la banlieue de Pittsburgh, avec un père directeur d’une association de cadres, et une mère un temps dactylo. Il commence à suivre des études d’ingénieur au sein de l’université de Virginie. Pendant ses années universitaires, raconte le Washington Post, l’ordinateur sur lequel il travaille fait la taille d’une pièce, protégé par une vitre. Ce dernier s’entraînait, avec ses camarades, à écrire des programmes sur une machine qui générait des cartes perforées. Ces dernières étaient ensuite introduites dans l’ordinateur par des opérateurs spécialement formés. Nos confrères rapportent que le jeune Dennis travaillait directement sur la machine la nuit — notamment parce qu’il s’était lié d’amitié avec les opérateurs, normalement seuls à être autorisés à passer derrière la vitre.
Une fois son diplôme en poche, il passe par plusieurs entreprises dont General Electric avant d’être embauché par Forethought, une société fondée par deux anciens employés d’Apple. Dès sa prise de fonction, il co-développe « Presenter » — il travaillera sur le logiciel jusqu’à sa retraite en 1996 prise à l’âge de 49 ans. L’ancêtre du PowerPoint sort en 1987 : le programme est d’abord destiné aux ordinateurs Macintosh, avant qu’il ne devienne disponible sur PC, après le rachat de Forethought par Microsoft.
« Créer des présentations, pas simplement des diapositives »
Il devient alors PowerPoint 1.0 et finira par être intégré à la suite d’outils bureautiques de Microsoft. Le logiciel permet d’intégrer des graphiques et des images comme des logos d’entreprise. Il permet d’utiliser plusieurs polices de caractères et des bordures graphiques. L’idée, écrivait Dennis Austin, était de « créer des présentations, pas simplement des diapositives ». L’objectif sera pleinement rempli puisque aujourd’hui, le logiciel sert toujours de support visuel, autant pour la sphère professionnelle (présentation lors de réunions en entreprise ou formation) que privée (exposés scolaires, supports de discours de mariage…).
Point amusant, le logiciel a aussi, dès les années 2000, suscité de nombreuses critiques. The Atlantic raconte ainsi, dans un article publié le 23 juillet dernier, un épisode de « grande panique » ayant eu lieu en 2003. Ce logiciel était alors accusé de « corrompre les esprits, de dégrader la communication et de nous faire perdre notre temps ». On croyait alors que « PowerPoint — l’élément le plus ennuyeux de la suite Office, (synonyme de) réunions soporifiques — pouvait être maléfique », s’amusent à relever nos confrères.
Un logiciel « has been » détesté par Steve Jobs et Jeff Bezos
Le logiciel, bien que très utilisé, a aussi été honni. Steve Jobs aurait, selon Walter Isaacson, auteur d’une de ses biographies, déclaré que : « Les gens qui savent de quoi ils parlent n’ont pas besoin de PowerPoint ». Il aurait ajouté, avant d’interdire l’utilisation de ce programme au sein d’Apple : « Je déteste la façon dont les gens utilisent (PowerPoint) au lieu de réfléchir. Je voulais qu’ils s’engagent, qu’ils discutent à table, plutôt que de montrer une présentation PowerPoint ». Même sentiment chez Jeff Bezos, qui expliquait avoir interdit PowerPoint au sein d’Amazon. Cette décision est « probablement la chose la plus intelligente que nous ayons jamais faite », a-t-il même déclaré lors d’un événement en 2018.
Aujourd’hui encore, le logiciel reste pourtant un élément clé de la suite d’outils bureautiques de Microsoft. Des outils d’IA ont été ajoutés à PowerPoint, avec récemment la mise en place de Copilot proposée pour l’instant seulement à quelques centaines d’entreprises. À terme, Copilot pourrait, selon Microsoft, créer des présentations basées sur un document Word, générer des images et même ajuster le ton ou le format dans une présentation.
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Source : The Washington Post
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