Epaves, chaînes de navires, ancres, mines de la Seconde Guerre Mondiale, fûts industriels toxiques, conteneurs arrachés par les tempêtes… Les raisons de voir ce qui encombre le fond des eaux ne manquent pas. En premier lieu pour les dragues, ces bateaux-usines qui, sous la responsabilité des autorités portuaires, creusent régulièrement le fond afin d’en entretenir la navigabilité. “La plupart de ces déchets gisent à moins de 100 mètres de profondeur”, explique Xavier Lalanne, directeur de recherche chez Geomag. Créée en 1989, cette petite entreprise française (quatre salariés) est l’une des trois sociétés au monde spécialisées dans les capteurs magnétiques. C’est le chef de file du projet de recherche Eurêka-Magis – Magnetic and Acoustic Imaging System, Système d’imagerie sous-marine magnétique et acoustique. Mais les dragues ne sont pas les seuls à être intéressés par cette vision sous l’eau : “Les bateaux-câbliers (poseurs de câbles), qui déploient les réseaux de fibre optique des opérateurs télécoms le long des fleuves en canaux, sont aussi concernés”, ajoute Xavier Lalanne.
Or, aujourd’hui, aucune solution convenable n’existe pour ausculter les fonds marins à un prix acceptable. “On recourt au sonar, qui détecte des objets à condition qu’ils soient posés sur le fond. Et au magnétomètre, qui mesure le champ magnétique terrestre et décèle les objets pourvu qu’ils aient une intensité magnétique, et qui voit, lui, le sédiment. Pas si simple, cependant. Ces deux appareils, énormes, sont remorqués chacun à 200 ou 300 mètres à l’arrière du navire, précise Xavier Lalanne. Résultat, lorsqu’on recherche avec un sonar un amas de fûts de déchets toxiques, on repère au mieux une forme parmi toutes celles qui existent. C’est avec le magnétomètre que l’on valide l’information. Ensuite, on envoie les plongeurs.”
Avec son projet de recherche européen Magis (un budget d’environ 5 millions de francs sur deux ans), Geomag développe un appareil innovant, le Magis, qui rassemble dans le même engin un magnétomètre et un sonar. En une seule passe, il réalise l’impossible : la fusion rapide (quelques millièmes de secondes) des données magnétiques et acoustiques afin d’obtenir une imagerie de synthèse magnético-acoustique de haute résolution (10-4 Hz : 1/10 000e Hz) destinée à la détection d’objets posés sur le fond marin ou enfouis dans le sédiment.
Magis est ouvert à dautres logiciels et usages
“Aujourd’hui, malgré le GPS (Global Positioning System, système de localisation géographi- que – NDLR), on ne sait pas où le véhicule se trouve exactement. Surtout sous la surface de l’eau”, reprend le directeur de recherche. Avec Magis, les observateurs re- trouveront un fût de 200 litres en acier pesant 25 kilogrammes jusqu’à une dizaine de mètres du capteur. Peu impressionnant, peut-être, mais personne n’y était jamais parvenu jusqu’à présent. Restait à inventer un nouveau capteur magnétique. “Nous sommes partis d’une technologie de satellite d’observation magnétique, dont nous avons réalisé une version non spatialisée. Donc cent fois moins chère, confie Xavier Lalanne. Aujourd’hui, nous abordons une vision qui n’existait pas. Les opérateurs de Magis vont diviser par deux le coût de leurs heures de bateau océanographique, qui s’élève à 100 000 francs par jour. Et notre système ne coûtera que de 500 000 à 700 000 francs.” Autre originalité, la plate-forme technique Magis est ouverte à des logiciels commerciaux de traitement des données géophysiques, comme ceux de GeoSoft ou d’Intrepid. Du coup, les sociétés utilisatrices vont adapter leurs propres traitements, qui sont très différents selon l’utilisation : prospection pétrolière ou recherche d’épaves.
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