Pour accélérer le développement des universités en ligne, le ministère de l’Éducation nationale et de la Recherche a renouvelé, cette année, son appel à projets, clôturé fin juin. Résultat : 95 % des universités ont participé à l’opération. “Une vraie dynamique s’est créée depuis deux ans. Cette année, seules six universités ne se sont pas mobilisées, assure Philippe Perrey, le responsable des campus numériques au ministère. Aujourd’hui, plus de 6 000 étudiants sont concernés. À la rentrée prochaine, ils seront 25 000.” L’idée de se regrouper entre universités, françaises et même étrangères, pour promouvoir une offre de formation à distance, fait donc son chemin dans l’Hexagone.
Pléthore de formations
Toutefois, il est encore bien difficile d’y voir clair : il n’existerait pas moins de 900 formations, répertoriées sur le site de “La formation ouverte et à distance” de l’Éducation nationale (www.formasup.education.fr). Une offre qui recouvre des réalités très différentes. Ainsi, la plupart des cursus mis en place s’adressent en priorité aux “étudiants tout au long de la vie”, c’est-à-dire aux professionnels. C’est le cas, par exemple, du consortium Mecaweb (regroupant, entre autres, les Instituts nationaux des sciences appliquées et l’École nationale supérieure des Arts et métiers), qui développe des cours dans le secteur de la mécanique. D’autres, comme le Canege (campus numérique en économie et gestion, réunissant la crème des universités françaises dans ces deux disciplines), élargissent leur cible aux étudiants en formation initiale, qui peuvent, par exemple, suivre l’intégralité des cours de Deug sur le réseau des réseaux. Certains campus privilégient, enfin, le partenariat avec des écoles étrangères. L’IAE (Institut d’administration des entreprises) de Caen propose ainsi ses diplômes dans une quarantaine de pays. En Côte-d’Ivoire, 25 élèves de l’Institut supérieur international des hautes études de commerce et de gestion suivent pour leur part les cours de capacité en gestion des entreprises via l’e-campus. Pour ajouter à la confusion, certaines universités dispensent des enseignements en ligne qui viennent simplement compléter les cours traditionnels.Faire de l’enseignement à distance ne s’improvise pas. L’Université Henri-Poincaré à Nantes, qui propose déjà 83 modules en ligne (informatique, langues, etc.), a mis en place une structure, baptisée MediaTICE, composée d’une équipe de sept ingénieurs aux compétences variées (graphisme, vidéo, etc.), pour aider les enseignants à produire leurs cours en ligne. Avec le souci de ne pas s’arrêter à la mise en place de moyens techniques importants, fussent-ils essentiels. Pour éviter de perdre des élèves en cours de route et les laisser livrés à eux-mêmes face à un écran d’ordinateur, il faut “humaniser” l’outil, en proposant de l’aide en ligne à travers forums ou chats, et en évaluant, en amont, les besoins et le niveau d’autonomie des étudiants. Pour Michel Lecomte, responsable pédagogique de l’École des mines de Douai ?” qui propose, en partenariat avec les structures d’Alès, d’Albi et de Nantes, une formation continue diplômante, pour partie à distance ?”, tout se joue lors des premiers entretiens de sélection des candidats. “Nous vérifions leur niveau de connaissances scientifiques mais aussi leur motivation, détaille-t-il. Nous essayons de voir s’ils se trouvent dans les bonnes conditions de réussite et les alertons, dès le départ, des difficultés qu’il risque de rencontrer.” Un préalable d’autant plus indispensable qu’après une journée de travail, les élèves- professionnels n’ont pas forcément envie de se remettre à étudier. Du coup, de petites rencontres locales sont organisées toutes les sept semaines et, trois fois par an, un “regroupement national” rassemble l’ensemble de la promotion de cyber-étudiants. Un dispositif qui marche : l’an dernier, le cursus n’a eu à déplorer qu’un seul abandon sur une promotion de 18 personnes.
Si loin, si proche
C’est le paradoxe de la communication virtuelle : plus elle s’étoffe, plus il convient d’imaginer des rendez-vous présentiels réguliers et pérennes, en marge des salles de cours classiques. Ce qui ne va pas forcément avec l’état de la législation française en matière d’enseignement. “Le travail de l’enseignant-chercheur est aujourd’hui quantifié en heures de présence en amphi : comment tenir compte alors du temps passé à concevoir et mettre en ligne les ressources pédagogiques, à assurer le tutorat des étudiants, etc. ?”, s’interroge Philippe Perrey, au ministère de l’Éducation nationale. Le débat est ouvert.
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