Le « droit à l’oubli » n’est pas du ressort de Google. Voilà l’avis de l’avocat général de la Cour européenne de justice (CEJ) dans une affaire qui oppose le géant du web à un citoyen espagnol. M. Niilo Jääskinen estime, dans ses conclusions rendues publiques ce mardi 25 juin, que Google n’était pas responsable des données personnelles apparaissant sur les pages web qu’il traite et que le « droit à l’oubli » sur internet ne pouvait pas être invoqué à son encontre.
L’avis de l’avocat général ne lie pas la CEJ. Les conclusions des avocats généraux de la CEJ sont des avis juridiques qui sont censés être indépendants et impartiaux, et qui doivent présenter à la Cour des solutions légales. Néanmoins, elles sont généralement suivies dans la majorité des cas. Dans le cas présent, la Cour rendra son arrêt à une date ultérieure.
Quatre ans de procédures
Le point de départ de l’affaire remonte à 1998, lorsqu’un journal espagnol a publié dans son édition papier des annonces concernant une adjudication sur saisie immobilière pour recouvrement de dette visant une personne dont le nom était mentionné. Une version électronique du journal a par la suite été mise en ligne. En novembre 2009, la personne en question a contacté l’éditeur en expliquant que, lorsqu’elle tapait son nom sur Google, apparaissait une référence aux pages de journal comportant cette annonce d’adjudication, alors même que la procédure de saisie relative à ses dettes avait été réglée depuis des années.
Elle a également contacté Google Spain pour demander que son nom n’apparaisse plus en relation avec cette affaire, et Google Spain a transmis la demande à sa maison-mère Google Inc, en Californie. Elle a ensuite déposé une réclamation auprès de l’Agence espagnole de protection des données, qui a été saisie parallèlement par Google Spain et Google Inc, et l’affaire est remontée jusqu’à la Cour de justice de l’UE.
Pour Google, le droit à l’oubli revient à de la censure
Dans ses conclusions, l’avocat général estime qu’une autorité nationale en matière de protection des données ne saurait exiger d’un moteur de recherche sur internet qu’il retire des informations de son index, sauf dans des cas précis où des « codes d’exclusion » ont été inclus par l’éditeur, ce qui n’est pas le cas dans l’affaire en question.
L’avocat général souligne aussi que la directive européenne sur la protection des données n’établit pas de « droit à l’oubli », et qu’un tel droit ne saurait donc être invoqué à l’encontre des moteurs de recherche sur internet. « Il s’agit d’un avis important pour la liberté d’expression. Nous sommes satisfaits de constater qu’il soutient notre position de longue date selon laquelle demander aux moteurs de recherche de supprimer des informations légales et légitimes reviendrait à de la censure », a réagi Bill Echikson, un porte-parole de Google, dans un communiqué.
Françoise Castex plaide pour une nouvelle législation européenne
De son côté, l’eurodéputée socialiste Françoise Castex estime que « Google n’est pas au-dessus des lois, mais encore faut-il que l’Europe se dote d’une législation adaptée à l’ère numérique ». Elle rappelle que le nouveau règlement sur la protection des données personnelles, qui est actuellement en discussion au Parlement et au Conseil, « prévoit un renforcement des droits des citoyens avec le droit à l’oubli et le droit à la portabilité des données personnelles. Cependant, son adoption ne cesse d’être reportée ».
A lire aussi:
La CNIL consulte les internautes sur le droit à l’oubli numérique, le 30/05/2013
Droit à l’oubli, un combat perdu d’avance ?, le 15/03/2012
Sources:
Les conclusions de l’avocat général de la CEJ
Le blog de Françoise Castex
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